Villes méditerranéennes / Les espaces ouverts dans la fabrique métropolitaine : quels questionnements ?

Monique Poulot

L’article de Monique Poulot au format PDF


La notion d’espaces ouverts s’est imposée dans différents domaines scientifiques au début des années 1990, le tournant environnemental ayant donné une nouvelle force au terme inventé dans la décennie soixante pour déchiffrer la forme urbaine de Los Angeles (Strong, 1965). Devenue une « notion à la mode », comme le montrent les occurrences du terme au XXIe siècle, elle est interrogée par plusieurs courants de la recherche en sciences sociales et humaines : des penseurs de la ville (urbanistes, architectes) à ceux des systèmes alimentaires (économistes et géographes ruraux), des spécialistes de l’environnement (dans la lignée des trames vertes et bleus) aux aménageurs.

Elle peine toutefois à trouver une définition consensuelle entre ces différents courants. Pour les urbanistes, elle est volontiers rabattue sur la caractéristique d’ouverture dans une appréhension visuelle : c’est un espace relativement vacant, non oblitéré par des infrastructures lourdes et où peut se déployer le regard. Vide relatif par rapport à ce qui l’entoure, l’espace ouvert renvoie alors à un champ des possibles en matière d’usages et d’appropriations où peuvent se déployer des expérimentations urbanistiques ou sociales. Dans cette appréhension, tout « trou » dans la ville, notamment les friches industrielles ou urbaines (Raffin, 2007 ; Andres et Grésillon, 2011), serait un espace ouvert : le terme apparaît ainsi dans les analyses sur les Grands Voisins à Paris ou Lx Factory à Lisbonne (Giroud, 2007) et plus globalement dans la littérature sur les tiers-lieux (Scaillerez et Tremblay, 2017 ; Liefooghe, 2018). On en mesure aisément la portée heuristique, les espaces ouverts s’imposant comme de nouveaux lieux d’invention de la fabrique métropolitaine, voire des espaces d’alternatives pour les métropoles saisies par l’obligation normative et citoyenne d’entrer en durabilité.

Reste que le vocable « ouvert » peut en appeler aussi à d’autres éléments, notamment quand il s’applique aux espaces plus éloignés des villes-centres, suburbains ou périurbains. L’Institut d’Aménagement et d’Urbanisme de la région Ile-de-France en fournit une définition commode : ce sont « l’ensemble des espaces agricoles, boisés et naturels, habituellement considérés de manière indépendante, alors qu’ils jouent des rôles similaires dans le fonctionnement des territoires (…) » puisqu’ils « ont la caractéristique d’avoir un sol vivant, riche en potentialités (par opposition aux espaces urbanisés – zones urbaines, zones d’activité, infrastructures – dotés d’un sol recouvert, non réversible) » (IAU-DRIAAF, 2009 : 7). Dans cette acception propre aux études périurbaines et rurales, l’ouverture renvoie à des usages sylvo-agricoles liés à la présence d’un sol non artificialisé, « la pleine terre » comme disent les agronomes : le plateau de Saclay en Ile-de-France ou de larges portions des ceintures vertes métropolitaines en figurent des illustrations. Ce lien revendiqué à un substrat vivant et à un fonctionnement écologique en réseau insiste sur la dimension paysagère de l’espace ouvert et sur l’entrée des espaces de nature dans la ville (Chalas, 2002). Le terme est alors utilisé tant pour décrire les tiers paysages à la Gilles Clément (2004) – espaces négligés ou inexploités par l’homme – que les formes nouvelles d’agrarisation (Erwein et Salomon Cavin, 2014) ou de ruralisation de la ville (Poulot, 2013).

Ces deux lectures des espaces ouverts montrent la richesse d’une notion aux contours changeants mais qui permet d’aborder les transformations métropolitaines en cours. Attentives à des composantes différentes de ces espaces ouverts susceptibles de conduire à différentes formes d’appropriation par les habitants pour aller vers la constitution de lieux (Agnew, 1990 ; Vanier, 2000), elles inscrivent la fabrique métropolitaine actuelle dans deux grands courants théoriques, entre urbanisme et agriurbanisme (Léger et Mariolle, 2019).

Mon propos est de revenir dans un premier temps sur la genèse de la notion pour comprendre son émergence et sa généralisation aujourd’hui en montrant aussi les cheminements et détournements d’un terme, entre monde anglo-saxon et recherche francophone1. Cette généalogie vient éclairer les réflexions actuelles sur les manières de faire la ville, l’urbanisme intégrant la nature et se faisant agriurbanisme2. Ce dernier sera notamment analysé à partir des espaces ouverts périurbains : les pratiques habitantes à l’œuvre révèlent des logiques d’appropriation et des processus de transactions en train de se nouer autour de ces espaces ouverts, espaces agricoles inclus.

Les espaces ouverts : généalogie de la notion

L’invention de la notion

Les premières occurrences du terme « espaces ouverts » remontent aux années 1960 aux États-Unis, plutôt dans la sphère des penseurs de la ville et du design urbain pour appréhender les nouvelles formes urbaines liées à l’urban sprawl. Anna Louisa Strong (1968, n.p.) retient ainsi que « l’espace ouvert est une zone – petite ou grande, permanente ou temporaire, publique ou privée – située à l’intérieur ou à la périphérie d’une région urbaine, où la nature prédomine soit en raison de l’état initial (agriculture, forêts) soit par une action d’aménagement (parcs), de protection (sites classés) ou d’abandon (carrières délaissées d’infrastructures…) [et qui] assure des fonctions variées et complémentaires, économiques, esthétiques et paysagères, récréatives, biologiques et même scientifiques et pédagogiques ». Maria Clawson en 1969 le considère « une nouvelle ressource urbaine contribuant à la qualité de l’environnement urbain »3. La qualité urbaine est en effet au cœur de la notion, les espaces non bâtis étant conçus dans leur lien avec la nature pour aérer la ville.

L’architecte paysagiste écossais, fondateur du département d’architecture et paysage de l’Université de Pennsylvanie, Ian McHarg, a largement œuvré à la diffusion du terme, avec son livre Design with nature (1969) traduit en plusieurs langues, notamment en français en 1980. Il y introduit aussi une dimension plus nettement agricole et appelle au développement de cette activité dans la ville. Ces espaces ouverts vus comme « urbains ou ruraux, (…) ne doivent pas être choisis selon les critères de valeur du sol mais suivant la capacité à « accueillir » des activités vertes (agriculture, loisirs) (car) la faible valeur attribuée à l’espace ouvert provoque à coup sûr son urbanisation » (traduction française, 1980 : 57).

Le terme est rapidement repris en France dans le sillage de l’Institut d’Aménagement de la Région Ile-de-France (IAU), en dépit de certains réticences liées notamment au risque de confusion entre espaces ouverts et paysages ouverts et à une approche trop aménagiste (Falque, 1973a). L’acception est d’emblée rurale et urbaine : l’espace ouvert est envisagé dans une relation fonctionnelle avec les espaces bâtis pour fonder une politique d’urbanisation raisonnée préservant des zones naturelles d’équilibre (Falque, 1973b). Le terme intervient en effet en préambule du SDAU Ile-de-France de 1976 négocié entre l’État et la région ; cette dernière s’approprie d’ailleurs à la même date la compétence préservation des espaces verts et se dote pour la circonstance de l’Agence des espaces verts4.

Ces éléments soulignent la force de la notion : dès son origine, l’espace ouvert est appréhendé comme une forme complexe remplissant des fonctions multiples dont la plupart se retrouvent dans les services écosystémiques5 (Huang et al., 2015). Appliqué en priorité à la ville dans un contexte d’urbanisation massive, il englobe des espaces variés dans leur texture et leur composition, plutôt impropres à l’urbanisation mais riches de fonctionnalités de loisirs et d’approvisionnement agricole et alimentaire. S’il n’est pas fait référence à une trame ou une armature verte, la littérature de l’époque se réfère volontiers à la « matrice verte » de Lewis Munford (1961), une matrice à protéger par des interventions politiques fortes susceptibles de renverser « la rationalité économique au profit de la rationalité écologique (…) Chaque ville serait dotée d’une zone agricole de protection écologique. L’espace agricole peut même jouer un rôle fondamental en termes de loisirs et d’espace public dans la mesure où il est largement pénétrable, ainsi les bordures de champs, les sentiers et les pistes cyclables » (William, 1970). L’espace ouvert participe de l’équilibre écologique de la ville et sous-tend la création d’espaces publics, notamment dans les villes américaines qui en sont dépourvues.

Sans disparaître complètement, le terme connaîtra une forme d’effacement dans les années 1980 et 1990 au moins en France. La vision d’une ville-nature peine à s’affirmer chez les urbanistes dans une tradition de ville européenne dense et minérale quand les géographes du rural ou de l’environnement sont plus enclins à réfléchir à la nature et au paysage hors des villes6. Ces deux champs scientifiques semblent d’ailleurs s’éloigner toujours plus tant les fonctions de la ville et de l’espace rural se spécialisent si bien que le périurbain troué d’espaces ouverts n’est envisagé alors comme de l’urbain en devenir (Berger, 2004). Il faut attendre la montée des études périurbaines et le renouveau des études rurales en France (Vanier, 2000 ; Poulot, 2018) pour le voir s’imposer à nouveau au tournant du XXIe siècle dans le paradigme triomphant du développement durable.

Une notion à la mode : entre renouvellements disciplinaires et nouvelle pensée aménagiste

Notion désormais à la mode, le terme est largement employé aujourd’hui, devenu quasi opérationnel en termes d’aménagement d’une ville dont l’enveloppe spatiale ne cesse de s’élargir7. Il prend acte d’une forme nouvelle de la ville transformée par l’étalement urbain, dite ville diffuse (Indovina, 1999 ; Secchi, 2004), ville éclatée (Berger, 2004) ou « entre ville » (Sieverts, 2004) selon les traditions nationales. Cette lecture convoque les espaces ouverts pour participer au projet urbain :  ils sont considérés comme des espaces en creux qui attendent d’être informés par la ville. Comme l’écrit Mayté Banzo, l’espace ouvert est envisagé comme « un espace végétal le plus souvent, un gage de qualité environnementale pour une ville durable, une condition du bien-être et de la qualité de vie des habitants, un outil de qualification et de requalification des interstices urbains, une matière pour l’élaboration de nouveaux espaces publics » (2008 : 9). Ils sont clairement au service de la ville et de ses habitants pour une meilleure habitabilité, au même titre que les espaces de dalles ou les infrastructures bétonnées, au risque d’en faire des espaces inertes et interchangeables, soit sans texture ou organisation préalable.

Nombre d’urbanistes ont toutefois dépassé cette vision en négatif de l’espace ouvert urbain et s’attachent à le formaliser dans une référence à un non bâti qui en appelle à la campagne, à la nature et au paysage. C’est ce lien à des caractéristiques rurales qui en fait une force d’innovation, jouant sur une triple ouverture possible, paysagère d’une part, d’accessibilité de l’autre, de potentialité enfin (Banzo, 2008). Ces urbanistes rejoignent les penseurs des espaces forestiers, agricoles et naturels pour qui la notion d’espaces ouverts est une entrée majeure des nouvelles études rurales (Donadieu, 2002 ; Michel et Mermet, 2002 ; Janin et Fleury, 2005 ; Le Caro, 2007 ; Banos et Sabatier, 2010). L’espace ouvert devient ainsi une figure qui transcende les catégories spatiales, appelant des analyses aussi bien en ville, que dans le périurbain et le rural plus éloigné8. Il permet de regrouper sous un même vocable l’ensemble des espaces agricoles, boisés et naturels, qui jouent des rôles similaires dans le fonctionnement des territoires. L’objet ainsi défini forme un système qui se doit d’être analysé en lui-même. Il a une organisation, un sens, une dynamique qu’il convient de comprendre et qui ne demande pas seulement à être guidé ou informé par la ville ; il peut être porteur d’innovations tant à la ville qu’à la campagne, nourri d’un jeu de représentations complexes tant « les habitants portent aujourd’hui un regard renouvelé, sans doute plus critique et plus utilitaire qu’autrefois, sur la ville et la campagne » (Le Caro et al., 2016).

Si cette approche systémique rendue nécessaire explique pour une bonne part la montée de la thématique des services écosystémiques, elle autorise aussi la mise en lien des pratiques habitantes dans les différents types d’espaces ouverts. Elle dévoile des formes d’appropriations liées au végétal, au sol non imperméabilisé dont témoignent par exemple les pratiques jardinières en plein développement dans les villes (Den Hartig, 2013 ; Mestdagh, 2015). Loin d’évincer les aspects agricoles, elle souligne une reconnexion à l’alimentation, ces espaces ouverts agricoles devenant nourriciers au point d’être qualifiés de paysages alimentaires (Toublanc et Poulot, 2018) et de porter une agriculture dite urbaine (Aubry et Consalés, 2014).

Cette question des espaces ouverts participe donc clairement d’un renouvellement des problématiques dans plusieurs champs disciplinaires et ouvre la voie à la transversalité et à l’action aménagiste. Conduite d’abord dans le périurbain tant les espaces ouverts en constituaient la caractéristique, elle a permis d’analyser les territorialités habitantes, les formes d’attachement et les constructions territoriales dont ils sont le support (Poulot et al., 2016). Si la question est en train d’être instruite dans l’urbain comme le montre la vigueur des recherches sur les trames vertes et bleues mais aussi sur les jardins ou l’agriculture urbaine, elle reste encore moins soutenue pour les espaces ruraux à l’exception des loisirs portés par ces espaces. Dans tous les cas, l’espace ouvert s’affirme comme un bien commun qu’il convient de conserver et de valoriser pour rendre l’urbain généralisé plus habitable et partant plus durable.

 —

Les espaces ouverts agricoles périurbains dans la fabrique métropolitaine : vers un agriurbanisme

Appropriations habitantes et logiques de transaction

Si dans les processus d’urbanisation de l’après seconde guerre mondiale et dans la périurbanisation en grand qui s’installe après les années 1970 les espaces ouverts n’ont guère été considérés, sauf comme des réserves foncières à urbaniser, des infléchissements récents se notent désormais. Les normes règlementaires, depuis la loi Solidarité Renouvellement Urbain (SRU, 2000) jusqu’à la loi  pour l’Accès au Logement et un Urbanisme Rénové (ALUR, 2014) en passant par la par loi ENE, dite loi Grenelle II (Loi n°2010-788 du 12 juillet 2010 portant Engagement National pour l’Environnement) appellent à la végétalisation des centres (Rankovic et al., 2012) mais aussi à la densification dans des logiques de durabilité (Fonticelli, 2018). Surtout, les travaux menés dans le cadre des appels du PUCA9, notamment sur les espaces périurbains, et l’intensité des mobilisations citoyennes urbaines ou rurales contre l’artificialisation des terres (Pluvinage et al., 2013 ; Sencébé, 2014 ; Pailloux, 2015 ; Clément et Soulard, 2016) révèlent une appropriation habitante, un attachement à ces espaces susceptible de faire advenir des logiques de transaction.

Nous reprendrons ici les conclusions des enquêtes10 menées dans le périurbain ouest francilien du front urbain jusqu’aux marges de l’Eure depuis une petite vingtaine d’années (Poulot et al., 2014 ; Poulot et al., 2016 ; Berger et al., 2016). Le cadre d’analyse développé par Martin Vanier sur les trois âges de la relation ville-campagne s’y avère totalement pertinent : à « la campagne (…) conçue comme un espace peu attractif pour les urbains (…) où il ne fait pas bon vivre au regard des standards triomphants de la vie moderne » a succédé l’âge «  de la consommation (…) quand la campagne attire pour son espace mais aussi pour les valeurs qu’elle porte » pour déboucher sur « celui de la transaction, soit le temps d’une obligation de combinaisons qui ne les exemptent pas de conflits et de contradictions mais les lient plus jamais l’une à l’autre » (2005 : 14-17).

Trois postures se repèrent dans nos enquêtes avec des recouvrements de temps et des chevauchements, la troisième semblant l’emporter partout aujourd’hui. La première posture est celle de la mise à distance des espaces ouverts comme d’ailleurs de la mise à distance de la ville et de ses nuisances. Les lieux de vie ponctués d’espaces ouverts fonctionnent comme un cadre de vue que les habitants ne cherchent pas à connaître non plus qu’à s’approprier ; leur apprivoisement est difficile par manque de temps (mobilités quotidiennes) et du fait d’éléments topographiques ou climatiques qui imposent des contraintes. La seconde posture est celle de l’adaptation et de la reconnaissance : les habitants développent une familiarité avec ces espaces ouverts qu’ils fréquentent d’abord dans leurs parcours quotidiens de navetteurs mais aussi dans leurs pratiques de loisirs. Les espaces ouverts deviennent une ressource locale considérée en tant que telle : ils en appellent aux sens (appréhension des ambiances, de la saisonnalité, des bruits, des odeurs, de la topographie des lieux) et viennent apporter bien-être et satisfaction résidentielle. Ils participent d’une qualité de vie « au contact de la nature » et offrent des possibilités d’interactions sociales au gré des rencontres sur les sentiers et en bordures de champs (Banos et Candau, 2014).

La dernière posture, qui tend à s’imposer aujourd’hui fait apparaître de nouvelles logiques spatiales et sociales : les habitants affirment du sens à ces espaces ouverts et s’engagent dans des démarches de protection ou de conservation. Ils soutiennent un marquage de ces espaces évoquant la ruralité : restauration et entretien du petit patrimoine rural comme les moulins ou lavoirs mais aussi réactivation des fêtes ou marchés traditionnels (Veschambre, 2004)11. Plus encore, le retour de la question alimentaire (Sonnino, 2009 ; Steel, 2016) avec les inquiétudes citoyennes liées aux crises sanitaires répétées et à la malbouffe conduit à un nouvel intérêt pour les espaces agricoles – les moins évidents à s’approprier. Certaines fermes y sont notamment perçues comme des lieux agricoles « alternatifs » apportant une alimentation saine et développant une sociabilité autour du bien-être alimentaire ; elles fonctionnent comme des lieux d’acculturation réciproque entre urbains et agriculture et figurent des espaces de négociation pour aller vers une agriculture de proximité. Les espaces ouverts agricoles devenus « espaces de la confiance » (Lagagne, 2011) ou espaces de transaction s’imposent dès lors comme des espaces à défendre : le développement des foncières citoyennes pour la mise en défens de terres agricoles et l’installation d’agriculteurs de proximité en est une illustration (Baysse Lainé, 2018).

La plupart des travaux menés sur d’autres périurbains métropolitains concluent à l’identique : ainsi sur le périurbain est francilien (Thébert et al., 2016), ainsi sur les périphéries urbaines espagnoles ou italiennes entrées en parcs agricoles (Giacché, 2014). Et les études sur l’agriculture intra et péri-urbaine ne disent pas autre chose (Perrin et al., 2018). Les espaces ouverts, espaces agricoles inclus, sont désormais entrés dans des « processus de territorialités réflexives » pour reprendre la formule de Patrick Melé (2009) : ils sont des éléments de reconnaissance et d’identification des habitants ; ils participent de leurs modes d’habiter (Mathieu, 2014) quelle que soit leur situation, dans l’urbain ou le rural ; ils sont le support de pratiques régulières et variées, des espaces de rencontres et de sociabilité, des espaces publics en devenir, soit des lieux (Fleury, 2018).

 —

De l’urbanisme à l’agriurbanisme : les espaces ouverts agricoles dans le projet urbain

L’attention nouvelle portée aux espaces ouverts tant par les habitants que par les décideurs conduit à envisager de nouvelles manières de faire la ville : l’agriurbanisme. La notion date des années 2000, relayée notamment par l’École Nationale Supérieure du Paysage de Versailles ; elle rejoint par certains aspects les préconisations d’un Ian McHarg dans son design with nature, en focalisant plus nettement toutefois sur une catégorie d’espaces ouverts à savoir les espaces agricoles. Il s’agit « pour les architectes-paysagistes, qui sont désormais placés par rapport aux citadins (…) en position de médiation, de traduction, (de) faire percevoir l’espace agricole comme un territoire à comprendre. Pour les architectes, (…) (de) restaurer le bâti agricole patrimonial, (de) concevoir le bâti agricole moderne en empathie avec les systèmes agricoles contemporains. Pour les agronomes (de prendre acte que) la production de l’agriculture vise à la fois des valeurs classique (les denrées agricoles) et celle du territoire » (Vidal et Fleury, 2007). L’agriurbanisme en appelle d’une part à intégrer les espaces agricoles dans le paysage urbain en conservant leur dimension nourricière, de l’autre à les faire voir et reconnaître. L’objectif est de les lier aux pratiques habitantes : depuis le déambuler jusqu’à l’acte d’achat, depuis l’entrer en interaction avec l’autre jusqu’à l’acte de cultiver, depuis l’admirer jusqu’à l’acte d’apprentissage12. On mesure le rôle majeur des bâtiments agricoles dans cette recherche de reliance mais aussi des sentiers traversant les parcelles.

Plusieurs formes agriurbaines se repèrent déjà çà et là dans différentes métropoles, à l’image des sentiers d’interprétation agricoles conçus sur le modèle des centres d’interprétation québecois (Morisset, 1967), soit des sentiers qui donnent à voir et à comprendre, éventuellement à acheter et à participer. La création de tels sentiers prend acte d’une méconnaissance du monde agricole par ceux qui n’en sont pas les acteurs, soit les « citadins ». Ponctué de panneaux didactiques, le cheminement proposé est pensé comme une expérience interactive destinée à montrer que « l’agriculture est garante, en bordure de ville, d’un espace écologiquement et culturellement sain, riche et porteur d’identité ; (…) qu’elle est solidaire de l’avenir des territoires périurbains, espaces de transition et en transition à la recherche de territorialités » (Guiomar, 2010). La finalité du sentier est multiple : aider le public, habitant ou de passage, à prendre conscience du risque de disparition de ces espaces sous l’effet de l’urbanisation ; l’alerter sur l’existence de motifs paysagers, perçus comme menacés à plus ou moins long terme ; lui apprendre à comprendre ce que ce lieu apprécié doit à l’agriculture pour ensuite chercher à la protéger. Ces sentiers sont redoublés par des démarches citoyennes comme les balades urbaines que toutes les métropoles ont désormais mises en place et qui font la part belle aux espaces ouverts et agricoles (Mamou, 2013 ; Long et Tonini, 2014 ; Kanelopoullou, 2018). On pourrait y ajouter les ateliers de jardinage collectif (Den Hartigh, 2013) qui participent des mêmes logiques.

1.Les sentiers d’interprétation agricole : donner à voir les espaces ouverts agricoles pour aller vers des logiques de transaction (Périgny sur Marne et Plateau de Saclay-Ile-de-France) (Poulot, juillet 2019).

Une seconde forme agriurbaine est la lisière urbaine qui s’attache à penser les situations de contact entre l’espace urbain bâti et l’espace qui le borde, « naturel » ou agricole (Beringuier, 2015) en organisant des transitions (Toublanc et al., 2016). Elle vient traduire le discours des Schémas de cohérence territorial qui proclame la nécessité de « recoudre » le territoire, de restaurer des relations harmonieuses entre des espaces cloisonnés, de faire du lien entre espaces bâtis et espaces ouverts. La finalité de ces aménagements est double puisqu’il s’agit de contenir le front urbain et d’aménager des zones tampons (sentiers, mobiliers urbains, pistes cyclables, aires de jeux pour enfants, jardins, plantations…) dans une logique multifonctionnelle. Ces interfaces ont vocation à s’épaissir pour devenir des entre-deux d’échange et de circulation tant d’un point de vue social que paysager et écologique, voire alimentaire. Un tel modèle rencontre un écho très favorable auprès des acteurs institutionnels et associatifs. La mise en œuvre reste toutefois complexe car il est difficile d’intégrer tous les usages et l’application concrète de la figure se heurte bien souvent à une propriété foncière qui refuse toute ouverture (Aragau, 2013). Au final, les réalisations effectives se déploient surtout sur du foncier appartenant aux collectivités territoriales et prennent la forme d’aménagement de parcs ou d’espaces publics avec de plus en plus d’espaces agricoles ou de jardinages.

La dernière figure – et la seconde en montre déjà des échos – est la conservation voire l’invention d’un paysage alimentaire nourricier dans la ville éclatée. Les formes en sont multiples, depuis les jardins jusqu’aux microfermes (Morel, 2016 ; Hasnaoui Amri, 2018) en passant par les diversifications des exploitations existantes ou encore les toits potagers (Aubry et Consalès, 2014). Ces agencements inédits sont sans nul doute les plus complexes car ils appellent des arrangements fonciers et de fabrication de terre arable, des modalités de cohabitation à inventer. Les territoires agri-urbains en Ile-de-France (Poulot, 2014) comme certains agriparcs en Italie en fournissent un début d’illustration avec la mise en œuvre d’une politique agri-urbaine volontariste qui irrigue tous les aspects de l’aménagement, urbanisme compris. Leur pérennité reste toutefois fragile en l’absence d’une politique forte de transition agricole au niveau national et européen ; elle se heurte aussi à la difficile mise en place d’une gouvernance intégrant élus-agriculteurs et habitants (Perrin et al. 2017).

2. Les espaces ouverts : Paysages alimentaires et nouveaux espaces publics (Cueillette de Compans en périurbain francilien et jardins partagés Varsovie) (Poulot, juillet 2019 et juillet 2018).

Les espaces ouverts, notion floue au départ, ont acquis dans les vingt dernières années une reconnaissance nouvelle, accordée tant aux pratiques et désirs habitants qu’aux évolutions règlementaires pour faire advenir la ville durable. Si la tendance est ancienne pour les forêts, voire les espaces dits naturels, le processus d’apprivoisement a été beaucoup plus lent pour les espaces agricoles qui ont été les derniers à obtenir droit de cité dans la ville éclatée. Mais des processus de transaction se dévoilent désormais à toutes les échelles, notamment à des échelles locales ou intermédiaires, celles repérées à petite échelle paraissant souvent plus convenues, engluées dans des conflits politiques. Au-delà des agencements classiques, la grammaire de ces figures agriurbaines reste toutefois encore à instruire, voire à construire. À l’image de l’urbanisme temporaire qui a bousculé le projet urbain, l’agriculture apparaît en effet un vecteur tout aussi puissant de transformation de la ville sachant qu’elle est appelée elle-même à se transformer tout aussi profondément dans cette intégration. Les nouvelles installations hors cadre familial sur des exploitations différemment agencées avec de nouveaux paysages (permaculture mais aussi cultures en bacs…) en sont une illustration ; il en est de même des formes d’agricultures nomades ou éphémères (Soulard, 2014) – souvent de l’élevage (Darly, 2014 ; Delfosse et al., 2018) – qui se développent dans les situations d’interfaces qu’a multipliées la ville. De telles évolutions annoncent un possible avènement de la ville-nature (Chalas, 2005), et plus encore de la ville-campagne (Fleury et Donadieu, 2003 ; Poulot et al., 2016).

MONIQUE POULOT

 —

Professeure à l’Université Paris Nanterre, et membre de l’UMR LAVUE, Monique Poulot travaille sur les nouvelles ruralités et les nouveaux agencements entre agriculture et ville dans les pays développés (France, Europe et Québec). Ses recherches portent sur les espaces ouverts dans les zones métropolitaines et périurbaines. Longtemps considérés comme de l’urbain en devenir, leur maintien est interrogé à l’aune des pratiques habitantes qui manifestent un attachement à ces espaces et conduisent à des logiques de transaction susceptibles de conduire à leur préservation. Le renouveau de la question alimentaire et la mise en place de nouveaux systèmes alimentaires (circuits courts, agriculture vivrière) participent de ces nouveaux modes d’habiter en affirmation dans nombre de métropoles.

mpoulotmoreau@parisnanterre.fr

Couverture : Espaces ouverts : en situation intra-urbaine (Varsovie) et en situation périurbaine (CA Marne et Gondoire-Ile-de-France) (Poulot, juillet 2018 et septembre 2019)

Bibliographie

Agnew J., 1990, « Les lieux contre la sociologie politique », Espaces Temps, 43-44, 87-94.

Andres L. et Grésillon B., 2011, « Les figures de la friche dans les villes culturelles et créatives », L’espace géographique, 40, 15-30.

Aubry C. et Consalès J.-N., 2014, « L’agriculture urbaine en question : épiphénomène ou révolution lente ? » dialogue, Espaces et Sociétés, 3, 158, 119-131.

Aragau, C., 2013, « L’agriculture et le projet urbain : exemples d’aménagements fonciers en plaine de Versailles », in Poulot, M. (coord.), Agriculteurs pour la ville, agriculteurs dans la ville : acteurs, pratiques et enjeux, BAGF, n° 3, 377-395.

Banos V. et Candau J., 2014, « Situations de sociabilités organisées », in Banos V., Candau J. (dir.) , Sociabilités rurales à l’épreuve de la diversité sociale. Enquêtes en Dordogne, Versailles, Editions Quæ, « Nature et société », 29-54. En ligne

Banos V. et Sabatier B., 2010, « les espaces périurbains non bâtis en France : entre publicisation urbaine et privatisation rurale », Articulo-Journal of Urban research, 3, En ligne

Banzo M., 2009, L’espace ouvert pour une nouvelle urbanité, HDR Université de Bordeaux Montaigne, vol. 3, 205 p., En ligne

Baysse Lainé A., 2018, Terres nourricières ? La gestion de l’accès au foncier agricole en France face aux demandes de relocalisation alimentaire. Enquêtes dans l’Amiénois, le Lyonnais et le Sud-Est de l’Aveyron, Thèse de doctorat en géographie, Université Lyon 2, 508 p.

Berger M., 2004, Les périurbains de Paris : de la ville dense à la métropole éclatée ?, Ed. CNRS, Espaces et Milieux, 317 p.

Berger, M., Poulot M., Aragau C. et  Rougé L. , 2016, « L’habitabilité périurbaine dans les pratiques habitantes : de l’habitabilité restreinte au pavillon à l’habitabilité élargie », Géoregards, n°9, 61-75.

Béringuier, P., 2015 « Les paysages des franges urbaines, transitions ou parois de verre ? » in Luginbühl, Y. (dir.), Biodiversité, Paysage et Cadre de vie, Paris, Victoires Éditions, 2015, 71-89.

Blanc N. et Glatron S., 2005, « Du paysage urbain dans les politiques nationales d’urbanisme et d’environnement », L’Espace géographique, 1, 65-80.

Chalas Y., 2005, « La ville nature contemporaine. La demande habitante à l’Isle d’Abeau », Annales de la recherche urbaine, 98, 43-49.

Clawson M., 1969, « Open space as a new urban ressource in the quality of urbain environment » in Perloff H.S., The quality of urban environment, Baltimore, John Hopkins Press.

Clément C. et Soulard C., 2016, « La publicisation des espaces agricoles périurbains dans le Lunellois, Languedoc. Un cadre d’analyse en géographie », Annales de Géographie, 712, 590-614.

Clément G., 2004, Manifeste du tiers paysage, G. Clément, 25 p.

Darly S., 2014, « des moutons dans la ville : quelles externalités environnementales des pratiques d’élevage ovin en milieu urbain », Pour, 224, 285-290.

Delfosse C., Dumont B. et Hostiou N., 2018 « Des services contrastés rendus par l’élevage dans les espaces urbains et périurbains européens », INRA Productions animales, Vol. 30, n°4, 395-406, En ligne.

Den Hartigh C., 2013, « Jardins collectifs urbains : des leviers vers la transition ? », Mouvements, 3-75, 13-20.

Donadieu P., 2002, La société paysagiste, Le Méjean, Actes Sud, 160 p.

Dorier Apprill E. et Gervais-Lambony P. (dir.), 2007, Vies citadines, Belin Mappemonde, 267 p.

Erwein M., Salomon-Cavin J., 2014, « Au-delà de l’agrarisation de la ville, l’agriculture peut-elle être un outil d’aménagement urbain ? », Géocarrefour, vol. 89, n° 1-2-3, 31-40, En ligne.

Faliès C., 2012,  Espaces ouverts et métropolisation entre Santiago du Chili et Valparaiso : produire, vivre et aménager les périphéries , Thèse de doctorat en géographie, Université de Paris 1-Sorbonne,  522 p.

Falque M., 1973a, « Vers un ensemble pluri-urbain : espaces ouverts et urbanisation », Urbanisme, 1973-137.

Falque M., 1973b, « Le végétal, l’espace ouvert et la ville », Revue Aménagement et nature, 32.

Fleury A., 2018, « Les périurbains et leurs espaces publics : enquête sur les franges nord de la métropole parisienne », Cybergeo : European Journal of Geography, En ligne.

Fleury A. et Donadieu P., 2003, « La construction contemporaine de la ville-campagne en Europe », Revue de géographie alpine, 91-4, 19-29.

Fonticelli C., 2018, Construire des immeubles au royaume des maisons. La densification des bourgs périurbains franciliens : modalités, intérêts, limites, thèse de doctorat en sciences du paysage, IAVFF, 520 p.

Garçon L. et Navarro A., 2012, « La société des territorialistes ou la géographie italienne en mouvement », Tracés, En ligne.

Giacché J., 2014, « L’expériences des parcs agricoles en Italie et en Espagne : vers un outil de projet et de gouvernance de l’agriculture en zone périurbaine », Géocarrefour, En ligne.

Giroud M., 2011, « Usages des espaces rénovés et continuités populaires en centre ancien », Espaces et sociétés, 144-145, 37-54.

Guiomar, X., 2010, « Éveiller le regard du marcheur sur l’agriculture : les sentiers d’interprétation agricole en Île-de-France », Pour, n° 205-206, 10p.

Hasnaoui Amri, N., 2018, La participation des agriculteurs à une politique alimentaire territoriale. Le cas de Montpellier Méditerranée Métropole, Thèse en géographie et aménagement de l’espace, Université Paul Valéry, Montpellier et Montpellier SupAgro, 482 p.

Huang, J., Tichit M., Poulot M., Darly S., Li S., Petit C. et Aubry C., 2015, « Comparative review of multifunctionality and ecosystem services in sustainable agriculture », Journal of environmental management, 149, 138-147.

IAU-DRIAAF, 2009,  Réaliser une analyse fonctionnelle des espaces ouverts, IAU, 96 p.

Indovina Francesco (dir.), 1990, La Città diffusa, DAEST-IUAV, Venise, 454 p.

Janin C. et Fleury P., 2005, « L’agriculture et les espaces ruraux : facteurs identitaires de la ville-territoire », Revue de Géographie alpine, 4, 4-6.

Kanellopoulou D., 2018, « Redécouvrir Athènes. Balades urbaines et récits quotidiens du centre-ville », Bulletin de l’association de géographes français, En ligne.

Lagane J., 2011. « Du Teiki à l’AMAP, un modèle acculturé », Développement durable et territoires,  En ligne.

Le Caro Y., 2007, Les loisirs en espace agricole. L’expérience d’un espace partagé, Rennes, PUR, 432 p.

Le Caro Y, Jousseaume V., Poulot M. et Rougé N., 2016, « Agricultures et villes : des articulations renouvelées », Annales de Géographie, n°712, 5-15.

Léger J-M. et Mariolle B., 2019, Densifier / dédensifier, penser les campagnes urbaines. Marseille, éditions Parenthèses, 320 p.

Liefooghe C., 2018, « Les tiers lieux à l’ère du numérique : diffusion spatiale d’une utopie socio-économique », Géographie, Économie, Société, 2018-1, 33-6.

Long N. et Tonini B., 2012, « Les espaces verts urbains : étude exploratoire des pratiques et du ressenti des usagers », Vertigo, 12-2.

Mc. Harg I., 1969, Design with nature, rééd. 1995, Turtleback books, 197 p. Traduction française 1980, Cahiers de l’IAURIF.

Magnaghi A., 2003, Le projet local, Liège, Mardaga, 123 p.

Mamou K., 2013,  « Photographie et film dans les projets urbains participatifs : mont(r)er l’image d’un habitant actif ? », Participations, vol. 7, 3, 151-172.

Mathieu N., 2014, « Mode d’habiter : un concept à l’essai pour penser les interactions hommes-milieux » in Robert Chenorkian (dir.), Les interactions hommes-milieux, Versailles, France, Editions Quæ, 97-130.

Melé P., 2009, « Identifier un régime de territorialité réflexive », in Vanier M. (dir.), Territoires, territorialité, territorialisation, controverses et perspectives, Rennes, PUR.

Mestdagh L. 2015, Des jardinier.e.s partagé.e.s entre discours et pratiques : du lien social à l’entre-soi, Thèse de doctorat en sociologie, Sorbonne Paris Cité, 456 p.

Michel C. et Mermet L., 2002, « L’accès du public aux espaces naturels, agricoles et forestiers privés : enjeux de société et question de recherche », in Mermet L., Moquay P., (dir.), Accès du public aux espaces naturels. Outils d’analyse et méthodes de gestion, Paris, Ed. Hermès, 19-32.

Morel K., 2016, Viabilité des microfermes maraîchères biologiques. Une étude inductive combinant méthodes qualitatives et modélisation, Thèse de doctorat en sciences agronomiques, Université de Paris Saclay, 97 p.

Morisset L., 1967, La mémoire du paysage, Presses universitaires de Laval, 300 p.

Mumford L., 1961, La Cité à travers l’Histoire (The city in History, rééd. revue par l’auteur 1989; première trad. française Seuil, coll. Esprit, 1964), Marseille, éd. Agone, 2011, 944 p.

Pailloux A.-L., 2015, « Zone d’aménagement différé contre « zone à défendre ». Analyse d’une lutte pour l’autonomie dans/de l’espace rural », Justice spatiale – Spatial justice, 7, En ligne.

Perrin C., Toussaint-Soulard C., Baysse Lainé A. et Hasnaoui Amri N., 2018, « L’essor d’initiatives agricoles et alimentaires dans les villes françaises : mouvement marginal ou transition en cours ? », in Baron-Yelles N., Romero J. (dir.), Cultura territorial e innovación social : Hacia un nuevo modelo metropolitano en Europa del Sur ?, 391-408.

Perrin C., Nougarèdes B., Sini L., Branduini P. et Salvati L., 2017, « Governance changes in peri-urban farmland protection following decentralisation: A comparison between Montpellier (France) and Rome (Italy) », Land use Policy, Elsevier, En ligne.

Pluvinage J., Guiomar X., Rosenwald V. et Boinon J.-P., 2013, « Le foncier agricole, tensions et bien commun », Pour, 2013/4, en ligne.

Poulot M., 2013, « Du vert dans le périurbain. Les espaces ouverts, une hybridation de l’espace public »,  EspacesTemps, En ligne.

Poulot M., 2014, « L’invention de l’agri-urbain en Île-de-France. Quand la ville se repense aussi autour de l’agriculture », Géocarrefour, 89/1-2, 11-19, En ligne.

Poulot M., 2018, « Les espaces ruraux et périurbains en France : populations, activités, mobilités. Cadrage scientifique », Géoconfluences, En ligne.

Poulot M., Aragau C., Rougé L., Berger, M.  Mettetal L. et Didier-Fèvre C., 2014,  Les territoires périurbains : de l’hybridation à l’intensité, rapport PUCA, LAVUE-PRODIG-ESO-IAU, 320 p, En ligne.

Poulot M., Aragau C. et Rougé L., 2016, « les espaces ouverts dans l’ouest francilien : entre appropriations habitantes et constructions territoriales », Géographie Economie Société, 1-18, 89-112.

Scaillerez A. et Tremblay D.G., 2017, « Coworking, fab labs et living labs : état des connaissances sur les tiers lieux », Territoires en mouvement, 34, En ligne.

Soulard C.-T., 2014, « Les agriculture nomades, une caractéristique du périurbain », Pour, n°224, 151-158.

Raffin F., 2007, friches industrielles. Un monde culturel européen en mutation, L’Harmattan, coll. Logiques sociales, 308 p.

Rankovic A., Pacteau C. et Abbadie L., 2012, « Services écosystémiques et adaptation urbaine interscalaire au changement climatique : un essai d’articulation », Vertigo, En ligne.

Secchi B., 2002, « L’émergence de la ville diffuse », Diagonal, n° 156, 10-12

Sencébé Y., 2014, « Appartenir à un lieu qui ne vous appartient pas. L’expérience du quartier libre des Lentillères à Dijon », inGérard Peylet et Hélène Saule-Sorbé (dir.), L’Appartenir en question. Ce territoire que j’ai choisi, Pessac, Publications de la MSHA (Maison des Sciences de l’Homme d’Aquitaine), 27-40.

Sieverts T., 2004, Entre ville : une lecture de la Zwischenstadt, Marseille, Ed. Parenthèses, coll. Eupalinos, 190 p.

Sonnino, R., 2009, « Feeding the City: Towards a New Research and Planning Agenda »,  International Planning Studies, Vol. 14, n°4, 425–435.

Steeel J., 2016, Ville affamée, traduction française, Ed rue de l’Echiquier, 448 p.

Strong A-L., 1968, Open space for urban America, Washington, publication du département of Housing and Urban developement, n.p.

Thébert M., Coralli M., Nessi H. et Sajous P., 2016, « Un territoire d’attaches : liens aux lieux et liens aux autres dans le périurbain francilien », Géographie Économie Société, 18.

Toublanc, T. et Bonin, S., 2012, « Planifier les trames vertes dans les aires urbaines : une alliance à trouver entre paysagisme et écologie », Développement durable et territoires, vol. 3, n° 2, En ligne.

Toublanc M.., Bonin, S. et Dérioz, P. (dir), dossier thématique « Paysages des franges urbaines en projet », Projets de Paysage, janvier 2016, n° 13, En ligne.

Toublanc M. et Poulot M. 2018, « Les territoires agri-urbains en Ile-de-France : entre paysage ordinaire, paysage agricole et paysage alimentaire ? », Projets de Paysage, En ligne.

Vanier M., 2000, « Qu’est-ce que le tiers-espace ? », Revue de Géographie Alpine, 1, 104-113.

Vanier M., 2005, « La relation ville-campagne re-interogée par la périurbanisation », Cahiers Français, 328, 13-21.

Veschambre V., 2004. « Appropriation et marquage symbolique de l’espace : quelques éléments de réflexion ». Travaux et Documents ESO, 21, 73-77.

Vidal R. et Fleury A., 2007, « De la ville nature à la ville agriculture : le projet agriurbain », Anthos n° 3, 59-60.

William E.A (dir.), 1970, Open space : the choices before California. The urban metropolitan open space study, Diablo Press, 187 p.

Pour citer cet article : Poulot M., 2020, « Les espaces ouverts dans la fabrique métropolitaine : quels questionnements ? », Urbanités, Villes méditerranéennes : regards sur les espaces ouverts métropolitains, janvier 2020, en ligne.

  1. Je me concentrerai sur ces deux grandes « écoles ». Le terme est toutefois employé aussi en Italie ou en Espagne, en particulier par les architectes et les Territorialistes. Ces derniers revendiquent la notion d’espaces ouverts considérés non seulement pour leurs qualités d’habitat faunistique ou floristique, mais également pour leur contribution à la qualité de vie, en tant qu’espaces récréatifs et à valeur culturelle significative. Le propos se veut systémique et l’objectif est de penser une ville en interaction avec la campagne environnante (Magnaghi, 2003 ; Garçon et Navarro, 2012). []
  2. Le terme agriurbanisme est utilisé en France quand on parle plutôt de Foodurbanism dans les pays anglo-saxons. La différence tient aux traditions disciplinaires et à la constitution plus tardive en France d’un champ autour de l’alimentation comme objet systémique. []
  3. Traduction de l’auteure : « as a new urban ressource in the quality of urban environment ». []
  4. La Région francilienne a bénéficié d’un processus original de décentralisation puisque dès 1976 elle préfigure les contours des régions de 1982, en obtenant notamment le droit de définir sa politique des espaces verts. L’Agence des Espaces Verts peut user du droit de préemption pour éviter l’urbanisation d’abord des forêts puis progressivement des terres agricoles. []
  5. Les services écosystémiques représentent les bénéfices offerts aux sociétés humaines par les écosystèmes. L’Évaluation des écosystèmes pour le millénaire distingue quatre catégories de services : les services d’approvisionnement, les services de régulation, les services de soutien, et les services culturels. []
  6. « Le droit de l’environnement n’accorde qu’une faible place à la ville comme paysage ; cette ville serait plutôt un anti-paysage. (…) Le registre reste celui de la protection de territoires essentiellement ruraux qualifiés parfois d’environnement » (Blanc et Glatron, 2005 : 68 et 73). Aucun texte ne concerne en France explicitement le paysage urbain avant la loi Paysage de 1993 et surtout la loi SRU de 2000. []
  7. En France, la constitution des communautés d’agglomération et plus encore des métropoles prend acte de ces nouvelles formes urbaines. []
  8. Et ce au sud comme au nord comme le montre la thèse de Cécile Faliès sur « Espaces ouverts et métropolisation entre Santiago du Chili et Valparaiso : produire, vivre et aménager les périphéries », Thèse Université de Paris 1-Sorbonne, 2013, 522 p. []
  9. PUCA : Plan Urbanisme Construction Architecture, Cf. notamment l’appel « du périurbain à l’urbain » (2011-2014) et les différents rapports de recherche, http://www.urbanisme-puca.gouv.fr/du-periurbain-a-l-urbain-2011-2013-a479.html []
  10. L’étude a été réalisée dans l’Ouest francilien. Quatre secteurs délimités selon un transect est-ouest –du front urbain aux franges de l’Eure- ont donné lieu à des enquêtes semi-directives auprès des ménages. Quelque 80 habitants ont été interrogés dans le cadre d’entretiens semi-directifs – vingt sur chaque terrain selon la méthode boule de neige, et 20 élus ou acteurs locaux. L’enquête espaces ouverts, réalisée en face à face et couplée à une enquête mobilités, comportait cinq grandes entrées (habitat et cadre de vie, paysage, usages et pratiques des espaces ouverts, connaissance et pratiques des espaces agricoles, environnement et développement durable) ; les entretiens duraient entre trente minutes et deux heures et s’appuyaient éventuellement sur des photos prises par les habitants de leurs lieux préférés. Certains de ces secteurs – trois sur quatre – avaient déjà fait l’objet de deux programmes PUCA précédents (avec des enquêtes se déroulant entre 2000 et 2011) : la dimension diachronique de certaines analyses puise ainsi dans ces matériaux accumulés sur près de vingt années. []
  11. Veschambre qualifie les premières initiatives de marquages-traces et les secondes de marquages-présence.  Les premières tiennent du patrimoine matériel quand les secondes renvoient à l’immatériel. []
  12. Je reprends là les pratiques citadines repérées par E. Dorier-Appril et P. Gervais-Lambony (2007) pour aller vers des pratiques d’urbanité teintées de ruralité telles qu’elles se repèrent aujourd’hui dans la ville élargie. []

Comments are closed.