#8 / Contraints de vivre sous terre à Genève. Les exilés et la société civile face à l’accueil indigne

Cristina Del Biaggio & Raphaël Rey

L’article de Cristina Del Biaggio et Raphaël Rey au format pdf

Le reportage photographique d’Alberto Campi en complément


Sous une école, entre deux édifices publics, à côté d’un parking ou sous un hôpital, des structures souterraines sont disséminées un peu partout en Suisse. Appelées tantôt « abris de la protection civile (abris PC) », tantôt « bunkers », il en existe environ 360 000 dans tout le territoire. Ils sont de différents types et leur structure interne dépend du nombre de personnes qu’ils sont susceptibles d’accueillir. Si certaines de ces structures sont privées et se trouvent dans des immeubles ou maisons individuelles, une grande partie est publique et gérée par les communes, tenues de les équiper et de les entretenir.

À Genève, entre 400 et 500 personnes vivent aujourd’hui dans ces structures, soit 12 % à 16 % des exilés1 logés en hébergement collectif2). Ils sont demandeurs d’asile, personnes en procédure de renvoi (déboutés de l’asile ou personnes frappées d’une non-entrée en matière dans le cadre du Règlement Dublin3 ), réfugiés statutaires ou encore titulaires d’une admission provisoire4 . À l’automne 2014, certains d’entre eux, regroupés dans le collectif « Stopbunkers », sont sortis de l’ombre et ont manifesté contre cet accueil considéré comme indigne. Par leurs actions et leur mobilisation, ils sont devenus visibles dans l’espace public et, en créant des coalitions avec d’autres groupes politiques ou citoyens, ils ont réussi à s’imposer comme une nouvelle voix dans la question de l’hébergement à Genève. Dans le même élan, de nombreux collectifs d’habitants se sont emparés de la question et ont constitué, dans les quartiers abritant ces abris, des groupes de soutien aux exilés vivant sous terre.

Après un bref retour historique sur les abris PC et une présentation des conditions de vie des exilés, nous retraçons en miroir la genèse du collectif Stopbunkers et la constitution de l’un des groupes de soutien. Nous abordons la question de la mobilisation citoyenne et de la défense du droit des exilés, en nous concentrant sur deux types d’actions menées pour que ceux-ci puissent loger dans la dignité. Sur la base de ces deux exemples, nous montrons comment se sont construits des rapports différenciés entre exilés et société civile, s’inscrivant soit dans la sphère de l’action politique soit dans celle de l’intervention humanitaire.

Cet article, écrit à quatre mains, est le résultat d’observations et d’analyses conduites par deux chercheurs fortement impliqués dans le milieu associatif. À plusieurs reprises et sous différentes formes, nous avons observé des situations sur le terrain, mais également accompagné des individus et groupes, qu’ils soient des exilés ou des résidents, dans leurs démarches s’inscrivant dans la lutte pour la défense du droit d’asile et pour la dignité. De ce fait, nous avons été à la fois observateurs et participants des différents processus de résistance qui ont vu le jour à Genève et en Suisse romande.

Les données collectées pour cette recherche proviennent ainsi de différentes sources, à la fois écrites et orales : consultation de la documentation officielle, d’articles de presse, de documents audiovisuels ; participation à des rencontres avec les exilés et à des manifestations ; prise de notes lors de réunions et discussions informelles avec les exilés et les groupes de soutien ; suivi d’activités sur les sites Internet et les réseaux sociaux ; ou encore participation à la réalisation de documents audiovisuels en lien avec la thématique.

De la protection des citoyens à la « gestion des indésirables » (Agier, 2008)

 

Vestiges de la guerre froide, les abris de la protection civile font toujours partie d’un dispositif appelé « Système coordonné de protection de la population », mis en place par la Confédération helvétique dans le but de protéger « la population et ses bases d’existence en cas de catastrophe, en situation d’urgence et en cas de conflit armé »5 . La Suisse, pays symbole de la neutralité politique, se dote alors d’un « concept visionnaire unique au monde », selon les mots choisis par l’administration pour présenter l’histoire de la naissance de ce dispositif (Hazan, 1998). Celui-ci comprend « la construction à grande échelle d’abris solides, simples et peu coûteux permett[ant] à la population de survivre sous terre en cas de guerre nucléaire. Jusqu’à la fin de la guerre froide, la construction d’abris et la préparation (planification et organisation) à un séjour prolongé dans les abris étaient les thèmes centraux de la protection civile »6 .

Après la chute du mur de Berlin, ces structures sont toujours comprises dans le dispositif de protection de la population, en cas de catastrophes naturelles principalement. Mais elles sont également utilisées par les communes à d’autres fins : ces dernières sont notamment autorisées à les louer à l’armée, à des associations ou à d’autres institutions. C’est dans ce cadre que les cantons, qui gèrent l’hébergement des demandeurs d’asile et des réfugiés, ont conclu des accords avec les communes, afin d’augmenter leur capacité d’accueil des exilés. Pour information, alors que les autorités fédérales répartissent les demandeurs d’asile dans les cantons, selon une clé de répartition établie sur la base du nombre d’habitants (art. 21 de l’Ordonnance 1 sur l’asile relative à la procédure7) ), les cantons ont la prérogative sur les modalités d’hébergement. À Genève, c’est une institution publique, l’Hospice Général, qui en est chargé.

Utilisés jusque-là dans des situations d’urgence et pour de courtes périodes, c’est en 2004 que l’utilisation des abris PC se généralise. Cette année ne correspond pas à un moment de forte augmentation des flux, mais à un changement important de la politique d’asile (Del Biaggio & Malka, 2015). En effet, c’est à ce moment-là que, d’une part, les autorités fédérales contraignent les cantons à supprimer leurs réserves de lit en réduisant les forfaits cantonaux pour l’hébergement et l’encadrement des demandeurs d’asile (Del Biaggio & Malka, 2015). D’autre part, les personnes frappées d’une décision de non-entrée en matière (NEM) sont exclues de l’aide sociale à laquelle ont droit les requérants d’asile. Jusqu’au moment de l’exécution de leur renvoi, ils ne peuvent plus que prétendre à l’aide d’urgence, une aide prévue pour tous les individus présents sur le territoire suisse, selon l’article 12 de la Constitution fédérale (Cst). Dans de nombreux cantons, les bunkers deviennent ainsi la clé de voûte du dispositif de l’aide d’urgence8 , qui, dans le domaine du logement, impose aux cantons de placer les déboutés et personnes frappées d’une décision NEM dans des lieux « les plus spartiates possible » (Sanchez-Mazas, 2011 : 78), afin de les inciter à partir de manière volontaire (Sanchez-Mazas, 2011 : 16). Le logement devient ainsi un élément-clé dans le processus d’invisibilisation des exilés (Sanchez-Mazas, 2011) et constitue un nouveau pas dans l’évolution plus générale d’une politique d’asile toujours plus restrictive et dissuasive (Bolzman, 1994 ; Maillard & Tafelmacher, 1999 ; Sanchez-Mazas, 2011 ; Piguet, 2013).

Ces dernières années, la « mise en bunkers », réservée au début à une sous-catégorie d’exilés – les déboutés de l’asile et les personnes frappées par une décision NEM – s’est peu à peu étendue à d’autres populations, dont les demandeurs d’asile en attente d’une décision. L’élargissement de la pratique ne s’est pas seulement fait en termes de généralisation du traitement des exilés, mais également en termes de temporalité. Alors qu’en 1999, au pic de la crise au Kosovo, la durée d’hébergement sous terre n’avait duré que quelques mois (Brina, 2015), aujourd’hui les exilés peuvent être contraints à vivre sous terre parfois pendant plus d’une année. Bien que les justifications usuelles de leur utilisation par les autorités soient d’ordre pratique – disponibilité de bâtiments libres et augmentation des demandes d’asile – et soient accompagnées d’une rhétorique de l’urgence (Del Biaggio & Malka 2015 ; Del Biaggio, à paraître), l’urgence s’inscrit dans la durée (Stünzi, 2016) et le recours aux abris PC se prolonge. Cette pérennisation se situe , car la Loi sur les constructions et les installations diverses du Canton de Genève dit clairement qu’il est « interdit d’utiliser, pour l’habitation, des locaux dont le plancher est situé au-dessous du niveau général du sol adjacent » (art. 127).

Sous les atours d’arguments pragmatiques et gestionnaires, un processus de mise à l’écart des exilés émerge. En l’espace d’un demi-siècle, si la structure et la matérialité des abris de la protection civile n’ont pas beaucoup changé, leur fonction a considérablement évolué. Conçus comme espace de protection pour la population suisse, face aux dangers extérieurs, ils sont aujourd’hui utilisés pour y confiner, surveiller et gouverner une partie de la population vue comme indésirable, ou dont le statut est encore flou et temporaire. Les bunkers sont ainsi devenus l’une des réponses à ce qui est vu comme un problème d’ordre public : justifiés par l’urgence, leur utilisation est rendue acceptable, parce que mise en place pour une population qui représente un danger potentiel pour l’État et la polis (Fassin, 2005). Il faut toutefois rappeler que la gestion de ces lieux, tout comme celle de l’asile en Suisse et en Europe, est traversée par de multiples tensions et paradoxes : à l’injonction sécuritaire se superpose une injonction humanitaire, et à la logique de mise aux marges et de dissuasion se combine le droit pour tous de « recevoir les moyens indispensables pour mener une existence conforme à la dignité humaine » (Art. 12 Cst). Au sein des abris PC, les personnes marginalisées sont donc tout autant l’objet des politiques d’exclusion que de l’« intervention humanitaire » (Agier, 2013) s’adressant aux corps souffrants et aux besoins physiques les plus élémentaires.

Exclusion et indignité au coeur de la ville

 

« Vous vivez dans un autre monde. Quand je dis un autre monde, j’entends un monde nouveau, qui a été construit sous terre. Ils sélectionnent une catégorie de personnes pour y vivre. Ils imposent toute une série de règles pour les gouverner. Ce n’est pas juste sous terre. C’est un sous-système, des sous-lois. »

Mohammad Jadallah, membre du collectif Stopbunkers, dans le documentaire BUNKERS (Adet, 2015).

 

À Genève, comme dans d’autres villes de Suisse, la mise à l’écart a ceci de particulier qu’elle se situe au cœur de la ville. Disséminées sur le territoire genevois (en vert sur la carte ci-dessous), les structures d’hébergement souterraines sont presque toutes localisées dans un environnement urbain et dans des quartiers densément peuplés.

Localisation des structures d'hébergement collectif de l'Hospice général, Canton de Genève (Hospice général 2015)

Localisation des structures d’hébergement collectif de l’Hospice général, Canton de Genève (Hospice général 2015)

Les abris PC et leurs habitants n’en restent pourtant pas moins invisibles aux yeux des citoyens. En effet, leur entrée correspond bien souvent à celle d’un parking souterrain et seule la présence d’un symbole (un triangle bleu sur fond orange, l’emblème de la protection civile) sur un mur en béton indique la présence potentielle d’êtres humains. Une présence très souvent ignorée par les habitants, les passants ou les personnes travaillant dans les bâtiments publics qui les surplombent.

La photographie ci-dessous rend compte de la complète invisibilisation des bunkers dans le paysage urbain.

2. Entrée de l’abri PC d’Annevelle (Alberto Campi, 2015)

2. Entrée de l’abri PC d’Annevelle (Alberto Campi, 2015)

La mise à l’écart et l’invisibilisation des personnes sont verticales, comme le commente Mohammad Jadallah, lors d’une conférence organisée à l’Université de Genève, alors qu’il décrit la carte qu’il a dessinée : « Ici : il y a le parking et toutes les personnes qui vivent à Genève savent que les parkings sont souterrains. Après avoir quitté le parking, il y a une porte, qui mène sous le parking. [Vous] devez vous souvenir de cela […] : d’ici à ici (en pointant la première partie du couloir) [c’est] 2 mètres de descente. Donc, quand [vous] tournez à droite ici, cela signifie que [vous descendez] aussi de 2 mètres. Vous êtes donc 4 mètres, non pas sous terre, mais sous le parking, qui est déjà une structure souterraine. […] Cela signifie que lorsque [vous] arrivez [dans les dortoirs, vous êtes] au moins 7 mètres sous terre. »

3. Carte de la structure interne de l’abri PC de Châtelaine dessinée par Mohammad Jadallah lors d’une conférence tenue à l’Université de Genève avec Cristina Del Biaggio, 19.11.2015.

3. Carte de la structure interne de l’abri PC de Châtelaine dessinée par Mohammad Jadallah lors d’une conférence tenue à l’Université de Genève avec Cristina Del Biaggio, 19.11.2015.

Cette vie sous terre a d’importantes conséquences sur les corps et la santé. Manque de sommeil, bruit constant, hygiène lamentable des douches et des toilettes qui sont en nombre insuffisant, lumières allumées toute la nuit, les exilés font état de conditions de vie déplorables. Beaucoup se plaignent de problèmes oculaires et de maladies de peau. À cela s’ajoute la promiscuité au sein des abris qui les expose sans cesse aux maladies et aux contagions, à la gale notamment. La nourriture est aussi un point central des discussions : ils n’ont pas la possibilité de cuisiner et reçoivent tous les jours des barquettes de nourriture, parfois préparées depuis plusieurs jours et contenant principalement des féculents, sans aucun légume frais. « Ce n’est pas une vie humaine, ils nous traitent comme des animaux. On arrive à la PC et on n’a plus l’impression d’être des êtres humains. Notre corps réagit différemment, là-dessous, on est tout le temps malade » (Journal de terrain (JDT), 03.12.2014) relève l’un d’entre eux.

Les exilés font aussi état du climat d’insécurité entraîné par le confinement et la promiscuité. Ils racontent ainsi les nombreuses tensions, cris, bagarres et problèmes interpersonnels, qui sont monnaie courante au sein des foyers. « La richesse qui devrait découler de la rencontre avec d’autres personnes […] est rendue impossible par les problèmes de survie qui préoccupent chacun. Ceci est cause de conflits qui ne font que renforcer les tensions » (Stopbunkers, 2015).

Comme le rappelle Bassand (2007), dans le paysage urbain, l’exclusion se construit autant en termes de lieux que de dynamiques d’accessibilités spatiale et temporelle. La mise à l’écart spatiale se traduit ainsi par une marginalisation sociale (Bernardot, 2008 : 57 ; Bolzman, 1994 : 8–10), comme l’exprime un exilé interviewé à la radio : « Nous sommes isolés de la société, parce que personne ne nous voit. Personne n’imagine qu’il y a des gens qui y vivent. C’est juste un parking à voitures. C’est comme si on était enfermé dans une bouteille » (Marti, 2015 : min. 5’05). La vie sous terre et les conditions de vie qui leur sont imposées rendent ainsi l’accès à la ville difficile. Les exilés racontent, en effet, qu’ils ne peuvent pas recevoir de visites, parce que le règlement des abris l’interdit. Ils ne peuvent même pas se connecter avec le monde extérieur, car dans les bunkers il n’y a ni réseau de téléphonie mobile ni Internet. Fragilisés et épuisés, ils expriment aussi leur incapacité à suivre les programmes d’intégration et les cours de français qui leur sont proposés. Ce problème est mis en avant dans le manifeste de Stopbunkers, rédigé en janvier 2015 : « Nous ne voulons pas […] continuer à être enterrés, cachés, tenus à l’écart de notre société d’accueil » (Stopbunkers, 2015). À ce sentiment d’invisibilité vis-à-vis du monde extérieur s’oppose la visibilisation permanente au sein des bunkers. Nombreuses interdictions, personnel de sécurité, contrôles à l’entrée et caméras de surveillance leur donnent le sentiment d’être sans cesse surveillés, contrôlés dans leurs moindres faits et gestes.

La précarité du statut des exilés vient renforcer les sentiments de conditions dégradées et d’exclusion. Nombreux sont ceux qui expriment leur peur des renvois dans le cadre du Règlement de Dublin : « Les PC, c’est très dur, mais le plus dur, c’est qu’on ne sait pas quand on va être renvoyé. C’est en Suisse qu’on a fait notre demande, on a fait attention à ne pas donner nos empreintes et pourtant on nous renvoie. Mais on ne sait pas où ni quand. On nous lie à la mort, encore… J’ai déjà vu beaucoup de monde mourir et ici, ce n’est pas fini : toutes les semaines, on voit des gens qui partent, et on se demande quand ce sera notre tour. Pourquoi nous traitent-ils ainsi ? On a mis en danger nos vies. Ça, c’est pas l’humanité qu’on nous a promise. […] La souffrance continue. On a échappé à une première mort et on se prépare pour la deuxième. » (JDT, 11.11.2014)

4. Panneau posé à l’entrée d’un bunker dans le canton de Vaud. Ces affiches montrent bien ce qui est dénoncé par les exilés : la surveillance constante et une vie marquée par les interdits (Alberto Campi / We Report, 2015)

4. Panneau posé à l’entrée d’un bunker dans le canton de Vaud. Ces affiches montrent bien ce qui est dénoncé par les exilés : la surveillance constante et une vie marquée par les interdits (Alberto Campi / We Report, 2015)

Au vu de ces éléments, il pourrait s’avérer tentant d’appliquer ici la grille de lecture des camps (Rahola, 2007 ; Agier, 2008), conçus comme des espaces « extraterritoriaux » dans lesquels l’existence politique est niée et la vie est réduite à la seule existence biologique (Agamben, 1998). Mais cette lecture doit être nuancée, parce que loin de la suspension généralisée des normes évoquée très souvent dans la littérature sur les camps (Agamben, 2003 ; Minca, 2005), on assiste, dans les bunkers, à une « surnormalisation » des lieux et des vies. Ces normes sont continuellement appliquées, questionnées, négociées et contestées par les différents acteurs impliqués dans leur mise en œuvre ou qui y sont confrontés, ce qui fait des bunkers des espaces politiques à part entière (Rygiel, 2012 : 812).

Agir avec les exilés : genèse d’un collectif politisé face à l’accueil indigne

 

À la fin de l’automne 2014, quelques demandeurs d’asile hébergés dans un bunker de la ville de Genève prennent contact avec le milieu associatif de défense du droit d’asile. Une première rencontre est organisée, réunissant quatre exilés et quelques représentants du tissu associatif. Certains habitent dans des abris PC depuis plus d’une année déjà et ils exposent leur situation et leurs difficultés quotidiennes. Plusieurs réunions de ce type auront lieu au cours des mois suivants et le nombre d’exilés y participant atteint vite quelque 70 personnes. Peu à peu, celles-ci s’organisent : l’un des acteurs associatifs modère les séances et des traductions sont faites entre le tigrinya, l’arabe, l’anglais et le français. Les participants prennent librement la parole pour témoigner de leur quotidien, de leur voyage ou de la situation dans leur pays d’origine. La majorité est originaire d’Érythrée et tous sont de jeunes hommes venus seuls en Suisse, car les femmes et les enfants sont logés uniquement en surface.

Au fil de ces premières discussions, c’est donc à la mise en commun des problèmes quotidiens à laquelle nous assistons. À travers ces réunions, c’est un collectif politique qui se constitue peu à peu. Un collectif qui se dessine dans la mise en commun des conditions de vie imposées et des difficultés quotidiennes. Se forge ainsi à la fois la reconnaissance d’une marginalisation et d’une souffrance partagée qui transcende les statuts, mais aussi la revendication d’un meilleur traitement et du respect de la dignité de la part de l’État et plus particulièrement de l’Hospice général. Cette mise en commun ne va pas sans difficulté : dans les discussions, les différenciations en termes de statuts ou de nationalités sont fréquentes, des tensions apparaissent et les distinctions et hiérarchies du droit doivent sans cesse être dépassées.

Très vite, les exilés expriment leur volonté d’agir : dès le mois de décembre 2014 en sont discutées les modalités. « Nous sommes prêts à dénoncer ce qui se passe, à agir, mais on vous demande de prendre l’initiative pour nous. On n’a jamais eu le droit de nous exprimer, on ne sait pas comment faire ! » (JDT, 03.12.2014) déclare l’un des participants. Les acteurs associatifs prennent l’initiative de préciser les problèmes, cadrer les revendications et proposer des actions possibles. L’un d’entre eux précise qu’il est possible d’agir uniquement sur une partie des problèmes exposés lors des réunions : « Dublin, c’est l’Europe, c’est une grosse machine et un jeu politique entre les États. Par contre, le logement dépend d’une autorité à Genève, et on peut avoir un certain poids » (JDT, 03.12.2015).

Aidés par les acteurs associatifs, les exilés décident d’écrire un manifeste intitulé « Vous ne nous connaissez pas ? C’est normal ! Nous vivons sous terre ». Il reprend l’exposé de leurs problèmes et est destiné à les rendre visibles auprès des citoyens genevois : « Dans nos pays, il n’y a que les morts que l’on met sous terre. Nous sommes des êtres humains. Nous avons besoin d’air pur, de soleil, comme tout le monde. De dignité aussi. Nous ne pouvons et ne voulons continuer à vivre dans ces conditions. Nous ne voulons pas non plus continuer à être enterrés, cachés, tenus à l’écart de notre société d’accueil. STOP BUNKERS » (Stopbunkers, 2015). L’idée d’écrire une lettre à l’Hospice général est également lancée.

Dès janvier 2015, de nouvelles personnes se joignent aux réunions : quelques acteurs politiques des partis de gauche, ainsi qu’un collectif militant tout nouvellement créé, regroupant des personnes d’horizons divers, mais qui sont en majorité de jeunes actifs dans des associations d’étudiants, habitant dans des maisons occupées, ou participant à des actions militantes. Des groupes de travail sont créés et une réunion hebdomadaire est prévue pour la mise en commun et la coordination entre exilés, acteurs associatifs et collectif militant. En vue de la rédaction d’une première lettre aux autorités cantonales, le groupe d’exilés se constitue publiquement sous le nom de Stopbunkers. Le 26 janvier, un cortège d’environ 200 personnes dépose à l’Hospice général une lettre ouverte qui interpelle les autorités et exige l’amélioration de leurs conditions de vie : « Combien de temps pensez-vous que vous tiendriez dans ces conditions ? Avez-vous déjà pénétré dans ces endroits ? Pouvez-vous nous préciser comment l’Hospice s’engage pour la dignité quand il nous fait vivre ainsi ? » (Stopbunkers, 2015)

Au mois de février, une deuxième lettre est adressée aux autorités constatant l’absence de réactions de ces dernières et demandant la fermeture de tous les abris de la protection civile. Par ailleurs, Stopbunkers participe à différents événements publics – festivals de films, conférences et débats – et des repas sont organisés aux abords des différents foyers et à l’Université. Une motion est également déposée par un groupe de députés au Grand Conseil, le parlement cantonal, « pour mettre fin au recours aux abris de protection civile pour héberger des demandeurs d’asile »9 . Appuyée par tous les acteurs du mouvement, celle-ci demande au Conseil d’État, l’exécutif du canton, de trouver des solutions provisoires pour reloger les exilés, de limiter le recours aux abris à trois mois et d’élaborer et planifier une politique de logement digne sur le long terme. La motion n’aboutira pas, mais elle est votée « urgente » par le Grand Conseil, ce qui est vu comme une petite victoire. Le fait que plusieurs exilés viennent témoigner devant le parlement de leurs conditions de vie est aussi un élément qui est vu comme un succès du collectif.

Au sortir de l’hiver, l’objectif de visibilisation est rempli. Plusieurs journaux, y compris internationaux, se sont emparés de la question. Dans ce processus de médiatisation de la problématique, les autorités interpellées prennent également une position publique – déplorant le type de logement, mais affirmant y être contraintes par la forte hausse des demandeurs d’asile – et une confrontation médiatique entre le mouvement et les autorités voit le jour. D’autres événements – un incendie en novembre 2014 dans l’un des foyers du canton, faisant un mort et plusieurs blessés graves et la menace du renvoi de l’un des rescapés – font converger les luttes et augmentent l’ampleur de la mobilisation citoyenne, qui culmine avec l’organisation d’une grande manifestation dans les rues de Genève, au milieu du mois d’avril. Près d’un millier de personnes défile dans les rues de Genève pour exiger la fermeture des bunkers, la fermeture des centres de détention administrative et l’arrêt des renvois. Les mois suivants, les mobilisations se poursuivront et, à l’heure où nous écrivons ces lignes, exilés et collectifs militants restent des acteurs importants dans la question de l’hébergement à Genève.

La lutte est ainsi menée sur plusieurs fronts et joue sur plusieurs temporalités, afin de répondre aux différentes difficultés soulevées par les exilés. Il s’agit d’une part de montrer leur présence à la population résidente pour répondre à leur invisibilisation et agir sur l’insensibilité publique qu’elle entraîne (Gill, 2016). Les exilés affirment ainsi qu’ils sont des résidents de la ville comme les autres, des voisins et des usagers du tissu urbain. C’est d’ailleurs en exposant leurs corps dans l’espace public et en s’appropriant l’espace urbain le temps des manifestations que cette visibilisation se fait (v. Cabot, 2014). D’autre part, il s’agit d’interpeller directement les pouvoirs publics pour négocier une amélioration concrète des conditions de vie. Dès le début du mouvement, les revendications ont ainsi pris la forme d’un engagement politique, de ce que Rygiel (2012) appelle un « acte de citoyenneté ». Les exilés affirment une appartenance, en tant que sujets politiques de la gouvernance locale de l’asile.

Le processus de politisation s’est donc fait par la médiatisation et par la volonté d’agir sur les structures productrices de ces souffrances quotidiennes. Différents acteurs de la société civile se sont très vite joints à la mobilisation et des convergences de lutte ont pu être créées. Et si les alliances ainsi formées n’ont pas été sans certaines difficultés – tendances à la réappropriation du mouvement, formes de paternalisme et tensions entre les différents acteurs – elles ont néanmoins été essentielles dans le processus de politisation, parce qu’elles ont permis de dessiner ses possibilités, de cadrer les revendications et d’apporter un soutien technique nécessaire au mouvement des exilés.

Agir pour les exilés : action humanitaire et solidaire contre l’accueil indigne

 

« Nous recherchons pour 90 hommes migrants arrivés à Versoix, des chaussures, chaussures de foot, habits, des jeux et livres à leur donner… Toute offre de don sera bienvenue. »

Annonce du Groupe entraide réfugiés Versoix, septembre 2015

 

Le 31 août 2015, un groupe d’habitantes et d’habitants de la commune de Versoix, se situant sur le canton de Genève, décide de créer une page Facebook pour « rassembler des Versoisiennes et Versoisiens qui souhaiteraient aller à la rencontre des réfugiés qui viennent de s’installer dans notre belle commune » (Message posté sur le mur Facebook du Groupe entraide réfugiés de Versoix). Les personnes les plus actives du groupe partagent le fait d’appartenir au même groupe d’âge (adultes autour de la cinquantaine d’années) et de n’avoir jamais été confrontés à la thématique de la migration et de l’asile. Devant le « fait accompli », l’ouverture d’un abri PC sur leur commune, et mus par un élan de solidarité, ils vont à la rencontre des exilés. La « mission numéro 1 » du groupe, c’est ainsi qu’une des membres l’appelle sur Facebook : « Récolter des jeux de cartes, de dames, de domino, des raquettes de ping-pong et balles, des jeux d’échecs et backgammon ». Le groupe s’organise en réalité autour de deux axes principaux : la rencontre avec les exilés (à travers l’organisation de fêtes, repas solidaires et cours de français) et l’organisation d’actions solidaires, dont la récolte d’habits et autres biens matériels (Fig. 4).

Le succès des actions dépasse les attentes, et les habitants se mobilisent pour trouver un lieu de stockage pour les vêtements, qui seront distribués lors d’un « repas d’accueil pour les réfugiés » organisé par le groupe le 4 octobre 2015.

5. Photos de la récolte d’habits publiés sur la page Facebook du groupe de Versoix, 22.09.2016

5. Photos de la récolte d’habits publiés sur la page Facebook du groupe de Versoix, 22.09.2016

6. Un des nombreux messages publiés sur la page Facebook du groupe de Versoix appelant à la rencontre et à la solidarité, 31.08.2016.

6. Un des nombreux messages publiés sur la page Facebook du groupe de Versoix appelant à la rencontre et à la solidarité, 31.08.2016.

Afin de mener à bien de nouvelles activités prévues par le groupe, les membres cherchent rapidement l’appui et le soutien des institutions publiques. De ce fait, et assez naturellement, le groupe se tourne vers l’Hospice général pour essayer de coordonner l’action sur le terrain. Contrairement à leurs attentes, le groupe s’est retrouvé face à un organisme qui, au lieu de les accompagner dans la mise en œuvre des activités, en a longuement retardé, et presque compromis, la réalisation. La situation s’est débloquée grâce au travail de médiation d’une assistante sociale de l’institution. Dès son intervention, le groupe a pu travailler en étroite collaboration avec l’Hospice général. Un des membres du groupe a d’ailleurs, en février 2016, signé un contrat officiel de bénévolat et de fait inscrit sa démarche, et celle du groupe dont il est un des leaders, dans une dynamique institutionnelle.

La mobilisation du Groupe entraide réfugiés de Versoix, qui, à cause de problèmes internes, fondera un nouveau groupe en février 2016, appelé Versoix Accueille, s’inscrit dans le contexte plus général du foisonnement d’actions citoyennes qui ont vu le jour entre la fin de l’été et l’automne 2015. Cette date correspond au moment dans lequel, dans les médias, « l’expression ‘crise des réfugiés’ s’est imposée comme une évidence » (Del Biaggio & Rey, 2016). Le lien est d’ailleurs explicitement établi par un des membres du groupe, quand, le 1er septembre 2015, il écrit sur la page Facebook : « Super initiative ! Quel bonheur de voir autant de motivation au milieu de cette crise migratoire. On peut agir localement ! » Cette prise de conscience de la « capacité d’agir » s’inscrit, pour le groupe, dans le champ de l’humanitaire.

Ainsi, tout au long de l’année 2015 et jusqu’à début 2016, le groupe se concentre sur la double idée de la rencontre et de l’aide avant tout au niveau municipal, parfois international. Très rares sont les interventions, sur la page Facebook et dans les discours, qui, au-delà de l’action humanitaire, revendiquent aussi des actions politiques.

À la fin janvier 2016, le groupe connaît un tournant vers une conscientisation politique. Le Centre social protestant de Genève médiatise le cas d’un père de famille d’origine érythréenne, Amanuel G., menacé d’expulsion en Italie, alors que sa femme enceinte et ses deux enfants sont admis sur le territoire suisse. L’histoire de cette famille émeut une partie de la population. À travers le partage de différents appels, le groupe de Versoix invite leurs concitoyens à signer une pétition demandant que le renvoi ne soit pas exécuté par les autorités cantonales. Cet événement est défini comme « le premier grand choc » par un des membres (entretien du 11.09.2016), il est suivi par un deuxième choc, daté de mai 2016. C’est le cas d’une famille pour laquelle un renvoi Dublin vers l’Allemagne est prononcé. Il s’agit d’une famille avec laquelle le groupe a « tissé de forts liens », selon les mots postés par une membre du collectif sur la page Facebook (25.05.2016). Dans le même message, le manque d’humanité des autorités cantonales est mis en question, mais également « l’application de lois inhumaines » qui causent un « traumatisme supplémentaire ». Le collectif se confronte ainsi à ce que Karine Povlakic a qualifié de « banalisation d’une tragédie » (Povlakic, 2012) ; la tragédie étant incarnée par le Règlement Dublin.

Grâce au contact direct avec des exilés, les membres du groupe découvrent la manière dont le système et les lois agissent sur eux. À travers des renvois prononcés par la Confédération, l’humanité de la démarche du groupe entre en collision avec la machine déshumanisante des renvois. Grâce à la rencontre de destinées individuelles, un processus de conscientisation politique accompagne les actions humanitaires et solidaires. Un groupe qui, comme nous l’a avoué un de ces membres, « par la force des choses est devenu militant » (entretien du 11.09.2016). Certains membres du groupe se rendront, sans pour autant ne jamais en être les principaux promoteurs, aux différentes manifestations organisées par les groupes militants et les associations. Les groupes d’habitants remplissent ainsi les rangs des militants de longue date et s’unissent, sporadiquement, à la lutte politique. Leur action ordinaire reste en revanche fortement ancrée dans le champ humanitaire, dans l’objectif d’améliorer le quotidien des personnes vivant dans la structure souterraine localisée sur leur commune. La remise en cause du système, la lutte pour la fermeture des bunkers, voulue et défendue publiquement et politiquement par le groupe Stopbunkers et leurs soutiens, n’est presque jamais affichée.

Le site Internet de la Ville de Genève rappelle que « de tout temps, Genève a accueilli les étrangers victimes de persécutions ». Comme le montre la publication du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), consacrée aux 500 ans d’histoire de Genève avec « ses réfugiés » (Ville de Genève et Fondation HUNHCR-50, 2001), la ville entretient le mythe d’une longue tradition humanitaire d’accueil des exilés, consacré par la signature, dans cette ville, de la Convention relative au statut des réfugiés (1951), aussi appelée de manière emblématique Convention de Genève.

7. Plaque « Genève, Cité de refuge » (1920) avec, sous l’inscription, Lénine allongé sous une allégorie de la République qui étend sur lui son bras protecteur. (Brigitte Djajasasmita / flickr, 2012)

7. Plaque « Genève, Cité de refuge » (1920) avec, sous l’inscription, Lénine allongé sous une allégorie de la République qui étend sur lui son bras protecteur. (Brigitte Djajasasmita / flickr, 2012)

Pour les nouveaux arrivants d’aujourd’hui, le décalage entre l’image qu’ils pouvaient avoir d’une ville de l’accueil et des droits humains, et les conditions de vie auxquelles ils sont soumis dès leur arrivée est consternant. À partir du constat d’un hiatus entre le mythe humanitaire et les réalités quotidiennes des exilés, différentes composantes de la population résidant à Genève se sont organisées contre l’indignité. Mais ces mobilisations diffèrent considérablement, autant dans les moyens mis en œuvre, les revendications et les buts recherchés, que dans les rapports entre exilés et société civile qui s’y sont installés.

En effet, d’un côté, les associations et collectifs militants qui se sont emparés de la question ont répondu à l’appel des personnes mises en bunkers, qui s’étaient précédemment constituées en groupe. Bien que le processus n’ait pas été exempt de difficultés, de tensions internes, et d’instabilité, ils ont suivi, accompagné et soutenu les exilés dans leur démarche d’exposition des souffrances et dans leur volonté de créer un rapport de force avec les autorités. Ensemble, ils ont formé un mouvement qui a réinscrit l’accueil des exilés, confiné alors dans la sphère de l’humanitaire, dans le champ du politique. De l’autre côté, Versoix Accueille s’est constitué face à la découverte du bunker et par la suite de ses habitants. Dans un élan de compassion et de solidarité, ils se sont inscrits dans une démarche d’allègement des souffrances propre à l’intervention humanitaire, sans remettre en cause la gouvernance de l’asile et même en y collaborant par la suite. Mais, si la distinction entre sphère du politique et sphère de l’humanitaire peut être faite dans le cas de Genève, les frontières sont ténues. Les espaces de ce que Ticktin appelle l’« antipolitique de l’humanitaire » (Ticktin, 2011) donnent toujours lieu à des rencontres et des actions qui le dépassent. En témoigne la découverte des accords de Dublin et la mobilisation des habitants de Versoix qui s’en est suivie et qui a convergé vers les autres mouvements.

CRISTINA DEL BIAGGIO & RAPHAËL REY

Cristina Del Biaggio, géographe, est actuellement collaboratrice à l’Université de Genève. Elle est également chargée du projet « Le Comptoir des médias » pour l’association Vivre Ensemble. Ses travaux portent sur les frontières, et notamment les barrières frontalières, les parcours migratoires, ainsi que sur l’accueil et la procédure d’asile, avec une attention particulière au cas suisse. Les statistiques et la terminologie en matière d’asile, ainsi que leur utilisation par les médias, constituent également son champ d’intérêt.

Raphaël Rey est doctorant aux Universités de Neuchâtel et de Berne. Sa thèse de doctorat a pour objectif de rendre compte des expériences vécues, des contraintes, des pratiques et des représentations des personnes demandeuses d’asile en Suisse, à travers une démarche ethnographique. En s’intéressant plus particulièrement à l’élaboration des récits d’asile et aux expériences quotidiennes de la procédure, sa recherche interroge les relations quotidiennes de ces personnes avec les cadres politique, juridique et administratif en matière d’asile.

Bibliographie

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  1. Nous utilisons ici le terme d’ « exilé » comme terme générique regroupant à la fois les demandeurs d’asile, les réfugiés statutaires, les personnes admises provisoirement, les personnes frappées d’une décision de non-entrée en matière et des personnes déboutées de l’asile. []
  2. Selon les statistiques officielles au 30.09.2016, 425 personnes logeaient en abris PC sur les 3 306 personnes suivies par le dispositif d’asile de l’Hospice Général et logées dans les lieux d’hébergement collectif : http://www.hospicegeneral.ch/prestations/requerants-dasile/Tableau%20de%20l’h%C3%A9bergement%20de%20l’asile%20par%20commune.html (consulté le 18.10.2016 []
  3. Une décision de non-entrée en matière désigne la décision des autorités d’écarter un dossier sans examiner les motifs invoqués par la personne requérant l’asile, parce que celle-ci a transité par un État membre de l’accord de Dublin (NEM-Dublin), par un État tiers dit « sûr » ou dont la demande est considérée comme « manifestement infondée » : http://asile.ch/prejuge-plus/libre-choix/quelle-protection-recoivent-ils-en-suisse/3-3-decision-de-non-entree-en-matiere-nem/ (consulté le 07.09.2016). []
  4. Dans l’Union européenne, lorsque le statut de réfugié est refusé faute de persécution personnelle, les personnes déplacées par la guerre et les violences obtiennent une protection subsidiaire, et souvent quasiment les mêmes droits que les réfugiés. En Suisse, elles reçoivent une décision de renvoi. Et si l’exécution du renvoi dans le pays d’origine s’avère illicite ou inexigible parce qu’elle mettrait la vie des personnes en danger, une admission provisoire – statut précaire avec des droits limités – est octroyée. Voir « A titre de comparaison, la protection subsidiaire européenne » (consulté le 07.09.2016). []
  5. Page Internet : « Le système coordonné de protection de la population » de l’administration fédérale (consulté le 07.09.2016). []
  6. Page Internet : « L’histoire de la protection civile suisse » de l’administration fédérale (consulté le 10.09.2016). []
  7. Art. 21, « Répartition entre les cantons » (consulté le 10.09.2016 []
  8. En 2008, lors de la révision partielle de la loi sur l’asile (LAsi), l’exclusion de l’aide sociale sera étendue à toutes les personnes ayant reçu une réponse négative à leur demande d’asile. Pour plus d’informations, lire : « L’aide d’urgence accordée aux personnes déboutés ou frappées d’une décision de non-entrée en matière », publié sur le site Internet asile.ch (consulté le 11.09.2016). []
  9. Proposition de motion pour mettre fin au recours aux abris de protection civile pour héberger des demandeurs d’asile, n° M2259, déposée le 20 février 2015 (consulté le 10.09.2016). []

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