#7 / Quand spécialisation touristique rime avec bling-bling : Las Vegas, destination ostentatoire ?

Pascale Nédélec

L’article de Pascale Nédélec au format PDF


« Ils avaient prévu un enterrement de vie de garçon à Las Vegas qu’ils n’oublieraient jamais. Maintenant, ils ont vraiment besoin de se souvenir de ce qu’il s’est passé ! À qui est ce bébé dans le placard de leur suite au Caesars Palace ? Comment un tigre est-il arrivé jusque dans leur salle de bain ? Pourquoi manque-t-il une dent à l’un d’entre eux ? Et, surtout, où est le marié ?! ». Voilà le synopsis auquel on peut s’attendre quand on passe un week-end à Las Vegas, à en croire la comédie américaine à grand succès Very Bad Trip, sortie en 2009 (The Hangover dans son titre original)1, qui fait de Las Vegas un personnage à part entière.

Las Vegas, une ville bling-bling par excellence ? L’expression, qui trouve son origine dans l’univers hip-hop, peut être définie en premier lieu comme une démonstration ostentatoire de richesses. Passée dans le langage courant, dans le monde anglophone comme dans le monde francophone, l’expression est devenue synonyme de tapageur, spectaculaire et clinquant ; autant d’adjectifs qui semblent tous parfaitement coller à la peau de l’autoproclamée « capitale mondiale du jeu » végasienne. Pour le tout-venant, évoquer Las Vegas fait en effet penser à des montagnes de dollars gagnées dans des tournois de poker internationaux, au gigantisme d’hôtels-casinos reproduisant, avec plus ou moins de réalisme et de bon goût, la Rome antique ou les pyramides égyptiennes, ou encore aux mœurs légères qui ont alimenté sa réputation de « ville du péché » (Sin City). L’image de Las Vegas, située dans le Nevada, dans l’Ouest des États-Unis, est construite autour de ce parfum de scandale et d’excès.

Cet article ambitionne dès lors de décrypter l’imaginaire « bling-bling » qui entoure la ville de Las Vegas, et son influence sur sa spécialisation touristique. Le bling-bling est ici appréhendé principalement sous l’angle de l’ostentation, définie par le dictionnaire Larousse comme une « affectation qu’on apporte à faire quelque chose, étalage indiscret d’un avantage ou d’une qualité, attitude de quelqu’un qui cherche à se faire remarquer ». Je fais ainsi l’hypothèse que la nature bling-bling de Las Vegas réside dans sa capacité à se faire remarquer, par un étalage architectural et festif. Le succès de cette destination, l’une des plus fréquentées au monde, avec plus de 42 millions de visiteurs en 2015, repose en grande partie sur une promotion touristique précoce, et un marketing contemporain mettant en scène la nature spectaculaire et sulfureuse de Las Vegas. Après avoir explicité les temporalités et les motivations, économiques et politiques, de la spécialisation touristique végasienne, la notion d’imaginaires touristiques (Gravari-Barbas et Graburn, 2016) est mobilisée pour comprendre comment la destination végasienne a bâti sa spécialisation et son positionnement touristiques autour de l’ostentatoire, et donc du bling-bling. Loin de se limiter au registre des représentations collectives, ces imaginaires ont alors des conséquences sur la fabrique des quartiers touristiques, qui renforcent le caractère clinquant de Las Vegas.

Genèse d’une spécialisation touristique

La conquête de l’Ouest américain, qui s’étend de la fin du XVIIe au XIXe siècles, est rythmée par la pratique des jeux d’argent, qui représentaient une source de récréation aussi bien pour les colons en route vers la côte pacifique, que pour les mineurs des ruées vers l’or et autres épopées minières. Si l’attrait pour les jeux (de cartes, de dés) et les paris, ainsi que l’existence de joueurs professionnels sont attestés dans les territoires de l’ouest dès les années 1850 (Roske, 1990), seul l’État du Nevada a fait de ce divertissement un des fondements de son économie.

Durant les premières années d’existence du Nevada2 la volonté affichée des autorités d’interdire les jeux d’argent par souci de bienséance et de moralité est contrebalancée par un laxisme général et par l’impossibilité matérielle de faire respecter des textes de loi dans une région encore largement sauvage et très éloignée du foyer de peuplement historique de la côte Est. Progressivement, les responsables politiques locaux prennent conscience de la manne financière que pourrait représenter un contrôle sur les jeux d’argent. En 1869, la législature du Nevada réglemente la pratique du jeu qui devient par conséquent une activité légale (Roske, 1990 : 31). La géographe P. Raento explique cette institutionnalisation par des motivations à la fois économiques et culturelles : « La pratique du jeu a des racines anciennes dans les villes minières et ferroviaires du Nevada du XIXe siècle, caractérisées par des attitudes libérales envers la consommation d’alcool, la pratique du jeu et la prostitution. […] Le profil démographique et culturel de l’État a aussi joué un rôle : une forte proportion d’hommes dans la population totale, une faible adhésion à l’église, un individualisme et un matérialisme forts, un mode de vie de mineurs et de fermiers de passage créèrent une société spécifique qui pouvait être ouverte à des expérimentations légales de formes sociales ailleurs condamnées. »3 (Raento, 2003 : 229).

Le jeu devient alors un élément structurant du Nevada, en ce qu’il sous-tend et organise la croissance urbaine de ses deux principales villes, Reno et City of Las Vegas. Pour autant, la pratique des jeux d’argent n’est pas directement à l’origine de leur fondation. City of Las Vegas doit ainsi son existence à la construction, en 1905, d’une gare sur la voie ferrée reliant Salt Lake City à Los Angeles (Moehring et Green, 2005). Sa fondation découle donc de l’activité ferroviaire, même si dès 1906 un premier hôtel-casino, l’Hôtel Nevada (renommé le Golden Gate Casino en 1955), est bâti sur Fremont Street, la principale artère commerciale de la bourgade, rapidement suivis par de nombreux saloons. Il faut toutefois attendre les années 1930-1940 pour que la pratique des jeux d’argent donne naissance à une fréquentation touristique d’ampleur nationale, qui s’articule en deux temps.

1. Localisation des quartiers touristiques végasiens (P. Nédélec, 2016)

1. Localisation des quartiers touristiques végasiens (P. Nédélec, 2016)

En premier lieu, la construction du barrage Hoover sur le fleuve Colorado, et de sa retenue le lac Meade, à environ 50 kilomètres au sud-est de City of Las Vegas, attire l’attention des médias nationaux. Les milliers d’ouvriers qui s’installent dans la région pour travailler sur le chantier, et qui fréquentent les bars et autres attractions nocturnes de la ville pendant leur temps libre, sont peu à peu rejoints par des touristes de tout le pays, curieux de découvrir cette merveille de technologie et d’ingénierie, inaugurée en 1936. La ville devient une ville étape à partir de laquelle rayonnent des circuits touristiques, mais n’arrive pas à fixer les touristes de passage. Dans un second temps, la naissance du Strip, dans les années 1940, consacre la spécialisation touristique de Las Vegas autour de la pratique des jeux d’argent. Le Strip désigne une portion de l’autoroute I91, qui relie Los Angeles à Salt Lake City et traverse Las Vegas, le long de laquelle sont construits douze complexes hôteliers en l’espace de 20 ans4 (Schwartz, 2003 ; Nédélec, 2012). Ceci traduit un déplacement du centre de gravité de l’aire urbaine naissante, aux dépens de Fremont Street, et d’une évolution de l’offre touristique. Il ne s’agit plus d’offrir quelques tables de jeu à des touristes de passage, mais bien de proposer un panel de divertissements diversifiés, destinés à capter les visiteurs pendant plusieurs jours. Si le casino est la pièce centrale de ces établissements, il est associé à des bars et restaurants, des piscines, des salles de spectacle au sein de véritables complexes hôteliers autonomes (resort hotels) qui fondent la spécificité et l’attraction de la destination végasienne.

En dépit d’une parenthèse d’interdiction entre 1913 et 19315, l’omniprésence des jeux d’argent dans l’État n’a jamais véritablement été remise en cause, conduisant à une légalisation totale et définitive en 1931 (Moody, 1994). Le Nevada se démarque alors à l’échelle nationale pendant 47 ans avec un monopole complet sur la pratique légale des jeux d’argent, qui se termine en 1978 avec la légalisation du jeu dans le New Jersey. Depuis, tous les États fédérés autorisent une forme ou une autre de jeux d’argent, à l’exception d’Hawaii et de l’Utah, ce qui témoigne d’une banalisation de la pratique et de son acceptation sociale (Findlay, 1986 ; Schwartz, 2006). Même si Las Vegas n’est plus le seul lieu où jouer dans des casinos, elle demeure la destination préférée des joueurs (gamblers) avec le plus grand nombre d’hôtels-casinos au monde (75 en 2014), 12 des 20 plus grands hôtels du monde et une fréquentation touristique des plus élevées (42,3 millions de visiteurs en 2015). Seule Macao, en Chine, peut prétendre rivaliser en termes de revenus : en 2014, ses 36 casinos ont dégagé près de 44 milliards de dollars, contre 6,8 milliards à Las Vegas (Schwartz, 2016).

« L’expérience Las Vegas » : constitution des imaginaires touristiques végasiens

Le rayonnement et l’attractivité de Las Vegas reposent historiquement sur son offre légale de jeux d’argent, qui en faisait une destination incomparable à l’échelle des États-Unis. À cet élément de distinction s’ajoutent des stratégies de promotion touristique, menées dès les années 1920 (Gragg, 2013), pour confectionner les « imaginaires touristiques » (Gravari-Barbas et Graburn, 2016) à partir desquels s’est construite la réputation bling-bling de Las Vegas.

Définir les imaginaires touristiques

Les imaginaires touristiques sont définis comme la somme des images et des représentations initialement produites et utilisées par la sphère touristique, puis diffusées au reste de la société. Il s’agit ainsi d’un ensemble d’images, associées avec certains lieux ou types de lieux, qui cristallisent des jugements de valeur portés par une société donnée, à une époque donnée. Les imaginaires touristiques sont alors des imaginaires spatiaux dont la spécificité réside dans leur élaboration au sein de la sphère touristique (Gravari-Barbas et Graburn, 2016 ; Nédélec, 2016). En tant qu’outils marketing, ils doivent permettre aux acteurs du tourisme de « vendre » une destination touristique, de façonner un ensemble de représentations qui soient attractives pour les visiteurs potentiels, soit parce qu’elles renforcent une attirance existante, soit parce qu’elles créent de nouvelles envies au sein d’un marché de consommateurs de plus en en plus exigeants. En cela, ils se font l’écho d’un « imaginaire social » plus vaste (Zukin, Baskerville et Greenberg, 1998), qui articule les spécificités culturelles, historiques, idéologiques, et religieuses d’un groupe social. À ce titre, les imaginaires touristiques sont par définition changeants, reflétant les « nouvelles significations [associées aux] lieux qui sont créées par des changements progressifs dans les modes d’utilisation, reflétant de nouveaux modes de déplacements, de construction, et d’affichage ; de même que des évolutions des rythmes de travail et de loisir » (idem : 628). L’association d’idées entre une plage de sable blanc bordée de cocotiers et une destination paradisiaque, lieu d’évasion et d’exotisme, est ainsi intrinsèquement liée aux représentations européo-centrées contemporaines qui valorisent les bains de mer et la pratique du bronzage (Staszak, 2008). Même dans les sociétés occidentales, l’attrait pour le tourisme balnéaire est récent (Corbin, 1988 ; Didier, 2002), la mer étant, jusqu’au XIXe siècle, majoritairement associée aux maladies (malaria) et aux dangers en tous genres (noyades, naufrages, pirateries).

Les professionnels du tourisme sont les premiers producteurs de ces imaginaires, motivés par des objectifs économiques et des ambitions de positionnement marketing, suivis de près par les acteurs privés des établissements touristiques. Dans cette perspective, les images qui sont mises en avant, lors de campagnes publicitaires par exemple, sont le fruit d’une sélection très ciblée et partiale, des caractéristiques d’un lieu. Les affiches de promotion d’îles paradisiaques se garderont ainsi bien de montrer les effets de l’érosion littorale, d’effacer tout signe de pollution liée à l’activité touristique, ou encore de montrer l’existence de quartiers informels à proximité des plages. Dans un second temps, les touristes eux-mêmes participent de la production et du renforcement des imaginaires touristiques : c’est en partie parce que les touristes associent l’île à une destination de rêve et qu’ils activent cet imaginaire touristique par leurs pratiques (farniente sur la plage, bronzage, bains de mer) qu’elle est vendue comme telle par les professionnels du tourisme (Bernardie-Tahir, 2011). Ainsi, les imaginaires touristiques témoignent d’une imbrication entre des campagnes publicitaires sciemment orchestrées par les acteurs du tourisme, un imaginaire social plus lâche, et des sensibilités et subjectivités personnelles. En reprenant la définition du géographe B. Debarbieux, l’ambition est dès lors « d’individualiser l’imaginaire [ici touristique] comme un ensemble d’images doté d’une dynamique intrinsèque, motivée par des jeux de correspondances et d’analogies, de contrastes et d’oppositions ». C’est ainsi la dynamique d’affirmation de Las Vegas comme destination excessive (ou bling-bling) qui nous intéresse ici plus particulièrement.

Imaginaires touristiques végasiens

En un peu plus d’un siècle d’existence, la promotion de Las Vegas s’est appuyée sur une succession d’imaginaires touristiques, initiée dès les années 1920 (Gragg, 2013) par la Chambre de commerce locale, puis par des institutions entièrement consacrées au développement du tourisme. Depuis 1955, la Las Vegas Convention and Visitors Authority (LVCVA), fruit d’un partenariat public-privé, a pour mission « d’attirer des visiteurs en faisant la promotion de Las Vegas dans le monde comme la destination la plus désirable pour les loisirs comme pour les affaires ».

2. Un siècle d’imaginaires végasiens (P. Nédélec, 2016. D’après Gragg, 2013)

2. Un siècle d’imaginaires végasiens (P. Nédélec, 2016. D’après Gragg, 2013)

Les imaginaires touristiques successifs de Las Vegas, représentés sur la figure 2, ont en commun d’avoir été diffusés à l’échelle nationale par une couverture médiatique très forte dans les médias les plus populaires, à savoir la presse dans la première moitié du XXe siècle, puis le cinéma et la télévision dans sa deuxième moitié. Les acteurs locaux, du tourisme comme du monde politique, se sont ainsi toujours appuyés sur les médias pour construire et orienter la perception de Las Vegas au sein de l’opinion publique américaine. La diffusion médiatique des imaginaires touristiques végasiens s’accélère à partir des années 1950 et la mise en place de stratégies publicitaires par les dirigeants des hôtels-casinos eux-mêmes pour développer leur attractivité. De plus en plus de vedettes de la chanson et du cinéma sont ainsi invitées à se produire, et surtout à se divertir, dans les établissements du Strip, afin de donner à la ville une image glamour et raffinée. En s’appuyant sur les récits des chroniqueurs mondains et les photographies de ces stars en train de miser sur les tapis verts ou de se reposer près de la piscine, les dirigeants des hôtels-casinos espèrent ainsi que le grand public ait envie de copier ces personnalités qu’il admire. L’hôtel-casino The Sands devient par exemple le repère de Frank Sinatra et de son « Rat Pack », surnom donné au groupe d’artistes parmi les plus célèbres des années 1960 gravitant autour de Dean Martin et Sammy Davis, Jr. Depuis cette époque, toutes les personnalités d’importance du monde du spectacle se doivent d’être vues à Las Vegas (Moehring et Green, 2005). Le succès de cette stratégie est alors de suggérer que Las Vegas est une destination sophistiquée, digne des plus grands artistes, mais accessible au tout venant. La proximité entre Las Vegas et Hollywood pose les premiers jalons de la nature bling-bling de Las Vegas : chaque venue de personnalités est orchestrée comme un évènement spectaculaire, qui veut provoquer l’étonnement du public et frapper les esprits.

La capacité des établissements de Las Vegas à attirer les strass et paillettes du monde du spectacle n’est pas l’unique facteur explicatif de la réputation de Las Vegas. Devant l’essoufflement de cet imaginaire touristique, qui se traduit par un ralentissement de la fréquentation des hôtels-casinos dans les années 1990, la LVCVA décida de renouveler sa façon de promouvoir la ville. La portée des campagnes publicitaires de cette époque destinées à conquérir le marché des familles, en présentant Las Vegas comme une destination familiale (Gravari-Barbas, 2001), a été limitée par la force des imaginaires touristiques déjà profondément installés dans l’opinion publique américaine, qui peuvent se résumer en une phrase : on vient à Las Vegas parce qu’on peut y faire ce qui est interdit ailleurs.

Dès l’origine de la promotion touristique de Las Vegas, le motif de l’échappatoire (escape) s’impose comme une clé de lecture du succès de la ville (Eumann, 2005 ; Gragg 2013). Isolée dans le désert de Mojave, la ville est hors du monde, hors de la civilisation, et donc à l’abri des règles qui régissent ailleurs la société, comme le prouve sa légalisation du jeu. La réputation de Las Vegas s’est construite dans le cadre d’un lieu indépendant et relativement autonome (Randlett, 2008), isolée du carcan des normes et pressions sociales qui régissent la vie quotidienne des visiteurs. En toile de fond, se trouve l’idée que les écarts faits à Las Vegas n’auront pas de répercussions sur sa vie « normale », que Las Vegas est une île sur laquelle on s’échappe pour quelques heures ou quelques jours avant de retrouver son banal quotidien. C’est justement sur ce ressort qu’a joué l’agence de publicité R&R Partners, sollicitée au début des années 2000 par la LVCVA pour concevoir les campagnes de promotion de Las Vegas. Les slogans qu’elle a imaginés sont devenus des expressions emblématiques des imaginaires touristiques contemporains de Las Vegas, synthétisés par la formule d’un journaliste local : « une passion pour le jeu, la bibine et la fête jusqu’au bout de la nuit » (Lasker, 2011). Ceci illustre le glissement de l’échappatoire vers la liberté de faire tout ce que l’on veut, premier pas vers la licence.

Le succès fut tel qu’une enquête du journal USA Today a déclaré la campagne « la plus efficace » (most effective) de l’année 2003, et que la revue professionnelle Advertising Age l’a qualifiée de « phénomène culturel » (Friess, 2004). Incarnation de l’adéquation entre publicité et représentations collectives, le slogan « ce qui se passe ici, reste ici » (What happens here, stays here) est passé dans le langage courant, au point d’être repris par la première dame de l’époque, Laura Bush, lors de la célèbre émission de télévision The Tonight Show with Jay Leno en 2006. L’occurrence peut paraître anecdotique dans une perspective française, mais elle fut relevée par tous les medias américains, donnant encore plus de poids au slogan. Comme le déclara le directeur de R&R Partners, Billy Vassiliadis : « Quand quelqu’un comme Laura Bush l’utilise, vous savez que c’est universel […] Quand c’est utilisé comme énigme dans La Roue de la Fortune ou comme une question du Jeopardy ! ((Jeu télévisé américain, diffusé depuis 1964. Le jeu repose sur un modèle inversé de question/réponse : une réponse est présentée, et les candidats doivent trouver la question correspondante.)), c’est universel. » (Katsilometes, 2011). De même, l’expression laconique « seulement à Vegas » (Only in Vegas) fait référence au spectaculaire et à l’ostentatoire, en d’autres termes à la nature bling-bling de Las Vegas, qui sont au cœur des imaginaires touristiques végasiens. Selon Jeff Candido, l’un des deux créateurs de la campagne, la réussite réside dans la force de suggestion du slogan plutôt que dans une explicitation directe de l’expérience offerte par Las Vegas : « Nous savions que nous ne pouvions pas montrer ce que les gens font à Las Vegas aux heures de grande écoute à la télévision, alors le slogan les laisse deviner » (Friess, 2004).

Quelle est donc cette « expérience Las Vegas » qu’on ne pourrait montrer à la télévision de façon explicite mais que tout le monde semble connaître ? Les imaginaires touristiques végasiens se sont progressivement construits sur le thème de l’échappatoire, puis sur le sentiment de liberté qui en découle, et sur lequel se sont fortement appuyés les acteurs du tourisme. Loin des contraintes du quotidien, Las Vegas incarne ainsi la liberté non seulement de dépenser son argent sur les tables de jeu, mais aussi de faire la fête, jusque dans l’excès (d’alcool notamment), de s’affranchir de la bienséance par des tenues plus sexy, des attitudes plus libertines, voire des rencontres amoureuses désapprouvées par la morale dominante. Dans le sillage de la campagne de R&R Partners, les hôtels-casinos se sont positionnés comme des « terrains de jeu pour adultes » (adult playgrounds), dans lesquels tous les plaisirs seraient accessibles et les actions dépourvues de conséquences, puisque justement « ce qui se passe à Vegas, reste à Vegas »6. Ce positionnement marketing souligne la particularité du bling-bling végasien qui joue de plus en plus la carte de la consommation ostentatoire de plaisirs (sexe et alcool).

L’analyse de la construction et de la diffusion des imaginaires touristiques végasiens démontre ainsi comment Las Vegas a bâti sa spécialisation et sa réputation sur le bling-bling, ce que synthétise à lui-seul le surnom de « ville du péché » (Sin City). L’image sulfureuse de Las Vegas, promue par les campagnes publicitaires et entretenue dans l’opinion publique, n’a pas que des conséquences en termes de positionnement marketing et d’attractivité touristique. Le spectaculaire, l’ostentatoire sont également au cœur de la fabrique des quartiers touristiques.

3. « Ce qui se passe ici, reste ici (un simple rappel amical) » : Arrivée à l’aéroport de Las Vegas (P. Nédélec, 2013)

3. « Ce qui se passe ici, reste ici (un simple rappel amical) » : Arrivée à l’aéroport de Las Vegas (P. Nédélec, 2013)

Le bling-bling au cœur de la fabrique urbaine touristique

Si les imaginaires touristiques végasiens sont essentiellement construits autour du Strip, et dans une moindre mesure de Fremont Street, il serait faux de croire que ces quartiers touristiques sont représentatifs de l’intégralité de l’aire urbaine. Il est important ici de souligner le très grand décalage entre l’emprise spatiale de ces enclaves fonctionnelles (Nédélec, 2012) et leur place dans les représentations collectives : les quartiers du Strip et de Fremont Street représentent moins de 2 % d’une aire urbaine d’environ 1 500 km², comme l’illustre la figure 4. Dès lors, si la fabrique urbaine des quartiers touristiques est caractérisée par le bling-bling, elle est d’autant plus spectaculaire qu’elle contraste complètement avec la banalité du reste de l’aire urbaine (Nédélec, 2013).

 

4. Emprise spatiale des enclaves touristiques dans l’aire urbaine végasienne (P. Nédélec)

4. Emprise spatiale des enclaves touristiques dans l’aire urbaine végasienne (P. Nédélec)

L’ostentation architecturale du Strip

La première chose que tout visiteur remarque à Las Vegas, c’est la taille monumentale des hôtels-casinos alignés le long du Strip. Non seulement les établissements sont immenses (selon un classement repris par le Daily Mail, plus de 6 000 chambres pour le MGM Grand, plus de 7 000 chambres pour le Venetian – Palazzo), mais en plus les choix architecturaux sont très spectaculaires. La majorité des hôtels-casinos du Strip ont en commun de recourir au principe de thématisation, pour marquer les esprits des visiteurs et se démarquer de la concurrence. Les établissements peuvent alors être regroupés en grandes familles thématiques : les répliques urbaines (Paris Las Vegas, New York New York, The Venetian, Monte Carlo), les ambiances tropicales (Treasure Island, Mandalay Bay, The Mirage), les reproductions historiques (Rome antique au Caesar’s Palace, Égypte des pharaons au Luxor, château moyenâgeux au Excalibur), ou encore l’univers du cirque (Circus Circus).

5. Thématisation architecturale des hôtels-casinos du Strip (P. Nédélec) a) Excalibur (2008) – b) The Mirage (2009) – c) New York New York (2008) – d) Circus Circus (2009)

5. Thématisation architecturale des hôtels-casinos du Strip (P. Nédélec)
a) Excalibur (2008) – b) The Mirage (2009) – c) New York New York (2008) – d) Circus Circus (2009)

En fonction des sensibilités personnelles, la thématisation peut être analysée comme un parti pris poussé à son paroxysme, qui démontre l’outrance et l’excès végasiens, voire qui incarne le mauvais goût et le kitsch qui dominent Las Vegas7. S’il est vrai que la façade de l’Excalibur ressemble plus à un jouet Playmobil qu’à un château moyenâgeux, il me semble plus intéressant d’expliciter les motivations de ces choix architecturaux.

Dans leur étude précurseur de Las Vegas, les architectes R. Venturi, D. Scott-Brown et S. Izenour (1972) soulignent que l’architecture des hôtels-casinos du Strip, une ancienne autoroute, a été initialement conçue pour attirer l’attention des automobilistes. Ceci explique la nécessité de construire des établissements en hauteur, avec des symboles visuels explicites et de grande taille pour pouvoir être assimilé depuis une voiture en mouvement. Avec cette logique en tête, ce n’est pas la subtilité qui va aider les hôteliers à attirer des clients, mais des gestes architecturaux grandioses. Dans les années 1980-1990, on observe une transformation de la mobilité des touristes qui délaissent de plus en plus leur voiture, pour déambuler à pied le long du boulevard, ce qui conduit les hôtels-casinos à repenser leur offre commerciale.

À la suite du Mirage, inauguré en 1989, Las Vegas se positionne comme « la capitale mondiale du divertissement » (Entertainment Capital of the World), en lien avec la volonté de séduire des familles (Gottdiener, 2001). Le divertissement au sens large – shopping, bars, restaurants, spectacles (musicaux, de danse, de cirque, de magie…), attractions (grand huit, expositions…) – remplace progressivement le jeu comme produit d’appel numéro un : dans les casinos, les tables de jeu rapportent désormais moins que le reste des activités commerciales (Berns et Ryan, 2012). Las Vegas s’inscrit alors dans des tendances plus globales de naissance de la « ville festive », quand « la ville-consommation supplante la ville-production » (Burgel, 1993 : 119) et qu’elle devient un divertissement en soi. La généralisation d’« environnement thématisé » (Sorkin, 1992) souligne le « tournant festif » de la fabrique urbaine (Gravari-Barbas, 2000a). Le sociologue J. Hannigan (1998 : 89) a ainsi montré la diffusion du principe de divertissement (entertainment) à toutes les formes de loisirs : l’architecture (architainment), le fait de manger (eatertainment), ou le shopping (shopertainment). Dès lors, Las Vegas incarne certes un univers urbain pensé en termes de consommation (Schmid, 2009), qui met en scène une certaine démesure architecturale, mais qui s’inscrit dans une tendance de fond de commodification des villes contemporaines (Gravari-Barbas, 2000b). L’ostentation architecturale s’inscrit par conséquent dans une dynamique plus large de réhabilitation de nombreux environnements urbains selon une logique de consommation.

L’étalage de néons de Fremont Street

Artère historique des premiers hôtels-casinos de City of Las Vegas, Fremont Street a vu son attractivité et sa renommée décliner parallèlement à l’essor du Strip. Pourtant, Fremont Street n’est pas dénué d’atouts : la rue a pour elle de proposer des casinos plus petits, à taille humaine, avec des tables de jeu plus accessibles financièrement grâce à des mises minimales plus basses, et des machines à sous plus « bienveillantes », c’est-à-dire avec une plus grande probabilité de gagner. Malgré cela, dans les années 1990, les établissements de Fremont Street sont confrontés à de grandes difficultés financières, incapables de rivaliser avec les complexes hôteliers du Strip. Les opérateurs de casinos et la municipalité de City of Las Vegas se réunissent alors et décident d’adapter la stratégie de développement qui s’est avérée gagnante pour le Strip, à savoir une architecture spectaculaire, ici caractérisée par un étalage de néons.

En 1995, est ainsi voté un arrêté municipal qui privatise et piétonnise Fremont Street, entre Main et 4th Streets, et en transfère la responsabilité et la gestion à une société à responsabilité limitée, la Fremont Street Experience SARL. Quatre blocks (ou pâtés de maisons) sont de plus recouverts par une canopée artificielle, en forme de tonnelle, longue de 460 mètres et haute de 27 mètres à son sommet. Grâce à des milliers d’ampoules, la canopée est le support de spectacles sons et lumières, intitulés « Fremont Street Experience », qui ont lieu tous les soirs, une fois la nuit tombée. Un accord avec les hôtels-casinos a permis de renforcer l’effet spectaculaire des animations puisque le temps des spectacles, les néons des casinos sont éteints. Devant le succès immédiat de l’attraction, le système d’éclairage a été mis à jour en 2004. Ce sont désormais 12,5 millions de diodes électroluminescentes (LED) qui illuminent Fremont Street pour des spectacles de plus en plus élaborés. L’offre touristique du centre-ville de City of Las Vegas a ainsi radicalement changé : Fremont Street ressemble désormais plus à une galerie marchande qu’à une rue, qui a l’avantage d’être protégée de la chaleur estivale comme des quelques coups de froid hivernaux. Les mythiques casinos construits au début du XXe siècle sont toujours présents mais ont subi d’importantes rénovations pour être plus en adéquation avec les attentes des touristes contemporains. Pour renouveler son offre, il est par exemple possible depuis 2011 de survoler Fremont Street depuis une tyrolienne, située à 23 mètres au-dessus du sol.

6. Renouveau de l’offre touristique de Fremont Street (P. Nédélec, 2011) a) et b) La canopée artificielle surplombant Fremont Street – c) Un exemple de spectacle son et lumière « Fremont Street Experience » – d) Arrivée de la tyrolienne survolant Fremont Street

6. Renouveau de l’offre touristique de Fremont Street (P. Nédélec, 2011)
a) et b) La canopée artificielle surplombant Fremont Street – c) Un exemple de spectacle son et lumière « Fremont Street Experience » – d) Arrivée de la tyrolienne survolant Fremont Street

Les éclairages nocturnes de la canopée sont la principale attraction de Fremont Street qui, malgré cette incursion dans le bling-bling, conserve une ambiance plus sobre et légèrement moins tape à l’œil que sur le Strip, attirant une clientèle un peu plus âgée d’habitués (LVCVA 2012a).

Conclusion

Las Vegas occupe indéniablement une place à part dans l’imaginaire social américain : l’exceptionnalité de la ville a fait sa renommée touristique, mais elle a aussi été source de dénigrement et de discrédit. Malgré l’engouement de millions de visiteurs, la perception de la ville est très souvent négative, voire dépréciative, que ce soit exprimé dans la sphère intellectuelle et universitaire ou dans la presse (Nédélec, 2016). Au fondement de ces critiques, se trouve la dénonciation de la nature bling-bling de la ville, dénigrée car jugée trop ostentatoire et clinquante.

Si les quartiers touristiques de la ville se sont indéniablement construits autour de la surenchère architecturale et que les acteurs du tourisme ont joué au maximum la carte du spectaculaire, il ne faut pas perdre de vue que tout ceci est avant tout une mise en scène pour attirer des visiteurs et pour affirmer sa spécificité dans un marché touristique avec de plus en plus de compétition. Il ne faut donc pas sous-estimer la part des fantasmes dans la constitution des imaginaires touristiques végasiens. En filant la métaphore, Las Vegas serait ainsi une star de hip-hop qui joue de son style bling-bling pour mieux assurer sa promotion, mais dont le quotidien, une fois enlevées ses chaînes en or, est des plus banals.

PASCALE NEDELEC

Pascale Nédélec est docteure en géographie, AGPR à l’ENS de Paris. Ses travaux portent sur les dynamiques d’appropriation sociales et politiques des espaces publics, et des mobilisations citadines en lien avec la fabrique de la ville. À la croisée entre géographie sociale et géographie urbaine, elle s’intéresse notamment aux discours normatifs sur la ville et la construction des imaginaires urbains. Ses recherches doctorales se sont plus spécifiquement consacrées à l’analyse de l’urbanité et la citadinité à Las Vegas.

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Couverture : Le bling-bling à la mode Vegas (P. Nédélec, 2013)

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  1. Littéralement : « Un très mauvais voyage » et « La Gueule de bois » []
  2. Le Territoire du Nevada est créé en 1861 et il devient le 36e État fédéré des États-Unis en 1864. []
  3. Toutes les citations présentes dans cet article ont été traduites par l’auteur. []
  4. El Rancho (1941), Last Frontier (1943), Flamingo (1946), Desert Inn (1950), The Sands et Sahara (1952), Riviera (1955), Dunes (1955), Hacienda (1956), Tropicana (1957), Stardust (1958), Imperial Palace (1959). []
  5. Cette interdiction temporaire résulte de la forte pression exercée par des groupes religieux et des associations de femmes, qui dénonçaient la pratique du jeu comme contraire à la morale et à la bienséance. Cette interdiction légale doit néanmoins être nuancée par une pratique continue des jeux d’argent dans le Nevada (Roske, 1990), notamment pendant la Prohibition (1919-1933). Cette période fut en effet propice à l’installation de mafieux, à Las Vegas comme à Reno, attirés par les opportunités d’organisation de cercles de jeux. []
  6. La plateforme de vidéos en ligne You Tube propose une compilation de 10 ans de publicités jouant sur l’idée que « ce qui se passe à Las Vegas, reste à Las Vegas » : https://www.youtube.com/watch?v=RXIWSVlHvzw. []
  7. Pour illustrer l’ouvrage au titre explicite de Valérie Arrault (2010), l’Empire du kitsch, c’est ainsi la façade de l’hôtel New York New York qui a été retenue. []

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