#7 / Une discrète architecture ostentatoire. Faire la ville entre considérations financières, urgence à produire du logement et injonctions à la « qualité urbaine »

Christophe Mager et Laurent Matthey.

L’article au format PDF


Une tache aveugle : le spectaculaire contraint de la ville ordinaire

Au commencement, il y a un étonnement : depuis plus de trois décennies, un nouvel art de faire la ville émerge (Ascher, 2001 ; Da Cunha et Matthey, 2007 ; Fromonot, 2011 ; Ernwein, 2015), qui est nommé « urbanisme flexible » dans la littérature scientifique (Matthey, 2014a ; Matthey et Mager, 2016), par analogie avec le capitalisme flexible et ses régimes d’accumulation (Boyer, 2015). Dans le champ des études urbaines, cet urbanisme est bien souvent pensé de manière sectorielle selon que l’on focalise l’attention – à titre d’exemples – (1) sur les nouveaux principes urbanistiques (c’est-à-dire les recherches portant sur l’urbanisme durable considéré comme une nouvelle doctrine aménagiste, le new urbanism (Jackson, 1986 ; Bodenschatz, 2003 ; Thomson-Fawcett, 2003), (2) sur les nouvelles modalités de partenariats entre le public et le privé (telles que les recherches, déjà anciennes, portant sur la new urban governance, ou les critiques plus contemporaines émanant de la société civile ou des médias sur les partenariats public-privé, ou PPP), ou (3) sur l’avènement de nouveaux acteurs (fonds de pension, fonds d’investissement, etc.) dans le financement de la production urbaine (à savoir les études portant sur la ville financiarisée ou la nouvelle économie immobilière – Baraud-Serfaty, 2005 ; Halbert et Le Goix, 2012 ; Lorrain, 2013 ; Theurillat, 2014).

Or, du fait de la segmentation de la recherche, la façon dont les principes de l’urbanisme durable conduisaient à l’invention de nouveaux attelages dans le cadre de la planification territoriale (encore une fois, les PPP) a été peu thématisée. Symétriquement, la question de savoir comment l’émergence d’acteurs issus du monde de la finance affectait la façon de faire de l’urbanisme n’a pas été documentée. Enfin, les études urbaines se sont globalement désintéressées de la manière dont l’avènement de cet urbanisme flexible – qui articule de nouveaux préceptes urbanistiques, de nouveaux modes d’organisation de la production territoriale et de nouveaux véhicules de financement – affecte la spatialité des sociétés, notamment du point de vue de ses paysages.

Dans un goût marqué pour la critique évidente, la recherche s’est attachée à la généalogie de ce fait social que sont les architectes stars (Lo Ricco et Micheli, 2003 ; Ruggiero, 2010). On a, par exemple, développé une critique des incidences paysagères de leur production, dans une dénonciation systématique des excessives monumentalités d’une architecture de l’objet qui, en tension avec son contexte, bouleverse le lieu et réinvente – en le brutalisant – le site. Mais l’ordinaire du projet urbain – tramé de gestes architecturaux qui, infinitésimaux, mobilisent une sorte de spectaculaire contraint par le besoin de se proportionner au lieu de l’intervention – est demeuré comme une tache aveugle de la recherche. Pourtant, cet ordinaire que la recherche néglige, fait la ville.

La ville bling-bling comme envers du « bon goût » local

Cette ostentation contrariée par la nécessité de se proportionner au site fonde, selon nous, la ville bling-bling. En effet, dans le cadre de ce texte, le bling-bling, que le dictionnaire Le Petit Robert rattache à un « un luxe ostentatoire et clinquant », renverra plutôt à une posture qui surinvestit la fonction sémiotique des objets au mépris de leur espace (physique ou social) de réception. Il est, par exemple, possible de trouver que le pont Hans-Wilsdorf à Genève est bling-bling. Il mobilise certes des trésors d’ingénierie. Il a été unanimement salué pour son audace formelle et sa sophistication partiellement inspirée par la structure en nids d’oiseaux du stade olympique de Pékin. Mais le sentiment de petitesse que l’on peut éprouver en le traversant conduit à l’impression d’un hiatus : l’objet est saturé de références ; son contexte d’accueil est celui de ces « paysages ordinaires » que le début du XXe siècle nous a légués (Dewarrat et al, 2003).

Ainsi définis, le bling-bling et ses traductions urbaines constitueront ci-après une catégorie d’analyse du renouveau d’une architecture d’ostentation, qui vise tout autant à attirer de riches investisseurs mondialisés qu’à mimer l’esthétique du nouvel ordre paysager, donc social. Mais cette catégorie est relative.

Le bling-bling doit être appréhendé dans le cadre de ce que Pierre Bourdieu appelait, en 1979, une « critique sociale du jugement ». Il n’est pas une essence. Il relève de rapports sociaux, qui établissent une hiérarchisation des pratiques. Il est, dès lors, souvent lié à l’outrance, à l’extravagance sémiotique d’un tiers. Comme l’écrivait Bourdieu, nous sommes des « classeurs classés par leurs classements ». Ce qui est bling-bling en un point de l’espace social, ou de l’espace géographique ne l’est peut-être pas dans d’autres. Cette relativité nous conduit à mobiliser dans la suite de l’article l’oxymore de discrète architecture ostentatoire. Ce dernier permet, selon nous, de penser de manière plus fine les transformations de l’ordre paysager occasionnées par la volonté de faire un geste architectural signifiant. Ce choix terminologique n’est pas innocent. Tentant de comprendre les logiques de production ainsi que les incidences d’un certain goût de l’« étalage » dans le quotidien de la fabrique urbaine, traquant les traductions ordinaires d’une ostentation contrainte par un contexte d’accueil, ce sont les productions qui contreviennent au bon goût, au sens de Bourdieu toujours, local, celui qui a, historiquement, modelé la forme d’une ville aux moyens de règles et de règlements architecturaux et urbanistiques, qui nous interpellent.

Nous nous attacherons, d’abord, à rappeler les voies par lesquelles un urbanisme néolibéralisé – dit entrepreneurial – s’est institutionnalisé. Cette institutionnalisation s’appuie sur des partenariats public-privé et une imbrication croissante des marchés immobiliers et financiers ; elle favorise ainsi des transformations urbaines dont le caractère ostentatoire est supposé faire parler (Silver et Nichols Clark, 2013). Dans un deuxième temps, nous illustrerons notre propos avec un exemple suisse, celui de la République et canton de Genève. Il s’agira alors de combiner ces transformations des modes de financement de la ville et de collaborations au sein des projets urbains avec des enjeux plus spécifiques de la production urbaine, notamment celui d’une crise aiguë du logement, justifiant la flexibilisation des règlements d’urbanisme, la diffusion d’une nouvelle éthique de la qualité architecturale (Matthey, 2014a) et la constitution d’une esthétique de la forme audacieuse. Nous nous arrêterons plus particulièrement sur le projet dit de l’Étang, emblématique d’une discrète ostentation au sens défini ci-dessus.

L’urbanisme entrepreneurial entre flexibilisation institutionnelle et privatisation de la fabrique urbaine

La mise en concurrence croissante des villes a initié – en raison du décloisonnement et de la dérégulation des marchés de biens, des services et de la circulation des facteurs de production – l’avènement de ce que Brenner (2004) a appelé les urban locational policies, faisant, dès les années 1980, de la « compétition territoriale l’alpha et l’oméga de toute politique territoriale » (Jouve, 2007 : 191). Créer un environnement institutionnel et construit répondant aux besoins et aux aspirations des acteurs susceptibles de contribuer (à différentes échelles) à l’attractivité, au dynamisme et à l’influence économiques de la ville1  est devenu un impératif (Reigner et al, 2013), de même que s’inspirer, pour les gouvernances urbaines, des modes de gestion de l’économie privée, initiant en cela ce qu’Harvey (1989) a décrit comme le passage d’un urbanisme managérial à un urbanisme entrepreneurial (Peck, 2014). La consolidation de l’urbanisme entrepreneurial s’articule ainsi à une volonté de flexibiliser la production urbaine, institutionnellement et dans son financement.

Dans un contexte économique souvent déprimé ou de contraintes budgétaires fortes, le coût du financement de cette « qualité urbaine entrepreneuriale » serait en effet prohibitif s’il ne recourait pas aux PPP2  (Marty et al, 2006). Fabriquer une « ville de qualité entrepreneuriale » nécessite des investissements conséquents, puisqu’il s’agit de faire en sorte que les espaces qui la composent soient, sur le temps long et pour les usagers désirés : (1) cohérents, continus, lisibles, évolutifs et esthétiques (qualité formelle) ; accessibles et multifonctionnels (qualité fonctionnelle) ; à empreinte écologique faible (qualité environnementale) (Da Cunha et Guinand, 2014). En ce qui concerne ce dernier point, Brand témoigne de la diffusion de l’idée selon laquelle, pour attirer l’investissement, les actifs des secteurs de pointe et les touristes, une ville se doit d’avoir une image de « ville verte », c’est-à-dire propre et écologique (2007). La qualité sociale – réduction de la pauvreté et des inégalités – n’est pas négligée, mais l’urbanisme entrepreneurial considère que ce sont les politiques et projets urbains attirant « [les] investissements et [les] groupes sociaux stratégiques » (Reigner et al, 2013 : 19) qui y contribueront – la réussite économique des uns percolant sur les moins bien nantis –, et non les politiques redistributives. Pour plusieurs auteurs, toutefois, les PPP illustrent moins la nécessité de trouver des sources de financement alternatives aux prélèvements et à l’endettement public, que l’importance qu’a pris en soi la logique de marché dans la gestion publique, et qui a abouti à supposer, avant toute chose, que le désengagement de l’État est vertueux, à rendre prégnante l’évaluation des projets urbains par leur rentabilité économique et à raccourcir l’horizon temporel dans lequel celle-ci devrait être atteinte (Campagnac et Deffontaines, 2012).

Au-delà des PPP, le financement du « global urbanism » (Sheppard et al, 2013) passe également par l’imbrication croissante des marchés immobiliers et des marchés financiers (Nappi-Choulet, 2012, 2013). Il est d’usage de parler d’une « financiarisation de la ville », qui peut être définie comme un processus dans lequel l’acquisition ou la construction de l’environnement construit se fait de manière notable par des institutions financières, telles que les banques et les assurances, les fonds de placement (Fur, 2006 ; David et Halbert, 2010), ou encore les fonds de pension (Theurillat et al, 2010 ; Theurillat et al, 2014). En résulte une transformation de parties de villes en actifs financiers négociables pouvant composer des portefeuilles d’investissement internationalisés rendant la « propriété urbaine […] liquide et mobile dans l’espace » (Corpataux et Crevoisier, 2005, cités dans Theurillat, 2011 : 231). La disjonction spatiale potentiellement induite entre les investisseurs, les propriétaires et les locataires complexifie leurs relations et favorise, chez les financeurs, les comportements purement spéculatifs (à la hausse ou à la baisse, comme lors de la crise des « subprimes » de 2007 – Gotham, 2009).

Toutefois, l’urbanisme entrepreneurial ne contribue pas seulement à transformer les instruments et les acteurs de l’urbanisme. Il change également le design urbain.

L’impact de l’urbanisme entrepreneurial sur le design urbain  : l’importance du facteur « WOW ! »

Faire muter la ville pour qu’elle puisse répondre aux attentes des entreprises et des groupes sociaux stratégiques a donné jour à un design urbain entrepreneurial – qui peut être vu comme la transposition spatiale de la transition postfordiste (Hall et Hubbard, 1996) –, mettant l’accent sur les projets considérés comme susceptibles d’ancrer et d’attirer les activités à haute valeur ajoutée et les usagers de la ville à forts capitaux : parcs industriels et scientifiques, centres de conventions, immeubles résidentiels haut de gamme, grands équipements culturels, etc. (Sager, 2011 ; Sklair, 2013). Respecter « l’impératif post-fordiste de qualité urbaine », créateur d’un nouvel ordre paysager urbain (Reigner et al, 2013 : 20), ne suffit cependant pas. Il faut encore que les projets entrepris fassent parler d’eux, qu’ils créent le buzz chez leurs consommateurs potentiels (visiteurs, résidents, éventuels immigrants) (Arribas-Bel et al, 2016).

Le buzz urbain fait l’objet d’une attention marquée dans la littérature récente, mettant en exergue le fait que la planification urbaine est devenue une pratique de nature fondamentalement transnationale (Baker et Ruming, 2015). Les mêmes éléments iconiques (les tours, les grands équipements culturels, les quartiers « durables », etc.) sont reproduits à une échelle telle par des villes souvent proches et en situation de concurrence qu’ils n’apparaissent plus comme originaux (Bailoni, 2014). La visibilisation du renouveau urbain entrepreneurial nécessitera donc non seulement des aménagements supposés souhaités par les détenteurs de capital, mais aussi leur particularisation, de telle sorte que certaines transformations urbaines « buzzent » plus que d’autres (Peck, 2005). « Buzzer » passera souvent – dans une recherche de « l’effet Bilbao » – par la singularisation de la forme, mais aussi par le recours à des « archistars3  » (Molina, 2010, 2014). Ce qui, pour reprendre l’expression d’E. Oxford, est supposé maximiser le facteur « WOW ! » des villes (2008). À titre d’exemple, si la course à la verticalité entre les villes de classe mondiale – ou aspirant à l’être, comme Dubaï, ou plus récemment Bassora, avec le projet « The Bride » – joue un rôle non négligeable dans la recherche du buzz4  (Appert et Montes, 2015), la promotion d’une architecture déconstructiviste peut aussi permettre de faire parler de soi. Ce fut le cas avec le musée pensé et conçu par Frank Gehry qui réinventa Bilbao, à Prague, avec la Maison dansante5  de Frank Gehry et Vlado Milunić, ou encore, à Lausanne, avec le Rolex Learning Center de Kazuyo Sejima et Ryue Nishizawa. Tout en courbes et horizontalité, rompant avec l’architecture moderniste du reste du campus, ce centre a porté l’École polytechnique fédérale de Lausanne à une nouvelle échelle de visibilité. Le Rolex Learning Center a été financé, pour une moitié, par la Confédération helvétique et, pour l’autre, par diverses grandes entreprises, principalement suisses. Rolex a contribué pour 33 millions de francs suisses au coût total de 110 millions.

1. Rolex Learning Center, École polytechnique fédérale, Lausanne (Mager, 2016)

1. Rolex Learning Center, École polytechnique fédérale, Lausanne (Mager, 2016)

2. Rolex Learning Center, École polytechnique fédérale, Lausanne (Epfl-Alain Herzog [domaine public], via Wikimedia Commons, 2009)

2. Rolex Learning Center, École polytechnique fédérale, Lausanne (Epfl-Alain Herzog [domaine public], via Wikimedia Commons, 2009)

La financiarisation de la ville n’est ainsi, elle-même, pas sans lien avec la valorisation du potentiel à « buzzer ». Il a en effet été largement montré que la dimension spéculative des investissements financiers dans l’immobilier favorise les métropoles ou les quartiers projetant une image positive – qu’elle se réfère à leur passé ou à leur potentiel (Fields et Uffer, 2014) –, mais également que, la détermination de la valeur économique d’un objet immobilier tenant compte de sa « visibilité », voire de son ostentation, les métriques « bling-bling » et « facteur WOW ! » contribuent à la sélection des investissements chez les acteurs privés, voire publics (Gospodini, 2002 ; Trumbull, 2003). Rappelons que le pont Hans-Wilsdorf, trait d’union entre deux quartiers genevois en plein renouveau, a été entièrement financé par la Fondation Hans Wilsdorf, propriétaire exclusive de la manufacture horlogère Rolex.

3. Pont Hans-Wilsdorf, Genève (Gilardini, 2015)

3. Pont Hans-Wilsdorf, Genève (Gilardini, 2015)

La Suisse n’échappe donc pas à ces phénomènes, quoique leur ampleur y soit très relative. Cette transformation générique des modes de collaboration dans les projets urbains et l’apparition de nouveaux acteurs dans le financement des opérations entrent toutefois en convergence – dans le cas de la République et canton de Genève – avec une certaine urgence6 à produire du logement.

Réformer les institutions et les outils de l’urbanisme pour optimiser la production urbaine ? Un exemple suisse

Tant les principes de l’urbanisme entrepreneurial que ceux de la ville financiarisée se déclinent en fonction de contextes locaux de réception. À l’exemple des grands modèles urbains (Devisme et al, 2007 ; Gaillard et Matthey, 2011), ils ne sont pas des principes génériques qui s’imposeraient en tout lieu de manière identique. Par ailleurs, ils s’hybrident avec les dynamiques locales. Le contexte singulier, dans la République et canton de Genève, est celui d’une agglomération, qui, en raison de sa forte croissance économique et démographique depuis le début du XXIe siècle, peine à équilibrer son marché résidentiel. Différentes interprétations sont généralement mobilisées par les acteurs pour expliquer le déficit de logements dans la République et canton de Genève ou, plus largement, dans l’arc lémanique, selon qu’on l’attribue à un excédent de personnes ou à un retard de la construction. Pour les tenants de la première lecture, il s’agit donc de freiner une croissance trop exogène (au sens où la promotion économique du canton est orientée sur l’économie internationale), pour mieux valoriser les ressources endogènes (Matthey, Mager et Gaillard, 2012), ce qui aurait pour effet de diminuer la pression sur le parc de logements. Pour les partisans de la seconde lecture, le plus urgent est de stimuler la production de logements, en garantissant les conditions-cadres propres à permettre à tout un chacun – habitants, élus communaux, professionnels, etc. – de « retrouver l’envie » (selon la formule employée par un haut fonctionnaire du canton, Matthey, 2014b), de construire pour vivre à Genève. C’est au nom de cette envie que les architectes sont appelés à se révolter7 pour construire mieux et plus (Matthey, 2014c), tandis que le Plan directeur cantonal Genève 2030 est agrémenté d’un long document d’introduction titré « Genève, envie », qui détaille les envies du peuple genevois qu’il convient de satisfaire en produisant du logement (Matthey, 2014a).

Ce travail sur les conditions-cadres se traduit par une transformation tant des institutions que des dispositifs légaux et des outils de l’urbanisme genevois. Du point de vue des institutions, l’élargissement progressif (dans la mesure où il s’inscrit dans la longue durée) de la Commission d’urbanisme à des métiers divers de la fabrique urbaine – mais aussi à des associations en lien avec l’environnement, la culture bâtie, etc. – est représentative de cette volonté de se doter d’un organe réceptif à la diversité des points de vue pour mieux identifier les possibilités de blocage des projets urbains (Matthey et Mager, 2016). De même, la réinvention de la figure de l’architecte cantonal est illustrative d’une conception d’un nouveau rôle des organes étatiques. Moins orienté sur l’opérationnel, le cahier des charges du haut fonctionnaire en question est celui d’un « acteur-réseau » selon le titre d’un rapport publié par une éminente fondation genevoise (Marti, 2005). L’architecte cantonal est, en effet, appelé à faire dialoguer les différents mondes de la production urbaine ; désireux de diffuser une culture de la qualité urbaine, son rôle consistera également à mettre en rapport des univers professionnels distincts. Son rôle traduit, par là, une conception d’un État en quête de souplesse, soucieux de ménager des marges de manœuvre aux acteurs privés et associatifs qui produisent, jour à après jour, la ville (Matthey et Mager, 2016).

Du point de vue de la transformation des instruments de l’urbanisme, la refonte de l’outil Plan localisé de quartier (PLQ) donne un bon exemple de la volonté des pouvoirs publics de faire de l’indétermination, de l’adaptabilité, de la réactivité, etc. des principes cardinaux de la nouvelle fabrique urbaine, condamnée à flexibiliser ses outils pour que les « horizons de réalisation » (République et canton de Genève, 2013a : 2) restent ouverts, à plus forte raison que les acteurs sont privés (Matthey, 2014a).

Le lancement, en 2013, d’un appel d’offres investisseurs-architectes pour la transformation du site de la caserne des Vernets, situé à l’une des portes du grand projet Praille-Acacias-Vernets, traduit quant à lui la volonté de réformer les logiques de financement de la production urbaine et de promouvoir une émulation entre architectes, gage des « meilleures garanties de qualité et de durabilité des logements », tout en assurant « des pratiques d’investissement conformes aux exigences éthiques de l’État de Genève », selon le communiqué de presse du canton daté du 2 mai 2013 (République et canton de Genève, 2013b : 1). Des investisseurs présélectionnés, au terme d’une première phase, « sur la base de critères d’aptitude, notamment les références urbanistiques », concourent ensuite pour la réalisation d’un projet d’architecture. Ce projet d’architecture aura été préalablement retenu par un jury, au terme là aussi d’un concours intégrant « les recommandations émises par les investisseurs retenus au cours de la première étape » (op.cit. : 2). L’investisseur lauréat assure ensuite le « développement de l’opération », sa « promotion », les rapports avec l’atelier d’architecture – en somme, la maîtrise d’ouvrage – et, enfin, la gestion des immeubles (ibid.).

Enfin, la volonté de glisser d’un « État planificateur » à un « État aménageur » a conduit les autorités politiques et les administrations à « inventer » une nouvelle entité de production de la ville, celle de l’opérateur urbain, qui doit permettre d’accélérer les procédures, puisqu’on y traite simultanément des demandes et des actes administratifs qui s’échelonnaient préalablement dans le temps long d’une procédure. Cet opérateur urbain est considéré comme un « partenaire des autorités locales » (Dansereau et al, 2005 : 88), qui assume le rôle de maître d’ouvrage, prend à charge les études et donc les pilote, organise la concertation, assure la commercialisation, gère l’exploitation… Quand cet opérateur urbain est en même temps propriétaire foncier, la conduite du projet en devient plus aisée et la cadence de production de la ville s’en trouve accélérée, dans le même temps que l’État perd peut-être un peu de la maîtrise du processus.

Une nouvelle culture de l’urbanisme semble ainsi émerger, qui insiste sur la nécessité d’être plus souple, pour résoudre, au plus proche du terrain, les hypothétiques problèmes susceptibles de freiner la production de logements. Comme le rappelle le conseiller d’État responsable de l’aménagement, dans le rapport de la Commission d’urbanisme, « cette législature apparaîtra comme celle d’un tournant en matière d’urbanisme et d’aménagement du territoire » (République et canton de Genève, 2015b : 7). Cette nouvelle culture de l’urbanisme voue un certain culte à une qualité urbaine, dont l’architecte constitue en quelque sorte la figure messianique. Sa créativité permet de dégager des solutions originales au problème du logement à Genève ; des solutions qui permettent de répondre à l’envie d’habiter des Genevois. Enfin, soucieuse de favoriser la production de logements en accroissant la réactivité des différents segments de la production urbaine, cette nouvelle culture de l’urbanisme construit un nouveau rôle à l’administration et à ses services, l’État travaillant désormais à faciliter les opérations et à donner la cadence.

Cette mutation des institutions et des outils de l’urbanisme genevois, cette mutation de la culture urbanistique induisent une nouvelle grammaire urbaine, parfois discrètement ostentatoire. Cette discrète ostentation réside dans un double mouvement. D’abord, il s’agit de mobiliser des formes compatibles avec l’iconographie des grands projets urbains contemporains : grands gestes architecturaux ou urbanistiques, faits de bâtiments à forte dimension emblématique sursignifiant un nouveau régime métropolitain, d’espaces publics dévolus aux nouveaux usages légitimes de la ville et des infrastructures verts. Mais cette ostentation se fait discrète en raison même de son caractère convenu. C’est notamment ce qu’illustre le projet de l’Étang, en cours, dont l’architecture est pour l’heure strictement de papier, dans la mesure où seules des images de projets ont été produites. Des images dont le principe est de conduire une action (Söderström, 2000), puisqu’elles miment une volonté de rupture avec l’histoire de l’urbanisme genevois. Elles permettent ainsi d’accréditer l’idée selon laquelle le projet participe d’un temps de refondation de Genève.

Un projet de tous les superlatifs

Le projet de l’Étang est une bonne illustration de la transformation en cours de l’action urbaine et du type de ville qui est susceptible de s’y dessiner. Situé dans la commune urbaine de Vernier, à quelques kilomètres du centre-ville de Genève, et proche de l’aéroport, le projet en question s’implante sur une zone jusqu’à présent consacrée aux activités industrielles. À proximité de citernes dévolues au stockage d’essence (qu’il n’est pas prévu de déplacer à moyen terme), le périmètre est limité à l’est et à l’ouest par des axes à fort trafic, au nord et au sud par un parc accolé à une voie de desserte et à une zone de villas.

Le promoteur, l’opérateur et l’archistar

Si le périmètre est bien situé, il s’avère que son environnement le rend peu attractif. Un investisseur, qui a fait fortune dans l’audiovisuel, s’est toutefois attaché au rachat des parcelles de cet espace au potentiel avéré, mais incertain du point de vue des conditions de réalisation. Une fois la maîtrise foncière assurée, le promoteur s’est mué en opérateur urbain, c’est-à-dire en un interlocuteur unique, qui, mandatant des études, rencontrant les acteurs du site et du voisinage ainsi que les services cantonaux et communaux, a élaboré une maîtrise d’ouvrage saluée comme vertueuse par une presse régionale et nationale ébahie et peu avare de superlatifs. Les témoins cités dans les médias vantent ainsi unanimement les qualités d’écoute des différentes parties prenantes mobilisées par les porteurs du projet ; ils saluent l’originalité de la démarche (réunions avec l’ensemble des parties prenantes, que celles-ci soient issues du monde associatif, des administrations ou du secteur privé) et l’ampleur des moyens mobilisés. Ce souci d’une bonne orchestration du processus a très significativement accéléré le rythme de conception du quartier en question.

Car, si le projet initié en 2009 est un peu contrarié dans ses prémices – notamment en raison de la complexité des problématiques d’aménagement à traiter (nuisances sonores, risques, etc.) –, l’arrivée de la figure providentielle de l’« architecte star » (en l’occurrence Dominique Perrault), associé à un bureau local reconnu pour son excellence (Favre et Guth), occasionne un tournant stratégique. De « nouveaux principes d’urbanisme » (Lecoultre, 2014 : 4) sont esquissés, notamment en termes de densité et de mixité des activités. Rapidement, une demande de renseignement (DR 18’410)8 est déposée en mai 2012 et validée onze mois plus tard par le canton. Simultanément, une procédure de modification de la zone (PL11534)9 est initiée, qui sera validée par les autorités communales en juin 2014, et cantonales en décembre 2014. Désormais assuré de ses possibilités de réalisation, le projet s’affine et entre dans le détail de la forme urbaine. Doté de 3 800 plans, le plan localisé de quartier est mis à l’enquête technique après 10 mois (il en faut généralement 24 – si bien que l’appellation de « projet supersonique » se diffusera alors largement dans les médias). Dans le même temps, les premières demandes d’autorisations de construire sont déposées.

La proposition est celle d’une forme urbaine très dense (voir les documents d’illustrations du bureau d’architectes), qui se compose d’un cœur de logements entourés d’immeubles d’activités, permettant de satisfaire aux normes de sécurité découlant des différentes ordonnances fédérales sur les risques. Bien connecté au système de transport, le quartier est supposé accueillir 2 500 habitants (dont du logement pour étudiants) et 2 500 emplois (qui sont une manne pour la commune sur laquelle est situé le périmètre de projet). Du point de vue des équipements, on trouvera un hôtel – 4 étoiles –, des spas, un bowling, une clinique, un supermarché, des bureaux… Le futur quartier est ainsi appelé à devenir une sorte de cœur de ville (densité analogue au centre de Genève avec un COS10  de 2,41), et le possible centre administratif de la commune de Vernier.

 

5. « Une structure urbaine plus contemporaine » (copie d’écran du site de La Tribune de Genève : À Vernier, le quartier de l’Étang a trouvé le moyen de construire vite, 26.02.2015)

5. « Une structure urbaine plus contemporaine » (copie d’écran du site de La Tribune de Genève : À Vernier, le quartier de l’Étang a trouvé le moyen de construire vite, 26.02.2015)

Cette nouvelle identité urbaine est d’ailleurs soulignée dans l’interprétation du périmètre de projet effectuée par Dominique Perrault :

« L’enjeu urbain est important non seulement pour la commune de Vernier, mais aussi pour l’État de Genève qui, étape par étape, passe d’une structure urbaine historique à une autre plus contemporaine que l’on appelle désormais métropolitaine. C’est dans cette vision globale que s’intègre ce projet local » (Dominique Perrault cité dans Rapport de présentation du Plan localisé de quartier N° 29 947, République et canton de Genève, 2015a : 3)

Ce postulat d’une Genève glissant progressivement vers une « structure urbaine plus contemporaine » fonde la proposition d’un quartier qui correspond point à point aux principes de l’urbanisme durable (on retrouve pêle-mêle les métriques courtes, les « noues », les « ruchers », etc. qui font partie du vocabulaire imposé des projets contemporains), mais elle se décline également dans l’esquisse de l’ambiance (modélisée par des images de synthèse) attendue du futur quartier, dont la cooccurrence du dépôt du Plan localisé de quartier (PLQ) et des premières demandes d’autorisations de construire laisse supposer qu’elle est plus qu’une esquisse. Il en résulte le sentiment d’un cadran sud-est à bien des égards conforme à l’ordinaire de la production de l’architecture urbaine suisse. La bande nord tient, par contre, plus de la volonté d’affirmer le caractère contemporain de ce bout de ville. Enfin, le centre de la pièce confine plus à une architecture discrètement ostentatoire, rétablissant l’architecture dans sa fonction symbolique (signifier l’entrée dans une nouvelle modernité).

Dans un contexte genevois marqué par une rhétorique qui est – comme évoqué précédemment – celle d’une certaine urgence (prendre des mesures qui peuvent être d’exception pour produire les logements dont le canton a besoin pour assumer sa croissance), les nouveaux opérateurs urbains désireux de marquer leur intervention par une architecture qui affirme son postulat de l’objet semblent confrontés à des contraintes moindres. Cette transformation de l’action urbaine amène les plus critiques à évoquer l’émergence d’un nouveau type d’urbanisme, qui n’est plus une question de forme ou de composition urbaine, qui n’est pas non plus un urbanisme de processus ou juridique, mais un « urbanisme de permis de construire », selon un architecte-urbaniste libéral. L’expression de cet informateur doit être comprise comme une critique déplorant le fait que la question de la forme urbaine, de la maturation des projets aux cours des processus itératifs, soit désormais réduite à des questions relatives à l’octroi rapide de permis de construire. De fait, il se réfère ici à une déclaration du Conseiller d’État en charge de l’aménagement, à propos d’un autre projet genevois conduit par le même investisseur qu’à l’Étang : « [s]i le promoteur présente un projet conforme aux intentions du département, nous pourrions aller relativement rapidement sur la délivrance des autorisations » (RTS-Info, 2015, s.p.).

Quand l’ostentation permet de refonder la ville

L’intéressant est que l’émergence de cette discrète architecture ostentatoire suscite des controverses plus ou moins publiques selon qu’elles se traduisent par un débat public, ou par des polémiques internes au réseau des professionnels de la ville. Si le quartier de l’Étang est, dans l’ensemble, celui de tous les superlatifs (vertueux, rapide, innovant, mobilisant des moyens importants…), il n’en demeure pas moins que quelques témoins rencontrés regrettent cette belle unanimité qui empêche de penser les grands enjeux financiers. Ces témoins déplorent que l’opinion publique ne s’attache pas plus aux coûts pour la collectivité du projet (« 1,2 milliard financés par le privé… seulement 120 millions pour la Commune… qui demandera sans doute l’aide du canton, surtout pour désenclaver ce site “merveilleux”… moyennant creusement de tunnel, élargissement de sous-voies et construction de passerelles… payés par l’État et la Confédération » – un acteur des luttes urbaines genevoises). Ils se montrent également plus circonspects quant à la supposée qualité de l’architecture qui s’y prépare. Si certains ont déploré, en leur temps, « le sururbanisme décontextualisé façon grand Rem [Koohlaas], nous avons la variante petit Dominique [Perrault] », nous a expliqué un acteur des luttes urbaines genevoises.

Dans le même ordre d’idées, quand on questionne des praticiens en activité sur l’arc lémanique sur des exemples de réalisations qui correspondent au qualificatif bling-bling, ceux-ci répondent parfois : « Uni Carl-Vogt et Saint-Georges Center… Japan Tobacco International… Enfin ça dépend ce que tu entends… Les tours qui ponctuent l’Étoile et chaque pointe du PAV c’est assez bling-bling et convenu… Façon branding ! » (un architecte libéral). Ce qui caractérise pour eux une architecture bling-bling tient souvent des impacts paysagers des formes architecturales. Soit que l’objet contrevienne au sens du contexte, soit que les nouveaux gabarits rompent le velum de la ville, l’homogénéité d’une hauteur de corniche qui fait la « qualité du paysage genevois » (un architecte libéral). Ces « controverses », notamment paysagères, permettent d’envisager les enjeux plus profonds de l’ostentation (fût-elle discrète) en tant que nouveau principe de composition urbaine.

Il se pourrait en effet que ce qui s’esquisse dans les développements en cours corresponde à un temps de refondation urbaine, au sens d’André Corboz (1992). Car, la discrète ostentation, occasionnée par la volonté des nouveaux acteurs du financement de la production urbaine de signifier une nouvelle ère urbaine, renvoie ainsi à la question plus ample de l’empaysagement (Debarbieux, 2007), soit un processus de territorialisation du social au moyen d’un contrôle du paysage. Lefebvre rappelait, en son temps, que la ville est une projection au sol de rapports sociaux. Cette projection est médiatisée par des règlements d’urbanisme, des pratiques professionnelles et une capacité à financer sa production.

Du bon usage des catégories floues

À défaut d’être un concept, la ville bling-bling est une catégorie d’analyse suffisamment vague pour rendre compte des transformations au long cours de la production urbaine. Un nouvel art de faire la ville se constitue et s’institue depuis un peu plus d’une vingtaine d’années, qui fait converger de nouveaux principes d’urbanisme, une nouvelle manière de piloter le développement urbain et, enfin, une nouvelle manière de financer la fabrique au sens le plus littéral de la ville. Nous avons appelé cet art nouveau l’urbanisme flexible. Cet urbanisme flexible mobilise un art consommé de la communication. Il réinvente ce que Bernardo Secchi avait appelé le récit d’urbanisme pour en faire un urbanisme fictionnel (Matthey, 2011), un urbanisme qui est celui d’une société du spectacle (Matthey et al, 2013) soumise à l’impératif de l’excès sémiotique et tout empreinte d’une éthique du buzz.

Il s’agit d’enchanter la ville pour la rendre attractive, c’est-à-dire désirable, à un capital transnational ou indigène qui cherche des lieux où accroître sa rentabilité. Le marketing urbain participe amplement à cette économie de la désirabilité territoriale (Mager et Matthey, 2010). Mais les métropoles en concurrence ont besoin de réalisations un peu plus monumentales que ce que celles que peuvent produire des cabinets, seraient-ils prestigieux, de communication. L’architecture et sa vieille fonction emblématique prennent ici une importance considérable.

C’est à cette fonction emblématique que nous nous sommes intéressés, au moyen d’une illustration, celle du projet dit du quartier de l’Étang. Ce quartier offre en effet l’occasion de documenter les usages d’une rhétorique (verbale et iconographique) de la qualité architecturale, considérée comme une capacité à faire signe, mimer le changement, simuler la nouveauté. S’il connaît des débuts incertains, le quartier de l’Étang devient rapidement, pour une presse locale convertie aux vertus de la laudatio, un modèle de célérité, ainsi qu’un laboratoire par excellence d’un urbanisme vertueux (c’est-à-dire participatif, vert et producteur de densité, de mixité et de logements). L’irruption d’un architecte star (Dominique Perrault) favorise cette conversion imaginale. Mais l’architecte star n’apporte pas que son savoir-faire professionnel (au sens strict) et son capital symbolique. Il parvient à produire ce qu’Alfred Marshall appelait, dans un autre contexte, une atmosphère, le sentiment qu’un je-ne-sais-quoi de singulier se joue en ce lieu singulier du territoire genevois. Cette atmosphère se manifeste dans une architecture potentielle au sens où elle n’existe que sur des images de projet.

L’étrange attrait d’un bling-bling de papier, qui suscite la controverse tant parmi les architectes, urbanistes et activistes locaux, stimulera sans doute la créativité des architectes qui participeront aux concours à venir. Elle accroîtra l’intérêt des acheteurs et entrepreneurs susceptibles d’investir dans un quartier appelé à participer à un moment de refondation du territoire genevois. Du moins est-ce l’histoire que la discrète ostentation d’un avant-projet souhaite nous faire accroire.

CHRISTOPHE MAGER ET LAURENT MATTHEY

Christophe Mager est maître d’enseignement et de recherche à l’Institut de géographie et durabilité de l’Université de Lausanne. Ses travaux portent essentiellement sur l’écologie politique et l’économie institutionnelle. Contact : Christophe.Mager AT unil DOT ch

Laurent Matthey est professeur-assistant au Département de géographie et environnement de l’Université de Genève où il dirige le master en développement territorial. Ses travaux portent principalement sur les nouvelles modalités de l’urbanisme, singulièrement du point de vue du récit urbanistique et du storytelling urbain. Contact : Laurent.Matthey AT unige DOT ch

.

Couverture : Pont Hans-Wilsdorf à Genève (Gilardini, 2015)

.

Bibliographie

Appert M. et Montes C., 2015, « Skyscrapers and the redrawing of the London skyline : a case of territorialisation through landscape control », Articulo – Journal of Urban Research, Special issue n°7, en ligne.

Arribas-Bel D., Kourtit K. et Nijkamp P., 2016, « The sociocultural sources of urban buzz », Environment and Planning C : Government and Policy, Vol.34, n°1, 188‑204.

Ascher F., 2001, Les nouveaux principes de l’urbanisme. La fin des villes n’est pas à l’ordre du jour, Paris, L’Aube, 275 p.

Bailoni M., 2014, « La reconversion des territoires industriels par la culture dans les villes britanniques : un modèle en crise ? », Belgeo. Revue belge de géographie, n°1, en ligne.

Baker T. et Ruming K., 2015, « Making “Global Sydney” : Spatial Imaginaries, Worlding and Strategic Plans », International Journal of Urban and Regional Research, n°391, 62‑78.

Baraud-Serfaty I., 2005, « Capitales et capitaux : l’entreprise urbaniste ? », Urbanisme, n°345, 68-70.

Bodenschatz H., 2003, « New Urbanism and the European Perspective – Presumption, Rivalry or Challenge ? », in Krier R. (éd.), Town Spaces. Contemporary Interpretations in Traditional Urbanism, Bâle, Birkhäuser, 266-279.

Bourdieu P., 1979, La Distinction. Critique sociale du jugement, Paris, Minuit, 680 p.

Boyer R., 2015, Économie politique des capitalismes – Théorie de la régulation et des crises, Paris, La Découverte, coll. Grands Repères, 384 p.

Brand P., 2007, « Green Subjection : The Politics of Neoliberal Urban Environmental Management », International Journal of Urban and Regional Research, Vol.31, 3, 616‑632.

Brenner N., 2004, New state spaces : urban governance and the rescaling of statehood, Oxford et New York, Oxford University Press, 351 p.

Campagnac E. et Deffontaines G., 2012, « Une analyse socio-économique critique des PPP », Revue d’économie industrielle, n°140, 45‑79.

Corboz A., 1992, « La “Refondation” de Genève en 1830 (Dufour, Fazy, Rousseau) », Geneva, n°40, 55-85.

Corpataux J. et Crevoisier O., 2005, « Increased Capital Mobility/Liquidity and its Repercussions at Regional Level Some Lessons from the Experiences of Switzerland and the United Kingdom 1975–2000 », European Urban and Regional Studies, Vol.12, n°4, 315‑334.

Da Cunha A. et Guinand S., 2014, Qualité urbaine, justice spatiale et projet, Lausanne, Presses Polytechniques et Universitaires Romandes, 335 p.

Da Cunha A. et Matthey L., 2007, La ville et l’urbain : des savoirs émergents, Lausanne, Presses Polytechniques et Universitaires Romandes, 484 p.

Dansereau F., Aubrée L. et Divay G., 2005, Politiques et interventions en habitation : analyse des tendances récentes en Amérique du Nord et en Europe, Saint-Nicolas, Les Presses de l’Université Laval, 240 p.

David L. et Halbert L., 2010, « Chapitre 2. Logiques financières globales et fabrique de la ville », in Jacquet P., Pachauri R.K. et Tubiana L. (dirs), Regards sur la Terre 2010. L’annuel du développement durable – Villes, changer de trajectoire, Paris, Presses de Sciences Po, 90‑108.

Debarbieux B., 2007, « Actualité politique du paysage », Journal of Alpine Research | Revue de géographie alpine, Vol.95, n°4, 101‑114.

Devisme L., Dumont M. et Roy É., 2007, « Le jeu des “bonnes pratiques” dans les opérations urbaines, entre normes et fabrique locale », Espaces et sociétés, Vol.131, 4, 15-31.

Dewarrat J.-P., Quincerot R., Weil M. et Woeffray B., 2003, Paysages ordinaires : de la protection au projet, Sprimont, Mardaga, 95 p.

Ernwein M., 2015, Jardiner la ville néolibérale : la fabrique urbaine de la nature, Thèse de doctorat en géographie, Université de Genève, 569 p., en ligne.

Fields, D. et Uffer S., 2014, « The financialisation of rental housing : A comparative analysis of New York City and Berlin », Urban Studies, Special issue, 1-17.

Fromonot F., 2011, « Manière de classer l’urbanisme », Criticat, n°8, 41-61.

Fur É.L., 2006, « Panorama des fonds immobiliers dans le monde », Management et Avenir, Vol.8, 2, 87‑116.

Gaillard D. et Matthey L., 2011, « La norme et le label. Production de la norme et logiques d’hybridation dans la fabrique de la ville durable : le cas des écoquartiers », Lieux communs : les cahiers du LAUA, 14, 113-129.

Gospodini A., 2002, « European Cities in Competition and the New Uses of Urban Design », Journal of Urban Design, Vol.7, n°1, 59‑73.

Gotham K.F., 2009, « Creating Liquidity out of Spatial Fixity : The Secondary Circuit of Capital and the Subprime Mortgage Crisis », International Journal of Urban and Regional Research, Vol.33, 2, 355‑371.

Halbert L. et Le Goix R. (coord.), 2012, « La ville financiarisée », Urbanisme, n°384, 39-78.

Hall T. et Hubbard P., 1996, « The entrepreneurial city : new urban politics, new urban geographies ? », Progress in Human Geography, Vol.20, n°2, 153‑174.

Harvey D., 1989, « From Managerialism to Entrepreneurialism : The Transformation in Urban Governance in Late Capitalism », Geografiska Annaler. Series B, Human Geography, Vol.71, n°1, 3‑17.

Iossa E. et Martimort D., 2015, « The Simple Microeconomics of Public-Private Partnerships », Journal of Public Economic Theory, Vol.17, n°1, 4‑48.

Jackson J.B., 1986, Discovering the Vernacular Landscape, New Haven et Londres, Yale University Press, 192 p.

Jouve B., 2007, « Brenner Neil, New States Spaces. Urban Governance and the Rescaling of Statehood », Métropoles, Recensions, n°1, en ligne.

La Tribune de Genève, 2015, « À Vernier, le quartier de l’Étang a trouvé le moyen de construire vite », édition du 26 février, en ligne.

Lecoultre E., 2014, « L’Étang, le quartier supersonique », Le Courrier, édition du 10 juillet, 4.

Lo Ricco G. et Micheli S., 2003, Lo spettacolo dell’architettura. Profilo dell’archistar, Milan, B. Mondadori, 229 p.

Lorrain D., 2013, « L’industrie de la finance et la ville », M3 – Société urbaine et action publique, n°5, 80-85.

Mager C. et Matthey L., 2010, « Sages comme des images ? Le leurre du marketing urbain », Tracés, n°10, 10-12.

Marti P., 2005, L’architecte cantonal : un acteur réseau, Genève, Fondation Braillard Architectes, 17 p.

Marty F., Trosa S. et Voisin A., 2006, Les partenariats public-privé, Paris, La Découverte, coll. Repères, n°441, 128 p.

Matthey L. et Mager C., 2016, « La fabrique des urbanistes. Une identité professionnelle controversée ? », Cybergeo. European Journal of Geography, en ligne.

Matthey L., 2014a, « L’urbanisme qui vient », Cybergeo. European Journal of Geography, en ligne.

Matthey L., 2014b, Building up stories : sur l’action urbanistique à l’heure de la société du spectacle intégré, Genève, A-Type éditions, 157 p.

Matthey L., 2014c, « Le calme règne à Genève », Le Courrier, édition du vendredi 4 juillet, 3.

Matthey L., Mager C. et Gaillard D., 2012, Chronique d’une controverse annoncée. Le récit d’urbanisme à l’heure du développement urbain durable. Rapport intermédiaire de la recherche « Rat des champs, rat des villes. Quand le rural refonde l’urbain : une comparaison franco-suisse », PUCA–MEEDDAT, Programme interdisciplinaire Ville et environnement 2010, 26 p., en ligne.

Molina G., 2010, Les Faiseurs de ville et la littérature : lumières sur un star-system contemporain et ses discours publics. Des usages de la littérature au service de l’action des grands architectes-urbanistes, Thèse de doctorat en géographie-aménagement du territoire, Université de Toulouse, 969 p., en ligne.

Molina G., 2014, « Mise en scène et coulisses du star-system architectural : la théâtralisation des vedettes et ses paradoxes », Espaces et Sociétés, n°1, 197‑212.

Nappi-Choulet I., 2012, « Le logement, laissé-pour-compte de la financiarisation de l’immobilier », Esprit, Vol.1, 84‑95.

Nappi-Choulet I., 2013, « La financiarisation du marché immobilier français : de la crise des années 1990 à la crise des subprimes de 2008 », Revue d’économie financière, Vol.110, 2, 189‑206.

Oxford E., 2008, « Looking for the wow factor », The Times Higher Education, édition du 3 avril, en ligne.

Peck J., 2005, « Struggling with the Creative Class », International Journal of Urban and Regional Research, Vol.29, n°4, 740‑770.

Peck J., 2014, « Entrepreneurial Urbanism : Between Uncommon Sense and Dull Compulsion », Geografiska Annaler : Series B, Human Geography, Vol.96, n°4, 396‑401.

Reigner H., Brenac T. et Hernandez F., 2013, Nouvelles idéologies urbaines : dictionnaire critique de la ville mobile, verte et sûre, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 178 p.

République et canton de Genève, 2013a, Réformer l’outil PLQ pour retrouver l’envie d’inventer la ville, Communiqué de presse, Genève, 3 p.

République et canton de Genève, 2013b, 1500 logements au PAV : lancement du premier volet du concours investisseurs-architectes pour le site de la Caserne des Vernets, Communiqué de presse, Genève, 3 p.

République et canton de Genève, 2013c, Déposer une demande d’autorisation de construire, 4 Genève, Département de l’aménagement, du logement et de l’énergie, Genève, Direction des autorisations de construire, 4 p.

République et canton de Genève, 2015a, Rapport de présentation du Plan localisé de quartier N° 29 947, Genève, 5 p.

République et canton de Genève, 2015b, Treizième compte rendu de la commission d’urbanisme. Genève 2010-2014, Genève, Département de l’aménagement, du logement et de l’énergie, Office de l’urbanisme, 122 p.

RTS-Info, 2015, « Le projet de deux tours à Onex est sur le point d’aboutir », RTS-Régions, édition du 24 avril, en ligne.

Ruggiero L., 2010, Neoliberal urban policies and archistar system: landscape regeneration or production of alien scenarios? Présenté au 50e Congrès de la European Regional Science Association : « Sustainable Regional Growth and Development in the Creative Knowledge Economy », 19-23 août, Jönköping, Suède, en ligne.

Sager T., 2011, « Neo-liberal urban planning policies : A literature survey 1990–2010 », Progress in Planning, Vol.76, n°4, 147‑199.

Sheppard E., Leitner H. et Maringanti A., 2013, « Provincializing Global Urbanism : A Manifesto », Urban Geography, Vol.34, n°7, 893‑900.

Silver D. et Nichols Clark T., 2013, « Buzz as an Urban Resource », The Canadian Journal of Sociology/Cahiers Canadiens de Sociologie, Vol.38, n°1, 1-31.

Sklair L. 2013, « La ‘globalisation’ capitaliste et la classe capitaliste transnationale » in Caillé A. et Dufoix S. (éds), Le Tournant Global des Sciences Sociales, Paris, La Découverte, 237‑262.

Söderström O., 2000, Des images pour agir : le visuel en urbanisme, Lausanne, Payot, 139 p.

Theurillat T., 2011, « La ville négociée : entre financiarisation et durabilité », Géographie, économie, société, Vol.13, 3, 225‑254.

Theurillat T., 2014, « Le capital financier dans la ville en Suisse », Collage – Périodique d’urbanisme, d’aménagement et d’environnement, n°2, 11-15.

Theurillat T., Corpataux, J. et Crevoisier, O., 2010, « Property Sector Financialization : The Case of Swiss Pension Funds 1992–2005 », European Planning Studies, Vol.18, n°2, 189‑212.

Theurillat T., Rérat P. et Crevoisier O., 2014, « Les marchés immobiliers: acteurs, institutions et territoires », Géographie, économie, société, Vol.16, 2, 233‑254.

Thompson-Fawcett M., 2003, « A New Urbanist Diffusion Network : The Americo-European Connection », Built Environment, Vol.29, 3, 253‑270.

Trumbull N.S., 2003, « The impacts of globalization on St. Petersburg : A secondary world city in from the cold? », The Annals of Regional Science, Vol.37, n°3, 533‑546.

  1. Soit, pour les activités, les industries à haute technologie et les services à forte intensité en information et, pour les personnes, les classes moyennes et supérieures. []
  2. Si les PPP peuvent prendre de nombreuses formes, Iossa et Martimort en définissent trois caractéristiques transversales (2015). La première concerne le groupement des tâches (bundling), dans lequel les acteurs privés contribuent financièrement à la planification, à la construction et à la gestion d’un projet ; la propriété de l’infrastructure était, à la fin du contrat, soit conservée par le secteur privé soit transférée au secteur public. La deuxième caractéristique est relative au fait que le contractant est libre de sa gestion de l’infrastructure et de la façon dont le service sera délivré – sous réserve du respect de normes définies par les pouvoirs publics –, ce qui peut être assimilé à un transfert de risque. Le troisième aspect concerne la longue durée des contrats (typiquement de 20 à 35 ans) pendant laquelle les pouvoirs publics et/ou les usagers paient pour l’accès aux services. []
  3. Norman Forster, Frank Gehry, Herzog et de Meuron, Zaha Hadid – récemment disparue –, Jean Nouvel, etc. []
  4. Le projet dit de la Tour Triangle 2 des architectes Herzog et de Meuron, accepté par le Conseil de Paris le 30 juin 2015, s’inscrit, pour nous, dans cette stratégie. []
  5. Originellement destinée à accueillir un centre culturel et social, la parcelle a été vendue en 1992 au groupe financier néerlandais ING, qui en fit un immeuble de bureaux. []
  6. La question du logement est, depuis le début des années 2000, de plus en plus abordée au moyen d’un champ lexical qui est celui de l’urgence. La chambre genevoise immobilière lance ainsi un site intitulé Urgence logements, au tournant des années 2010. La presse rend régulièrement compte des supposés blocages et atermoiements genevois qui prétéritent la production de logements. La refonte de l’outil PLQ, la volonté du conseil d’État genevois (pouvoir exécutif) d’accélérer le rythme des grands projets genevois s’inscrit dans ce régime []
  7. « Architectes, révoltez-vous ! ». Formule prononcée par François Longchamp, alors Conseiller d’État en charge de l’urbanisme, en septembre 2013, devant une assemblée d’architectes. []
  8. Une demande de renseignement permet d’obtenir « un avis de l’administration sur un projet de plan d’affectation du sol, notamment une modification des limites de zone (MZ) ou d’un plan localisé de quartiers (PLQ) » (République et canton de Genève, 2013c : 2). []
  9. Une modification de zone permet de changer l’affectation du sol prévue dans le plan de zones. Les plans de modifications de zones sont adoptés par le Grand Conseil. Une fois entré en vigueur, ils ont force obligatoire pour chacun. []
  10. Coefficient d’occupation du sol, soit, dans sa définition officielle française, le rapport entre la surface de plancher et la superficie du terrain. []

Comments are closed.