#16 / Démocratisation de l’enseignement supérieur et production d’une « université de classes moyennes » : permanence ou recomposition des inégalités socio-territoriales ?

Julie Trémoureux

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La massification de l’enseignement supérieur au cours du XXe siècle transforme durablement le paysage universitaire français (Filâtre et Grossetti, 2003). Trois phases composent ce processus défini par l’accroissement des effectifs étudiants suivant les évolutions démographiques de la population. Dès les Trente Glorieuses, la nécessité de décongestionner les universités historiques dans les centres-villes des grandes métropoles participe au premier temps de la massification (Benhenda et Dufour, 2015). Les effectifs étudiants doublent et passent de 50 000 étudiants en 1920 à 97 000 en 1945 selon les chiffres du Ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation (MESRI). Cependant, seule une minorité de privilégiés est concernée, ce qui sera en partie à l’origine des évènements de Mai 68. La loi Faure de 1969 fait suite à la crise étudiante et incarne la deuxième phase du processus en encourageant la démocratisation de l’enseignement supérieur par l’autonomisation pédagogique et financière des établissements. Il ne s’agit plus de former uniquement l’élite de la population, héritière des classes sociales les plus favorisées (Bourdieu et Passeron, 1964), mais d’encourager l’inclusion de toutes les catégories socioprofessionnelles (PCS) et de former le plus grand nombre. Les universités recrutent de nouveaux profils étudiants et deviennent l’instrument d’une plus grande justice sociale (Neave, 1996). Dès lors, la notion de démocratisation remplace peu à peu le terme de massification et désigne la possibilité pour tous d’accéder à l’enseignement supérieur, soit sans distinction de classe ou de formation scolaire initiale. Les années 2000 marquent le début de la troisième phase du processus, avec une stagnation de la population universitaire1 à 2,3 % de la population française selon le MESRI, la mise en concurrence des universités et la création de grands pôles universitaires (Benhenda et Dufour, 2015).

La « démocratisation de l’enseignement » est un objet polysémique qui se décline selon les liens établis entre la hausse des effectifs étudiants et la capacité de l’université à contribuer à une réduction des inégalités. La démocratisation « quantitative » se distingue de la démocratisation « qualitative » (Prost, 1992). La première définit l’ouverture des études au plus large public possible, suivant les directives fixées par les politiques publiques des années 1980 de conduire 80 % d’une classe d’âge au niveau du baccalauréat. En 1985, la proportion de bacheliers dans une génération était de 29 %, contre 87 % en 2020 selon l’INSEE. Toutefois, cette démocratisation quantitative ne supprime pas les inégalités d’origine sociale, elle les déplace. En effet, les taux de réussite au baccalauréat ont été gonflés par une orientation massive vers les filières professionnelles, qui n’offrent pas les mêmes débouchés post-bac que les filières générales. La démocratisation qualitative, vient en complément et désigne la volonté de rendre le destin scolaire des étudiants moins dépendant de leur origine sociale (Albouy et Wanecq, 2003). Les divers travaux et modalités d’analyse des inégalités sociales dans le milieu scolaire tendent à nuancer ce phénomène. Les inégalités perdurent à certains niveaux de diplômes et de formations spécifiques, ce qui amène à l’observation d’une démocratisation « ségrégative » (Merle, 2012).

Cet article examine la notion de démocratisation de l’enseignement et cherche à rendre compte de ses recompositions au prisme des universités de proximité, aussi nommées « sites universitaires de ville moyenne ». Ces établissements se développent dans les années 1960-70, sous l’impulsion de l’État et à l’aide des collectivités locales qui les financent. Ils maillent le territoire et proposent un nouvel accès à l’enseignement pour les étudiants les moins mobiles (Kamanzi et al., 2017). Ils se distinguent également des universités historiques monumentales de centre-ville et proposent les premiers modèles de campus « à la française » avec le regroupement des facultés, des résidences étudiantes et des équipements de loisir dans un espace unique souvent situé à la périphérie des villes (Hottin, 1999). On peut y lire les traces d’un urbanisme fonctionnaliste typique des années 1970, tant sur le principe du campus que dans les formes architecturales. À noter que l’agencement et l’emplacement de l’établissement jouent un rôle non neutre dans le rapport des individus aux conditions d’études en impliquant une acculturation urbaine différenciée, selon la fréquentation d’une université de centre-ville ou de périphérie (Hottin, 2004).

La transformation du paysage universitaire depuis les années 1960-70 interroge des effets de contexte et d’établissement sur les parcours étudiants, d’autant plus que les origines sociales ne sont pas les seules causes des inégalités face à la poursuite d’étude (Beaud, 2003 ; Convert, 2003 ; Felouzis, 2003). La dimension spatiale des inégalités d’accès à l’enseignement supérieur se manifeste à plus forte raison que les nouveaux pôles universitaires se déploient. Elle réinterroge, via un nouveau prisme, le lien entre origine sociale et parcours scolaire (Faure, 2009). Le recrutement local de populations peu mobiles et peu familiarisées avec l’enseignement supérieur avant les années 1960 dessine-t-il un profil d’étudiant spécifique ? En effet, la démocratisation de l’enseignement engagée avec l’ouverture des universités de proximité questionne la production de nouvelles formes d’élitisme et de ségrégation via une géographie des universités qui serait inégalitaire. L’article cherche donc à identifier les contributions des sites universitaires de villes moyennes à la démocratisation, entendue dans sa polysémie, de l’enseignement supérieur à partir de l’exemple local du Mans Université.

1. Localisation du campus du Mans en périphérie de l’enveloppe urbaine mancelle (Trémoureux, 2021)

2. Principaux bâtiments du campus manceau de Le Mans Université (Trémoureux, 2021)

Née en 1977 et composée d’un campus principal au Mans en Sarthe (72) et d’une antenne lavalloise en Mayenne (53), Le Mans Université accueille 12 754 étudiants en septembre 2020 dont 300 à Laval, selon les chiffres fournis par l’établissement. L’étude se concentre essentiellement sur le pôle manceau, qui présente toutes les caractéristiques des sites universitaires de ville moyenne. Il concentre les structures nécessaires au suivi des études dans un unique espace, excentré et situé au-delà de la rocade encerclant la ville et délimitant approximativement les contours de l’enveloppe urbaine. Son architecture en béton, standardisée et imposante, est typique des années 1970-80. Concernant sa localisation, Le Mans Université doit trouver une place et un public dans un territoire encerclé d’universités historiques nées sous l’Ancien Régime, telles que l’université de Paris (1257), d’Orléans (1305), d’Angers (1337), de Caen (1432) ou encore celle de Rennes (1735). L’objectif est donc d’étudier les effets de la proximité géographique d’une université de province sur l’orientation post-secondaire des étudiants. Le texte propose d’analyser un objet institutionnel issu de la seconde phase du processus de massification et encore peu saisi par la littérature, contrairement aux universités nouvelles franciliennes issues de la première phase (Baron et Berroir, 2007).

L’article explore le vécu étudiant de Le Mans Université en s’appuyant sur les données issues des résultats d’une enquête quantitative (questionnaire diffusé en ligne) sur la vie et les pratiques des néo-étudiants de Le Mans Université. 515 individus composent l’échantillon des étudiants manceaux ayant répondu à l’« Enquête Vie et Pratiques des Étudiants de Le Mans Université » (EVEPE2) durant leur première année de licence en 2019-2020, ce qui représente 25 % de la cohorte chiffrée à 1 992 étudiants. À noter que l’échantillon des répondants est plutôt représentatif de l’ensemble de la cohorte, bien que les étudiants issus de Bacs technologiques, professionnels ou de diplômes équivalents au Bac échappent davantage à l’enquête que les Bacs généraux. La cohorte compte 13,5 % de Bacs technologiques, 6,7 % de Bac professionnels et 7,2 % d’équivalence au Bac (selon les chiffres APOGÉE3), contre 7,7 % de Bac technologiques, 2,6 % de professionnels et 1,2 % d’équivalence pour l’échantillon. De la même façon, les diplômés du Baccalauréat avec mention sont surreprésentés vis-à-vis des diplômés sans mention. La démonstration qui suit admet donc un biais. Les enquêtes relevant du volontariat, les réponses des étudiants originaires de Bacs généraux et ayant obtenu une mention au Bac seront davantage représentés4. En confrontant des connaissances théoriques sur les universités de proximité et leur développement au cours du XXe siècle à des données récentes, l’intérêt est de décrypter l’état actuel des inégalités dans une structure institutionnelle dont l’objectif établi dans les années 1960-70 était de les réduire.

Essoufflement d’une démocratisation universitaire : le cas de Le Mans Université

Dans un premier temps, l’observation des effets de la proximité géographique à différents niveaux et l’analyse de leurs impacts sur l’orientation post-secondaire à Le Mans Université doit permettre d’estimer le type de démocratisation admis par un site universitaire de ville moyenne. Ainsi, les tensions liées aux effets d’établissement, de classe sociale et de formation tendent à constituer un public qui n’était traditionnellement pas familier de cette institution.

Le recrutement local témoin d’une démocratisation « quantitative »

Les résultats d’un questionnaire diffusé en ligne, auprès des étudiants inscrits en première année de licence en 2019-2020, permettent de caractériser le bassin universitaire manceau et d’identifier son public dans les limites de validité du questionnaire et de l’échantillon réuni. Le département de déclaration de l’adresse parentale fournit une mesure du recrutement géographique pour Le Mans Université et la provenance des étudiants en souligne le caractère local. Les néo-inscrits en septembre 2019 sont majoritairement Sarthois puisqu’ils représentent deux tiers de l’échantillon (66 %). En dehors du département d’implantation de l’établissement, le recrutement est important dans la couronne des départements limitrophes (19 %). Sur les 15 % restant parmi les répondants, 5 % sont d’origine étrangère tandis que les autres viennent d’autres régions que les Pays de la Loire. Si Le Mans Université réussit dans une certaine mesure à capter des étudiants bretons, normands, centrais, ou encore franciliens, la proximité géographique de grandes métropoles capitale (Paris) ou capitales de région (Rennes, Nantes) et de leurs universités historiques n’induit pas de report d’effectifs étudiants sur Le Mans Université. En effet, l’établissement ne capte quasiment pas les étudiants des grandes métropoles et le caractère local de son public souligne l’influence du contexte territorial dans le rayonnement de l’établissement. Le pôle de proximité manceau s’inscrit dans une logique de rééquilibrage en proposant un établissement proche du lieu de résidence favorisant la poursuite d’étude (Felouzis, 2003 ; Bernet, 2009). Comme l’indique la DATAR en 1998, « l’ouverture de formation en villes moyennes renforce considérablement le recrutement de proximité » (DATAR : 55). Diversifier l’offre de formation par l’ouverture de nouveaux départements, voire de nouveaux établissements, et favoriser le recrutement social des étudiants est également un objectif établi par le plan Université 2000 arrêté en conseil des ministres en mai 1990.

Pour autant, le choix de la proximité dans la décision de poursuivre les études dans une formation mancelle est très peu mentionné dans le discours étudiant. Si l’EVEPE 2019-2020 n’interrogeait pas directement le choix de l’établissement, les étudiants avaient la possibilité de classer différentes modalités pour expliquer le choix de leur formation5. L’adéquation avec le projet professionnel arrive au premier rang pour 55 % d’entre eux. Ils ne sont que 5 % à classer la proximité géographique de l’université au rang 16. De ce constat, il est possible de dresser une première hypothèse. La concordance entre le choix des formations et les projets professionnels révèlerait le côté émancipateur de Le Mans Université. Il n’est pas nécessaire de s’orienter vers une autre ville pour poursuivre des études supérieures, ce qui élimine aussi les surcoûts que pourrait engendrer l’éloignement à la formation (Baron, 2010)7.

Dans le discours, le choix de la formation est indépendant de la proximité à l’établissement. Dans les faits, ce sont bien 67 % des primo-arrivants en L1 en 2019 qui résident en Sarthe selon l’EVEPE. Cette discordance amène à formuler une seconde hypothèse, autour d’un recrutement local spécifique aux universités de proximité. La carte ci-dessous (voir fig. 3) vient étayer cette proposition en comparant le poids du recrutement local dans les régions Pays-de-la-Loire et Bretagne8. Les établissements ouverts dans les années 1960-70 (Le Mans Université, Université de Bretagne Sud à Lorient et l’Université de Bretagne Occidentale à Brest) recrutent, pour moitié et plus, des étudiants ayant obtenu leur Baccalauréat dans le même département que l’université d’inscription. C’est 47 % des effectifs pour Lorient, 50 % pour Le Mans et 57 % pour Brest. Cette part ne concerne plus qu’un tiers des effectifs pour les universités historiques de Rennes 1 et 2 (1735) ainsi que pour l’Université d’Angers (1337). À noter que Nantes Université, malgré son caractère historique, possède également un fort recrutement local (48 %). L’absence de données supplémentaires ne permet pas d’investiguer cette observation mais elle n’invalide pas non plus l’analyse du caractère local du recrutement des universités de proximité. En poussant davantage la réflexion, il est permis de s’interroger sur la production d’un profil d’étudiant spécifique aux universités de proximité, reposant sur les caractéristiques du contexte territorial de l’établissement.

3. Origine géographique des étudiants de Bretagne et Pays-de-la-Loire à la rentrée 2019 (Trémoureux, 2022)

La démocratisation « qualitative » freinée par des inégalités socio-territoriales persistantes

L’étude de la structure des professions et catégories socioprofessionnelles (PCS) des parents de la population estudiantine de Le Mans Université est révélatrice d’inégalités d’accès à l’enseignement supérieur persistantes, malgré la hausse des effectifs étudiants depuis l’ouverture de l’établissement manceau. Ils sont 2 691 étudiants en 1972, 8 062 en 2000, et 12 754 à la rentrée 2020. En effet, l’inégal accès à l’enseignement supérieur est tout à la fois d’origine spatiale et sociale (Beaud, 2003 ; Felouzis, 2003 ; Frouillou, 2014). Pour autant, les caractéristiques sociales des étudiants recrutés à Le Mans Université tendent à valider l’hypothèse que les universités de proximité, en recrutant localement, favorisent l’accès à l’enseignement supérieur d’une population peu familière de cet environnement institutionnel.

Contrairement au public traditionnel de l’enseignement supérieur issu des PCS les plus favorisées, ce sont les catégories moyennes (agriculteurs, artisans, commerçants, chefs d’entreprise et professions intermédiaires) et les employés qui sont les plus représentées (respectivement 30 % et 34 %) à Le Mans Université, selon la base APOGÉE (2019). Les employés sont même surreprésentés vis-à-vis des chiffres de l’Observatoire de la vie étudiante (OVE) portant sur l’ensemble des effectifs étudiants, tandis que les PCS les plus favorisées (cadres et professions intellectuelles supérieures) sont légèrement sous-représentées. À l’échelle nationale, seulement 14 % des parents des étudiants sont employés, contre un tiers au Mans (34 %). Les parents cadres ou exerçant une profession intellectuelle supérieure sont 32 % à l’échelle nationale contre 29 % pour Le Mans Université. Les origines sociales des étudiants manceaux concordent globalement avec la structure sociale de la population du territoire (la Sarthe), ce qui explique en partie cette surreprésentation d’étudiants originaires des PCS moyennes et employées. Le choix explicite de la proximité est encore plus révélateur de l’accès favorisé aux études supérieures pour les étudiants recrutés localement. Il diminue plus les PCS d’origines sont favorisées. Presque la moitié des enfants d’ouvriers citent la proximité comme explication au choix de l’université (46,6 %) contre environ un quart pour les enfants de cadres et professions intellectuelles supérieures (24,6 %), les professions intermédiaires (23,7 %) et les employés (24,6 %). De plus, ce sont tout de même 46 % des étudiants enquêtés qui ont des parents ayant un niveau de diplôme inférieur ou équivalent au Baccalauréat. Il est donc possible d’émettre l’hypothèse selon laquelle la présence d’un établissement de proximité favorise la poursuite d’étude au-delà du parcours académique parental et par extension la mobilité sociale intergénérationnelle par l’ascension professionnelle (Mendras, 1988). Autrement dit, l’ouverture d’une université de proximité en Sarthe dans les années 1970 donnerait accès aux études à des publics qui n’en n’étaient pas familiers et participerait ainsi à la démocratisation qualitative de l’enseignement.

Si l’accès à l’enseignement dépend de moins en moins de l’origine socio-spatiale des étudiants, la surreprésentation des étudiants sarthois dont les parents sont issus des PCS moyennes et employés (64 % des étudiants concernés) vis-à-vis de leur proportion à l’échelle nationale (49 %) interroge une possible recomposition des inégalités à plus grande échelle. Les universités de proximité peuvent très vite apparaître comme des établissements de « seconde zone » par rapport à des universités historiques. Porter l’analyse à l’échelle nationale c’est admettre l’hypothèse d’une nouvelle forme d’élitisme de la géographie universitaire, qui viendrait nuancer le processus de démocratisation qualitative. Le destin scolaire reste en partie orienté par les contextes socio-spatiaux dans lesquelles évoluent les étudiants. Les PCS les moins favorisées ont tendance à choisir l’établissement de proximité faute de posséder le capital suffisant (social, budgétaire, mobile) pour faire le choix de la distance (Bourdon et al., 1994). La démocratisation de l’enseignement doit composer avec des inégalités fabriquées en amont du recrutement étudiant. Les inégalités semblent plus persistantes dans la PCS ouvrière, qui reste encore largement sous-représentée à Le Mans Université (6,3 % des étudiants sont issus de cette PCS), et cela malgré une proportion importante d’ouvriers en Sarthe (28,7 %), face aux chiffres de la région Pays de la Loire (25 %) et encore plus du pays (12,7 %). La démocratisation ne semble pas profiter pleinement à cette PCS en particulier, comme indiqué sur le graphique suivant (fig. 4) qui reprend les chiffres de l’INSEE (2018).

4. Répartition (en %) de la population active sarthoise et estudiantine de LMU par PCS (Trémoureux, 2021)

La démocratisation quantitative de l’enseignement supérieur profite avant tout aux étudiants issus des PCS moyennes et employés, ce qui permet aussi une démocratisation qualitative, certes imparfaite, à l’échelle locale. Cela amène à s’interroger sur la production d’une université de classes moyennes via le développement des pôles de proximité au recrutement local.

La « moyennisation » de l’enseignement supérieur dans les universités de proximité

Cette partie interroge la production d’une université de classes moyennes en appliquant au monde universitaire la thèse d’Henri Mendras sur le processus de « moyennisation » des classes sociales (1988) durant la période qui a suivi celle des Trente Glorieuses. Dans son ouvrage, La seconde révolution française (1965-1984), Mendras fait état d’un processus de constitution d’une large classe moyenne, non homogène (et donc plurielle), mais aux modes et niveaux de vie de plus en plus similaires. Le décryptage des profils étudiants manceaux permet de dresser des parallèles entre la thèse de l’auteur et le monde universitaire depuis sa démocratisation, entendue dans sa polysémie. Les données concernant Le Mans Université n’étant pas longitudinales, il faut garder à l’esprit que la comparaison se fera avec un constat dressé à un instant « t » de l’expérience étudiante. Il sera néanmoins possible d’identifier des similitudes entre la société issue du processus de « moyennisation » décrite par Mendras et le monde étudiant.

La « moyennisation » comme conséquence d’une démocratisation « ségrégative » ?

L’ouverture d’une université de proximité au Mans a permis une démocratisation quantitative et qualitative de l’accès à l’enseignement supérieur en Sarthe, en accueillant plus largement un nouveau profil d’étudiants issus des PCS moyennes et employés. Pourtant, les inégalités persistent et se recomposent au sein même de l’université. La démocratisation s’en trouve nuancée. Laurence Faure (2009) fait le constat d’une démocratisation « ségrégative », dont l’intensité varie selon les formations. L’inscription dans les disciplines universitaires n’est pas indépendante de l’origine sociale et son analyse participe à la lecture du processus de démocratisation sociale de l’accès aux études supérieures (fig. 5).

5. Orientation post-secondaire (en %) selon la PCS des parents à l’échelle du territoire national (OVE) et de l’établissement manceau (LMU) (Trémoureux, 2021)

Les chiffres de l’OVE soulignent la supériorité numérique des cadres et professions intellectuelles supérieures dans les effectifs étudiants à l’échelle nationale, ce qui ne se vérifie pas à Le Mans Université. Les enfants d’employés sont surreprésentés dans les UFR Sciences et Techniques (ST) et Lettres Langues et Sciences Humaines (LLSH) et constituent environ un tiers des effectifs de ces UFR, tandis que les proportions nationales les estiment respectivement à un sixième en 2016 selon l’OVE. La sous-représentation des enfants de cadres dans ces filières, vis-à-vis de la proportion d’étudiants issus de la PCS employés, indique un report de leurs inscriptions dans d’autres établissements. On peut faire l’hypothèse du choix des grandes métropoles de l’Ouest français, voire d’une stratégie d’évitement de l’établissement de proximité. La filière Droit Economie Gestion (DEG) reste clivée socialement, avec une part importante des cadres pour le pôle manceau (34,9 %), tandis que les disciplines en ST et LLSH se démocratisent davantage. Le tableau indique la prégnance d’une origine de classes moyennes pour les étudiants de ces deux UFR, avec un tiers des effectifs issus des PCS employés pour la filière ST et presque 50 % pour la filière LLSH.

La répartition des PCS varie selon les formations et contribue à dessiner les contours d’une démocratisation « ségrégative », comme un travers de la démocratisation qualitative. Une des conséquences de cette démocratisation « ségrégative » est la production de cette université de classes moyennes à l’échelle mancelle, qui ne se retrouve pas à l’échelle nationale. Un raisonnement plus poussé inviterait sans doute à constater des situations similaires dans d’autres universités de proximité, ce qui tendrait à constituer une vaste classe étudiante d’origines moyennes et inférieures, soit une des caractéristiques majeures de la « moyennisation » selon Mendras.

Caractéristiques de la classe moyenne étudiante : des profils types d’« étudiants de la proximité »

L’université de proximité semble contribuer au développement d’une vaste classe moyenne étudiante dont il s’agit maintenant de saisir les principales caractéristiques, toujours à travers l’étude de cas mancelle.

Le Mans Université se caractérise entre autres par une proportion importante d’étudiants cohabitants, qui vivent encore chez leurs parents, puisqu’ils constituent 70 % des enquêtés, contre seulement un tiers (33 %) à l’échelle nationale en 2020 selon l’OVE. En déchargeant les étudiants du coût du logement et en offrant les conditions matérielles de la vie familiale optimales à la réussite des études (Grignon et Gruel, 1999), la cohabitation semble favoriser la poursuite d’études pour les étudiants de la proximité, soit inscrits dans un pôle de proximité, qui sont peu nombreux à connaître une autonomie résidentielle. Ils sont d’autant moins nombreux à bénéficier de cette autonomie résidentielle que l’on descend le classement des PCS. Ce sont près de 90 % des étudiants issus de la PCS ouvrière qui vivent encore chez leurs parents, contre 70 % pour ceux originaires des PCS moyennes et supérieures. De plus, au Mans, 63 % des étudiants issus des PCS employés et ouvriers sont cohabitants, contre seulement 38 % à l’échelle nationale. Ces chiffres interrogent l’existence d’une possible assignation à résidence plus forte à Le Mans Université, et sans doute pour ce type d’établissement de ville moyenne en général, qu’à l’échelle nationale. Les étudiants de la proximité entameront plus tard dans leur cursus l’expérimentation et l’apprentissage de l’autonomie (Gaviria, 2001 et Van De Velde, 2008). Selon Alain Coulon (1997), ce sont deux éléments qui participent à l’acquisition des compétences nécessaires pour répondre aux attentes de l’enseignement supérieur. En effet, il établit un lien entre l’autonomisation des primo-arrivants à l’université et leur accès au « métier d’étudiant », qui passe, entre autres, par un détachement physique du domicile parental9. À noter que le statut de cohabitant peut relever d’une conséquence indésirée d’un manque de mobilité, comme d’un choix délibéré visant à réduire les surcoûts de l’éloignement à la famille. Les données disponibles pour Le Mans Université ne permettent pas de distinguer la qualité plus ou moins désirée du statut dans le domicile. En revanche, elles nous donnent un aperçu de l’expérience citadine des étudiants selon ce statut. Ainsi, les étudiants décohabitants auront sans doute plus de facilité à faire l’expérience de la vie étudiante urbaine, puisque 71 % d’entre eux habitent la ville du Mans, contre seulement 32 % des cohabitants.

Deux profils d’étudiants se dégagent quand on s’intéresse à leur lieu de résidence. D’une part, il y a les étudiants résidant au Mans, soit directement dans la ville d’étude (44 % des enquêtés), d’autre part, il y a les étudiants qui résident dans le département de l’établissement (la Sarthe) hors de la ville d’étude (38 % des enquêtés). Les 18 % restant résident dans les départements limitrophes, notamment l’Orne et la Mayenne. La part des étudiants issus de PCS cadres et professions intellectuelles supérieures est plus importante chez les étudiants de la ville (27 %) que les étudiants de la périphérie (22 %) davantage issus de la PCS employés (37 %). La PCS ouvrière est également surreprésentée dans la périphérie (7,7 % contre 4,3 % en ville). Les PCS les plus favorisées étant aussi les plus citadines, l’origine sociale doublée du lieu de résidence impactent-ils l’expérience que les étudiants font de leur ville d’étude ? On est effectivement en droit de s’attendre à des pratiques différenciées et pourtant ce n’est pas ce qu’indiquent les résultats de l’EVEPE 2019-2020. Il est notable que les étudiants de la périphérie sont proportionnellement plus nombreux à ne jamais se rendre en centre-ville ou rarement (42 %) que les étudiants citadins (35 %). Pourtant, le détail des espaces fréquentés par les étudiants, selon leur lieu de résidence et leur PCS d’origine, indique des pratiques quasi similaires (voir le tableau ci-dessous) et permet de constater que la sociabilité d’une grande majorité d’étudiants (indifféremment du facteur résidentiel) s’intègre davantage dans les loisirs et la consommation (café, commerces, cinémas) que dans la culture (concert et théâtre, exposition, médiathèque).

6. Fréquentation (en %) de la ville du Mans selon le lieu de résidence et la PCS des étudiants. Données issues de l’EVEPE 2019-2020 (Trémoureux, 2021)

L’homogénéité des pratiques étudiantes rejoint l’un des principaux constats de Mendras à propos de la « moyennisation » de la société, selon lequel la construction d’une vaste classe moyenne passe par l’homogénéisation des comportements, des pratiques et des styles de vie à travers la diffusion des biens de consommation courants et culturels d’une part et la généralisation des loisirs d’autre part. De la même façon, dans le monde universitaire, on observe des pratiques étudiantes homogènes, sans doute parce que l’effet d’âge prévaut sur l’effet de classe ou de lieu de résidence. La convergence des modes de vie est l’un des facteurs clés de la « moyennisation », il s’accompagnerait par ailleurs de nouvelles valeurs communes à une classe sociale. C’est pourquoi, dans une perspective de prolongement de cette étude, il serait intéressant de poursuivre la réflexion par l’analyse des discours étudiants, afin d’identifier ou non l’existence de ces valeurs communes.

Tout comme Mendras refuse d’évoquer une classe moyenne au singulier, en estimant que le pluriel permet de prendre en compte l’hétérogénéité des situations, les profils étudiants de la proximité ne peuvent pas se résumer à un profil type. Le statut dans le logement, le lieu de résidence mais aussi les perceptions de la vie étudiantes tracent les contours de plusieurs grands types d’étudiants. La principale différence entre ces profils tient à leur perception de la vie étudiante. Il est intéressant de constater que les résidents de la périphérie issus de PCS moins favorisées sont proportionnellement plus positifs quand il s’agit de s’exprimer à propos de la vie étudiante. En effet, ils sont 60 % parmi les étudiants les moins favorisés de la périphérie à employer un terme positif pour décrire leur vie étudiante (« agréable », « satisfaisante », « plaisante », « excitante » …10), contre 48 % pour les étudiants citadins issus des PCS favorisées, plus neutres dans leur discours (« routine », « travail », « simple », « normale » …), mais aussi moins stressés vis-à-vis de leurs études. 22 % d’entre eux estiment que se rendre à l’université est une source de stress, contre 37 % pour les premiers. Les étudiants les moins favorisés, souvent localisés en périphérie, expriment davantage leur reconnaissance de l’accès à l’enseignement supérieur en associant la vie étudiante à des termes positifs. Toutefois, comme l’ont évoqué Le Pape et Tenret dans leur étude « Solidarités familiales et conditions de vie étudiante : des disparités objectives aux inégalités perçues. » (2016), ces étudiants sont également soumis à plus de pression quant à la nécessité de réussir. C’est pourquoi la scolarité est également associée à une importante source de stress. Ce n’est pas le cas des étudiants des PCS les plus favorisés dont la crainte de l’échec est atténuée par la sécurité du cadre familial. Le parallèle avec la thèse de Mendras peut de nouveau être évoqué du point de vue de la démocratisation de l’accès à l’enseignement supérieur, comme moyen d’ascension sociale. L’auteur souligne que, dans le processus de « moyennisation » de la société, la mobilité sociale intergénérationnelle croissante est liée au développement de l’accès à l’école, d’où les attentes considérables à son égard.

Conclusion

L’exemple local de Le Mans Université ne permet pas d’identifier les contributions des universités de proximité en général au processus de démocratisation de l’enseignement supérieur, entendu dans toute sa polysémie. Néanmoins, cette étude sarthoise permet de discuter l’hypothèse d’une « moyennisation » de l’université de proximité, reposant sur un recrutement local. Cette « moyennisation » peut être perçue comme un travers, car conséquence d’une démocratisation « ségrégative » inégalitaire, ou comme un succès du processus de démocratisation quantitative qui a favorisé l’accès des étudiants les moins mobiles, souvent issus des PCS moyennes et inférieures, aux études supérieures.

L’étude des données récentes permet effectivement de faire l’état des inégalités actuelles. Le cas manceau souligne ainsi la recomposition des inégalités d’accès à l’enseignement supérieur, avec des destins scolaires qui semblent moins soumis aux effets de classe sociale, de résidence et de formation. La perception des conditions de vie des étudiants inscrits à Le Mans Université, associée à leurs caractéristiques socio-territoriales, semblent également dessiner les contours de plusieurs profils types d’étudiant de la proximité. L’analyse des données a permis de constater chez ces différents profils étudiants des comportements et modes de vie similaires, ainsi que l’accès à une plus grande mobilité sociale pour un certain nombre d’entre eux. Ajouter à cela l’accroissement des effectifs, issus en grande majorité des PCS moyennes et inférieures, depuis la création de l’université, la population étudiante mancelle semble remplir toutes les conditions de la thèse de la « moyennisation » selon Mendras. L’actuelle « moyennisation » de l’université de proximité fait échos à cette thèse ancienne, dans le secteur de l’enseignement supérieur.

À noter que Mendras n’affirme pas la stabilité du phénomène de « moyennisation » de la société. De même, dans son ouvrage Le capital au XXIème siècle (2013), Thomas Piketty évoque le déclin des inégalités à la suite des Trente Glorieuses comme un « accident » lié à un concours de circonstances (dû à la guerre, l’impôt progressif, la crise de 1929, la vigueur des luttes sociales et la révolution néo-libérale). C’est pourquoi, ces dernières décennies, nous assisterions à une nouvelle polarisation de la société. La moyennisation n’est pas un phénomène sans heurts ni stable et sa contribution à la réduction des inégalités est questionnable. Il est donc également permis de s’interroger sur la pérennité de cette nouvelle université de classes moyennes. D’autant plus que la tendance actuelle est à l’autonomisation et à la mise en concurrence des universités, ce qui pourrait hypothétiquement accentuer l’élitisme du recrutement des universités et conduire au renouvellement des inégalités d’accès à l’enseignement supérieur.

JULIE TREMOUREUX

Julie Trémoureux réalise une thèse de doctorat en géographie sociale à Le Mans Université, sur le concept de la réussite étudiante en cycle de licence. Ses axes de recherche sont la démocratisation de l’enseignement supérieur, les innovations pédagogiques en contexte universitaire, la condition et les parcours étudiants. Ses travaux de thèse s’inscrivent dans une logique de mixed-method research, avec la volonté de créer un outil d’évaluation de la qualité du parcours étudiant, élaboré à partir du croisement de données qualitatives et quantitatives.

Julie.Tremoureux@univ-lemans.fr

Couverture : La maison de l’Université, Le Mans (Trémoureux, 2021)

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Sitographie

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Pour citer cet article : Trémoureux J., 2022, « Démocratisation de l’enseignement supérieur et production d’une “université de classes moyennes”, permanence ou recomposition des inégalités socio-territoriales ? », Urbanités, #16 / À l’école de la ville, septembre 2022, en ligne.

  1. Comprend uniquement les étudiants inscrits à l’université et en IUT. Les étudiants inscrits en CPGE et autres établissements de formation ne sont pas concernés. Dans les années 2000, la population étudiante totale (sans distinction d’établissements de formation) s’élève à 3,5 % de la population française. []
  2. Réalisée dans le cadre d’une thèse de doctorat, cette enquête porte le nom d’EVEPE « Enquête Vie Et Pratiques des Étudiants » pour distinguer les diffusions auprès des étudiants en première année de licence en 2019-2020, en seconde année en 2020-2021 et en dernière année avec le renouvellement de l’EVEPE n°3 en 2021-2022. []
  3. Application Pour l’Organisation et la Gestion des Étudiants et des Enseignements. Il s’agit d’un logiciel national de scolarité qui permet d’assurer la gestion et le suivi des dossiers étudiants. []
  4. Il convient également d’ajouter une mention au contexte sanitaire qui a pu en partie influencer les répondants. En effet, l’enquête EVEPE 2019-2020 a été diffusée en mars 2020, soit durant la période du premier confinement. Or, préparé en amont du contexte sanitaire exceptionnel, le questionnaire interrogeait très rapidement la condition étudiante au prisme de la covid-19 et n’a pas mesuré l’ampleur que prendrait la crise. Le contexte de la covid-19 à l’origine de périodes de confinement, de couvre-feu et de scolarisation distanciée a pu influencer les réponses des enquêtés. []
  5. À la question « Pourquoi avez-vous choisi cette formation ? », les étudiants pouvaient classer huit modalités : « adéquation avec mon projet professionnel », « les enseignements de la formation me plaisent », « curiosité pour les enseignements proposés », « réussite probable dans les enseignements choisis », « bonne expérience de la matière équivalente à la formation au lycée », « conseillée par mon ancien établissement (professeur principal ou conseiller d’orientation) », « université à proximité de mon domicile », « autre (à préciser) ». []
  6. Ils sont 20 % à citer la proximité, indépendamment du rang de la modalité. []
  7. Les surcoûts peuvent être d’ordre matériel (relatif aux aménités de logement, de transport…) et sensible (dimension psychologique de l’éloignement aux cercles relationnels et au cadre de vie familier en général). []
  8. Les données du MESRI qui ont servi à élaborer la carte concernent l’origine de l’ensemble des effectifs étudiants des universités, tous niveaux confondus, contrairement aux chiffres de l’EVEPE, qui ne concernent que les primo-arrivants en L1. []
  9. Alain Coulon définit le départ du domicile parental et le passage à un mode de vie plus autonome par la « rupture affective ». Celle-ci doit être précédée par la « rupture intellectuelle » selon laquelle l’étudiant a assimilé les attentes de l’université en termes de règles d’apprentissage. La « rupture sociale » conclu le processus d’affiliation au métier d’étudiant par le dépassement de l’inquiétude liée au changement de conditions d’existence et l’intégration des normes et valeurs d’un nouveau groupe social. []
  10. Termes issus de la question ouverte « En un mot, comment décririez-vous votre vie étudiante ? » du questionnaire sur la « Vie et les pratiques étudiantes » en 2019-2020. []

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