#10 / Par delà le « désert alimentaire » : une étude des inégalités et des stratégies en matière d’offres et d’accès alimentaire à Detroit.

Elsa Bernot

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La métropole de Detroit est caractérisée par une ségrégation socio-spatiale marquée, dont les causes  sont à la fois économiques, politiques (Georgakas et Surkin, 1998 ; Sugrue, 2005) et culturelles (Hartigan, 1999 ; Staszack, 1999). De nombreux quartiers de la ville centre sont frappés par une pauvreté endémique ; les services publics et privés y sont sporadiques. Cette situation générale se répercute sur la consommation alimentaire des habitants ; l’usage de l’expression « désert alimentaire » est alors récurrent.

Cet article s’inscrit dans l’héritage de la géographie radicale/critique (Giroud et Gintrac, 2014), qui replace les pratiques des habitants ordinaires au centre des modes de fabrique de la ville, en opposition aux logiques néolibérales de rentabilisation de l’espace urbain. En affinant les critères utilisés pour tenter de mesurer et d’analyser les causes et les conséquences de ces dits « déserts alimentaires », expression ici remise en question, il questionne la pertinence de « solutions » marquées par la logique d’une gestion néolibérale de la ville (retour des chaînes de grande distribution alimentaire, valorisation de l’espace dans un but de développement économique), ici mises en parallèle de pratiques et de  stratégies existantes des habitants dits « ordinaires » pour se procurer à manger, dans une perspective de droit à la ville (Lefebvre, 2009 ; Harvey, 2011).

1. Le supermarché Family Food et le marché de producteur d’Earthworks Farm, un aperçu différencié de l’offre alimentaire à Detroit (Bernot, été 2015).

Les données analysées ici proviennent de terrains réalisés entre le printemps 2012 et l’automne 2015 à Detroit, combinant les outils classiques que sont les entretiens quantitatifs, semi-directifs et le recueil de récits de vie, doublés d’analyses médiatiques et cartographiques. Mais il est des pratiques auxquelles les discours ne font pas écho et qui ne se donnent à voir que dans la spontanéité d’un acte, d’une parole, dans une conjoncture donnée. Aussi la matière analysée ici provient-elle surtout de temps de participation observante : réunions publiques, participation à des temps collectifs de jardinage, de débats et plus généralement de vie au sein des quartiers ; bénévolat dans diverses structures associatives et travail quotidien dans des fermes et des marchés de producteurs, temps nourris d’abondantes discussions informelles consignées dans des carnets de terrains.

Le désert alimentaire : effort de contextualisation et de définition

Publicisé dans des rapports publics au Royaume Uni au cours des années 1990 (Cummins et Macintyre, 2002 : 2115)1, le qualificatif « désert alimentaire » fait son apparition officielle aux États-Unis quelque dix ans plus tard. En 2009, le Ministère étasunien de l’Agriculture publie un rapport intitulé : « Accès à une alimentation bon marché et nutritive : mesurer et comprendre les déserts alimentaires et leurs conséquences. » Un « désert alimentaire » y est défini comme « un endroit aux États-Unis où l’accès à une alimentation bon marché de qualité est limité, plus particulièrement les endroits comprenant une majorité de quartiers et de communautés à faible revenu », les personnes vivant à plus d’un mile2 d’un supermarché en zone urbaine étant considérées comme handicapées par un faible accès alimentaire. Un Atlas de recherche en accès alimentaire, mis en ligne sur le site du Ministère en 2013, « propose aux chercheurs et autres utilisateurs de multiples voies pour comprendre les caractéristiques qui peuvent contribuer aux déserts alimentaires, inclut le niveau de revenus, la distance aux supermarchés et l’accès à un véhicule ». Difficultés d’accès physique, coût, habitants de quartiers défavorisés : ces trois critères demeurent une constante de sa définition.

L’expression « désert alimentaire » est régulièrement utilisée pour qualifier la situation alimentaire dans la ville de Detroit. Son usage est popularisé à la suite de la publication en 2007 du rapport de l’Institut Mari Gallagher, Examiner l’impact des déserts alimentaires sur la santé publique à Detroit. En 2013, quatre-vingt douze articles médiatiques associent les termes « Detroit » et « food desert » (Hill, 2014 : 2). The New-York Times, The Wall Street Journal, The Time Magazine, ou encore des chaînes télévisées telles que CNN et la BBC en font usage (Linn : 2011). La communauté des étudiants et chercheurs n’est pas en reste avec vingt et une publications académiques et dix-neuf ouvrages de langue anglo-saxonne (Hill, 2014 : 2).

Si certains auteurs évitent soigneusement (à dessein ?) le terme (par exemple Kami Pothukuchi, 2008), il reste régulièrement employé pour décrire la situation alimentaire à Detroit (Weatherspoon et al., 2011 & 2014), développer un sujet en lien avec l’accès alimentaire (études et articles liés à l’agriculture urbaine notamment : Dewar et al., 2013 ; Paddeu, 2014) ou encore dénoncer les inégalités d’accès alimentaire et ses conséquences sur la santé, dans le but de défendre la nécessité d’une plus grande « justice alimentaire » (White, 2010 ; Billings et al., 2011 ; Paddeu, 2016). Le but des auteurs suscités n’est pas nécessairement d’analyser ce terme ; mais en y ayant recours et en banalisant son usage, ils participent à perpétuer certaines idées reçues.

Les articles universitaires partent souvent du constat d’une absence d’enseignes de la grande distribution : « En 2007, Detroit – dont la population est à 85 % Africaine-Américaine – était désignée comme l’un des « déserts alimentaires » du pays, quand elle perdit Farmer Jack, l’une des six dernières chaines qui desservait la ville. » (Billings et Cabbil, 2011 : 105 ; voir aussi : Zenk et al., 2005 ; White, 2010 ; Paddeu, 2014 ; Weatherspoon et al., 2015). Il est donc sous-entendu que si les habitants ne se nourrissent pas correctement, c’est parce que les lieux de vente de denrées alimentaires de qualité décente – souvent limités aux grandes surfaces – se raréfient. L’accès n’est mesuré qu’en termes physique (distance, moyen de transport) et économique (revenu, coût des marchandises), ces deux dimensions étant corrélées au statut socioculturel (discriminations socio-raciales) :

« Le phénomène de ségrégation sociospatiale et raciale aux États-Unis crée des espaces de relégation urbaine dans lesquels la sécurité alimentaire n’est pas assurée pour tous. Ces food deserts, espaces urbains pauvres où les habitants ne peuvent pas se procurer des aliments sains à des prix abordables, cumulent très faible présence de supermarchés et dépendance des populations défavorisées à l’automobile en la quasi-absence de transports en commun. » (Paddeu, 2014 : 94).

Le recours à la métaphore du « désert alimentaire » se justifie en ce que l’image forte qu’elle renvoie permet d’attirer l’attention sur les inégalités et les discriminations qui lui sont associées et l’urgence qu’il y a à pallier la situation. Cependant, le misérabilisme n’en est jamais loin, comme le montre cet extrait d’un article intitulé « Se nourrir au milieu des ruines », publié sur Guernica en 2009 par le journaliste Mark Dowie : « Il y a un tel manque de protéines dans la ville que Glemie Dean Beasley, un retraité de soixante-dix ans, ancien chauffeur de poids lourd, peut arrondir ses fins de mois en vendant des carcasses de raton-laveurs (douze dollars la pièce, nourri une famille de quatre), animaux traqués et chassés dans des terres qu’il garde secrètes, autour de la ville. »

Se fonder uniquement sur ces critères d’accès spatial et économique fait courir le risque de la caricature et de conclusions erronées. Certains auteurs impliquent que les difficultés d’accès à des aliments de qualité auraient des conséquences sur la santé des habitants, les plus discriminés socialement et racialement étant les premières victimes de cette situation. Un argument défendu par le rapport de l’Institut Mari Gallagher et repris ici : « Detroit est sélectionné comme cas d’étude car c’est sans doute l’un des pires déserts alimentaires en termes de taille et de nombre de personnes touchées, et parce qu’elle était classée comme la 5ème ville comptant le plus important taux d’obèses dans la ville en 2009 » (Weatherspoon et al., 2014 : 62). Or les causes de l’obésité restent sujettes à caution ; toxines environnementales, antibiotiques ou stress sont d’autres facteurs clefs (Guthman, 2014 : 5). Detroit comporte les aires urbaines les plus polluées des États-Unis (Gobert, 2012) – une donnée qui n’est pas prise en compte dans les corrélations spatiales avancées par l’institut Mari Gallagher, alors que la distance entre un bloc et un supermarché ne reflète pas nécessairement le degré d’accessibilité à une alimentation de qualité.

Redéfinir l’accès

Les enquêtes menées à Detroit montrent qu’il n’y a pas de corrélation systématique entre le lieu d’habitation des habitants, leurs moyens financiers et le lieu où sont effectués leurs achats alimentaires : ils ne vont pas nécessairement au plus près de leur domicile, même s’ils ne possèdent pas de voiture, ni au moins cher, même s’ils ont peu d’argent. En revanche, d’autres variables doivent être prises en considération.

La classe, la culture, le genre ou encore l’âge sont déterminants, parfois doublés d’une volonté de distinction sociale, qu’elle soit choisie ou subie, concrétisée par des formes de ségrégation implicite ou d’auto-exclusion (Shaw, 2006). Les jeunes couples de cadres dynamiques se rendent plus volontiers dans les restaurants « bio » et les magasins ethniques polonais, mexicains ou syriens du centre-ville que dans les Coney Island ; et les adolescents qui grandissent dans des quartiers populaires vont spontanément acheter des chips et des sodas au dépanneur du coin de la rue plutôt que des fruits et légumes au supermarché, ce qui n’est potentiellement pas le cas de leurs parents.

Les représentations positives ou négatives associées à certains lieux ou personnes, dans une ville à fort taux de criminalité, sont aussi à prendre en compte : certains consommateurs ne cilleront pas en effectuant leurs achats par vitre pare-balle interposée, mais ne se sentiront pas à l’aise en présence d’un gardien de sécurité posté à la porte du magasin et inversement. Les relations affinitaires ou les mésententes avec un commerçant et/ou sa clientèle jouent aussi leur rôle dans le fait qu’un lieu soit fréquenté ou non (Bunge : 2011).

Enfin l’existence de réseaux de solidarité nuance le poids des critères économiques (revenus, possession d’un véhicule) dans les possibilités d’accès alimentaire des habitants. Dons, échanges de service contre service, prêt d’une voiture entre membres d’une même famille, amis ou voisins pour se rendre au magasin, collectivisation des temps d’achat et de préparation des repas sont autant d’éléments qui ne sont pas pris en compte dans les formules de calcul du degré d’accès alimentaire des habitants.

Ainsi l’écrivaine Tracie McMillan décrit avec sensibilité les sentiments de gêne et de honte qui la traversent selon les endroits où elle se rend pour acheter à manger à Detroit, illustrant la complexité des enjeux qui peuvent se jouer pour parvenir à se sentir légitime ou non en un lieu donné.

« Je suis tombée amoureuse de la ville durant ces jours de faim. Il y avait une forme de reconnaissance immédiate du fait que c’est l’endroit qui m’a nourrie pour pas cher. Mais il y avait un autre aspect, plus complexe, lié à la honte profonde que je ressentais à être pauvre. Cette frustration qui montait dans ma poitrine quand j’allais dans un supermarché de la banlieue et que je me voyais jeter des regards en biais sur la viande posée dans les cadis d’autres clients, avec envie. Ces envies m’embarrassaient, le fait que mon budget ne me permette pas de me payer la nourriture que je voulais […]. Depuis l’époque où j’habitais Detroit, Meijer et Whole Foods ont ouvert dans la ville, changeant son paysage alimentaire à jamais. Six mois après leur ouverture, j’étais envoyée à Detroit pour un reportage, sur le point d’être en retard à un rendez-vous et à la recherche d’un petit déjeuner. Whole Foods était sur ma route, alors j’y ai fait un saut, et je me suis retrouvée face à un burrito de petit déjeuner à 4$. J’ai regardé autour de moi. Il y avait de jeunes cadres dynamiques qui faisaient la queue avec leur café bio, parlant de leurs allers-retours banlieue/centre, et il y avait un homme dans son uniforme de sécurité surveillant le comptoir de la boulangerie. Et il y avait moi et mon burrito à 4$. […] Je savais qu’à dix minutes d’ici il y avait le comptoir de plats chauds d’Honey Bee, où je pourrais avoir deux (très bons) burritos pour 2,5$. […] Il aurait été plus raisonnable d’acheter le burrito de Whole Foods et d’arriver à mon rendez-vous à l’heure. Mais mon cœur, je l’ai constaté, n’est pas raisonnable. Je suis ressortie. » (Mc Millan : 2014)3.

Son témoignage révèle une absence de corrélation systématique entre moyens économiques, proximité spatiale et lieux d’achat. Ce qui lui importe avant tout, c’est d’être dans un lieu où elle se sent bien, où elle n’a pas « honte » d’être ; son capital social et culturel sont ici plus déterminants.

Le qualificatif de « désert alimentaire » véhicule aussi l’idée d’un très faible nombre de lieux de vente de denrées alimentaires. S’il est vrai que proportionnellement au nombre d’habitants, ces lieux sont peu nombreux et que les offres de nourriture de qualité à des prix abordables manquent, ils sont davantage présents que ce que la littérature ne le laisse entendre.

Moindres quantités, moindre qualité ?

D’après le Département de l’agriculture du Michigan, quinze mille commerces sont taxés pour vente de denrées alimentaires dans le comté de Wayne, dont fait partie Detroit, dont une très grande majorité de stations essence, dépanneurs et distributeurs alimentaires automatiques (Linn, 2011). Taylor et Ard recensent quant à elles 3 242 commerces et restaurants à Detroit même, une fois les programmes d’assistance alimentaire, non taxés en tant que commerces, décomptés (2015). Si ces chiffres sont ramenés au nombre d’habitants, cela revient à 99 habitants par commerce dans le comté de Wayne, Detroit exclue, pour 207 habitants par commerce à Detroit ; si Detroit est deux fois moins bien desservie que le reste du comté, ces chiffres font tout de même contrepoids à l’image que peut véhiculer l’expression « désert alimentaire » (Fig. 2).

2. L’offre alimentaire à Detroit (panel statistique) (Bernot, novembre 2017

Le seul constat qui fasse consensus en matière d’offre alimentaire à Detroit est qu’il existe une majorité de lieux tels que « dépanneurs » qui mettent en rayon des produits de piètre qualité, encore qu’ils ne représentent qu’un tiers des points de vente si l’on s’appuie sur les chiffres de Taylor et Ard4.

Reste que l’image de pénurie véhiculée par l’expression de « désert alimentaire » occulte une réalité plus nuancée, et joue trop facilement la carte du misérabilisme, d’autant qu’elle est relayée par des caricatures inverses portées par des expressions telles que « oasis de mal bouffe » ou « marécage alimentaire » (Thibert, 2012 : 350), qui elles aussi occultent la complexité de l’offre alimentaire à Detroit. C’est en réaction à ces clichés que Noah Stephens, habitant de Detroit, à intitulé son blog « Les gens de Detroit* {*parce que tout le monde à Detroit n’est pas un immeuble abandonné », sur lequel il recense divers supermarchés bien achalandés de la ville et interroge leur clientèle sur leurs habitudes de lieux d’achat et leur pratiques de consommation alimentaire.

Les recensements ne font pas non plus état de la municipalité d’Hamtramck, englobée par celle de Detroit, mais administrativement autonome. Ses magasins et points de vente alimentaire, pléthoriques, sont fréquentés par les habitants de Detroit. Le retour de deux grandes enseignes dans la ville centre, Meijer, à la frontière avec la banlieue nord de Ferndale en 2015, et Whole Foods, dans le quartier central de Midtown en 2014, marque plus récemment un changement notable en matière d’offre alimentaire conventionnelle.

Pratiques alimentaires des « habitants ordinaires »

Mais vouloir rendre compte de l’offre alimentaire disponible à Detroit en ne s’appuyant que sur ce que proposent les points de vente tels qu’épiceries, stations essence et supermarchés, c’est encore ignorer les pratiques des « habitants ordinaires », ces individus acteurs « participant à la production des lieux et donc au changement urbain en cours » (Giroud, 2007 : 2) dont les pratiques s’opposent à celles d’acteurs publics ou privés, moteurs de dynamiques de reconquêtes et de renouvellement urbain. Ils déploient nombre de « tactiques » et de « compétences » afin de se nourrir au quotidien, pour reprendre le vocabulaire de Michel de Certeau (1990) et de ceux qui s’inscrivent dans l’héritage de son travail (Bessin et Rouleau-Berger, 2002, De Boulet et Chikhaoui, 2002 et 2009).

3. Magasins spécialisés et marchés de producteurs acceptant les bons alimentaires (Bernot, été 2015).

De fait, d’autres pratiques individuelles ou collectives, plus marginales, viennent diversifier la liste des lieux ressources en termes d’accès alimentaire. Pour commencer par celles largement documentées par les journalistes (Gallagher : 2010 et 2013), les institutions publiques et les universitaires (voir à titre d’exemple : Bernot, 2013 ; Lawson et Miller, 2013 ; Mayoux, 2013 ; Paddeu, 2014 ; Werner, 2015), il existe beaucoup d’initiatives relatives à l’agriculture urbaine.

Les réseaux CSA (Community Supported Agriculture, équivalent des Associations pour le Maintien d’une Agriculture Paysanne ou AMAP, soit des réseaux locaux de production mettant directement en contact producteurs et consommateurs) se développent à mesure que se multiplient les exploitations maraichères dans l’enceinte même de la ville. Si ces réseaux sont destinés à une clientèle plutôt aisée, plusieurs collectifs et organisations, animés par la revendication d’une plus grande justice alimentaire, se sont évertués, au travers de fermes et de potagers collectifs, à proposer des aliments locaux et sains pour tous à des prix abordables (Guthman, 2014).

Les initiatives de (ré)implantation de jardins potagers et de fermes maraîchères dans les villes ont été largement couvertes par les médias. Elles mêlent projets de renouvellement urbain portés par des acteurs publics et privés, autant que volontés citoyennes ou militantes, chacun de ces acteurs étant à même de se faire entendre médiatiquement. En parallèle, les jardins potagers nés d’initiatives familiales et/ou individuelles, moins visibles dans les statistiques, se comptent vraisemblablement par milliers à Detroit. Si l’organisation Keep Growing Detroit n’en cartographie que quelques centaines qui sont adhérents de ses programmes (Fig. 4), des déambulations dans divers quartiers de la ville et des entretiens et discussions formelles et informelles avec les habitants révèlent les multiples initiatives spontanées pour l’entretien de potagers, hors de ces réseaux structurés.

Anibar, portoricain, habite le quartier de Briggs. Pas de pelouse ni de fleurs chez lui, mais de hauts épis de maïs qui laissent deviner un potager, commencé l’année même de son arrivée en ville, en 2000. Au début, il allait jardiner à Hope Takes Root, le jardin collectif du quartier, mais c’était un peu loin, il ne pouvait pas surveiller ses légumes, les regarder pousser, les protéger des oiseaux qui mangent tout. Il ne connait pas le Garden Ressource Programme, proposé par une organisation qui effectue des distributions de graines et de plants trois fois par an contre une dizaine de dollars : il a acheté les graines sur Internet.

À quelques blocs de chez Anibar se trouve la maison d’Howard. Il a repris le potager de sa mère, Mary, venue d’Alabama en 1948. Elle avait commencé par déblayer les ruines d’un pavillon effondré avant de pouvoir installer son potager. Howard et sa famille n’ont jamais été propriétaires de cette parcelle. Aujourd’hui, Howard continue d’entretenir le potager avec sa tante ; et s’il n’élève plus de poules, comme le faisait sa mère, les discussions en cours pour l’adoption par la municipalité d’une ordonnance visant à la légalisation de l’élevage en ville révèlent que ces pratiques sont courantes dans la ville.

4. Cultures maraichères à Detroit : 713 fermes et jardins potagers collectifs et individuels recensés (Keep Growing Detroit, detroitography, 2013).

Le cas de Sophia Senakievitch, relevé par l’agence d’urbanisme Newyorkaise Interboro (Armborst et al., 2010), qui s’intéresse aux aspects « non spectaculaires » de Detroit, illustre encore ces stratégies dont font preuve les « habitants ordinaires » pour se réapproprier ces espaces résultant des « techniques de la production socio-culturelle » (De Certeau, 1990 : xl). Cette femme occupe une parcelle voisine de sa maison, propriété d’une entreprise de gestion de panneaux publicitaires ; elle s’en sert de garage et de potager, utilisant les vieilles affiches du panneau installé sur la parcelle, faites d’épaisses couches de plastique, pour amender la terre de son potager au cours de l’hiver (fig. 5).

5. L’agriculture urbaine à Detroit, entre outil de relance économique et modèle de résistance ordinaire (Armborst et al., 2008 ; Detroit Future City, 2012 : 116).

Au-delà du fait que le potager soit une source de production alimentaire non négligeable pour Anibar, Howard ou Sophia Senakievitch, les manières dont ils s’approprient, pratiquent et habitent leur quartier correspond à ce que Giroud appelle « continuité populaire », soit une forme de résistance à d’autres forces d’aménagement urbains (publiques, privées, collectives…) en présence qui décident officiellement du sort des villes (2007 : 2).

Les pratiques apparentées au domaine de l’agriculture urbaine sont souvent avancées comme la « solution » à l’existence des déserts alimentaires, et aux problèmes urbains en général, depuis la fin du XIXème siècle (Lawson, 2005). Si l’idée de produire une alimentation locale de qualité comme palliatif des inégalités d’accès alimentaire est mobilisée par des militants, des activistes et des acteurs publiques et privés sensibles à la cause, elle est aussi facilement récupérée par des acteurs adoptant une logique entrepreneuriale, dont le millionnaire John Hanz, devenu propriétaire de centaines d’hectares dans le but de créer la plus grande ferme urbaine des États-Unis à Detroit, est un bon représentant. Plus subtiles sont les propositions du Plan stratégique de Développement pour un futur Detroit, plan d’aménagement financé par des entrepreneurs privés et conçu en partenariat avec la municipalité, qui voit en l’agriculture urbaine un potentiel de revalorisation foncière et de relance économique de la ville (fig. 5).

Le rapport fait notamment état de zones de « production innovantes » soit

« des paysages innovants où prédominent des aménagements de type productifs. Ces paysages transforment les terres vacantes en espaces productifs, actifs : maraîchage, forêts de comestibles, favorisant une réduction des coûts de maintenance, l’entretien et l’assainissement des sols, la génération de nouveaux savoirs, tout en permettant de reconstruire la perception publique de ce que sont les espaces vacants. Ces paysages innovants incluent dans un premier temps des champs de fleurs qui assainissent les sols contaminés, des parcelles dédiées à la recherche sur lesquels sont testées de nouvelles idées, des fermes urbaines avec des serres ou des forêts (silviculture) […] » (Detroit Future City, 2012 : 116).

L’agriculture urbaine est alors détournée à des fins spéculatives ; « Décrivant la terre comme l’atout le plus challengeant de la ville », Detroit Future City présente son intention de « transformer la terre de la ville en un atout économique », en « libérant le vaste et riche potentiel foncier de la ville par l’intermédiaire de zonages préférentiels, d’investissement dans des infrastructures ciblées, d’attraction de nouveaux capitaux dans la ville et d’approches innovantes pour faire face à la sous utilisation de la terre » (Clement, 2013 : 61). Des propositions bien éloignées des pratiques et des intentions des habitants qui cultivent déjà les parcelles de leurs quartiers depuis des années, voire des décennies.

D’autres pratiques, plus marginales, jouent un rôle prépondérant pour l’alimentation quotidienne des habitants : soupes populaires et épiceries solidaires, repas collectifs servis dans les maisons de quartier, les écoles et des associations locales, pratiques de récupération (invendus bradés ou donnés par des magasins et des restaurants ou récupérés sur les marchés), réseaux interpersonnels d’amis, voisins, famille permettant des échanges alimentaires sont autant de ressources quotidiennes pour celles et ceux dont les moyens financiers sont limités. Des barbecues collectivement organisés au sein de la communauté de Spaulding Court étaient ainsi toujours prétextes à rassembler famille, amis et voisins, assurant un repas conséquent à des personnes ayant peu de moyens. Sur la table pouvaient se côtoyer des aliments provenant de Greenland (un supermarché de Dearborn qui, chaque « amazing Wednesdays », proposait des rabais sur tous les produits frais), ainsi que des sodas et des chips achetés à la dernière minute au dépanneur du coin. Mais aussi des pâtisseries récupérées à moitié prix de la réputée boulangerie du centre-ville Avalon ; des récupérations de fruits et légumes des invendus du Eastern Market ou des poubelles des supermarchés de la banlieue ; des salades données par des voisins entretenant l’exploitation maraîchère Brother Nature ; des tomates et des aromates provenant du jardin collectif de Spaulding Court même ; ou encore des fins de plats cuisinés ramenés d’un restaurant du quartier par un voisin qui y travaillait. La diversité des aliments réunis sur la table et de leur provenance illustrait la diversité des pratiques des habitants des lieux, les stratégies et les réseaux que chacun était capable de mobiliser.

Devant  ces possibles, il faut bien sûr garder à l’esprit qu’une stratégie n’exclut pas les autres, et qu’un même individu peut fréquenter plusieurs lieux de production, de distribution ou de vente alimentaire, multipliant ainsi les lieux et les ressources disponibles. Si les voisins maraîchers s’évertuaient à faire pousser des salades biologiques et locales vendues 5$ les 450 grammes au Eastern Market, cela ne les empêchait pas de consommer sodas et chips à la station essence du quartier ; parallèlement, Joséphine, mère de famille née et grandie à Detroit qui faisait pousser tomates, patates douces et aubergines dans la cour de la communauté, n’aurait jamais accepté de faire les poubelles du Eastern Market, préférant faire usage des bons alimentaires dans les supermarchés de la ville centre et des banlieues voisines. Quant à « la pêche à la poubelle », cette activité s’avérait plutôt être l’apanage de ceux que Guthman qualifie de « hippies blancs » (2014 : 8), certains ayant développé en la matière une véritable cartographie qualitative de Detroit et de sa banlieue. Ces exemples veulent insister sur la diversité des pratiques et des stratégies existantes, guidés par une multitude de logiques et de connaissances révélatrices de la connaissance fine qu’ont les habitants de leur ville et des ressources qu’elle offre.

Les clichés inlassablement et durablement répétés à propos de Detroit ne laissent pas indifférents certains habitants, militants, activistes ou membres des pouvoirs publics, alors que le système alimentaire de Detroit pose des problèmes conséquents et demande un travail et une mobilisation massive pour être moins inégalitaire, comme le souligne cette remarque lapidaire tirée du rapport annuel du Conseil de Politique Alimentaire de Detroit de 2011 : « Alors que clairement, bien des choses restent à faire pour améliorer l’accès à des aliments frais et sains dans la ville, l’usage continu du concept de « désert alimentaire » est plus qu’inopérant »5. En effet, en qualifiant l’ensemble de la ville de « désert », Detroit est implicitement comprise comme un tout uniforme, sans prise en compte des variables et des nuances qui démarquent un quartier de l’autre. Ce terme comporte ceci de violent qu’il sous-entend non seulement que cette situation serait un phénomène inévitable résultant de conjonctures naturelles et non pas humaines, mais aussi que les habitants sont en incapacité de s’alimenter convenablement sans la présence de grandes surfaces et de chaines de supermarché dans la ville.

C’est pourquoi l’ouverture en 2015, en plein cœur de Detroit, du supermarché de la chaine Whole Foods, privilégiant la vente d’aliments biologiques et /ou locaux, avait été tant décriée. Nombre de militants voyaient l’arrivée de ce supermarché non pas comme une réponse aux problèmes d’inégalité d’accès alimentaire à Detroit, mais au contraire comme un élément accentuant ces inégalités, du fait de son emplacement dans un quartier en pleine dynamique de renouvellement et de réinvestissement par divers entrepreneurs, le centre-ville, et des prix affichés.

En revanche, parler d’« une inégale répartition des ressources  alimentaires » donc des « inégalités d’accès à une alimentation de qualité » permet d’insister sur la situation comme étant le fruit d’une conjoncture structurelle de nature à la fois politique, économique et culturelle, et de replacer ces enjeux d’ordre structurels dans la balance pour faire face au problème, sans pour autant occulter les savoir-faire et tactiques développés par les habitants pour s’alimenter convenablement. Tout cela fait du qualificatif de « désert alimentaire » un piètre outil rhétorique pour qui veut alerter sur les problèmes inhérents à la situation alimentaire propre à cette ville, ou aux inégalités d’accès alimentaire en général.

ELSA BERNOT

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Elsa Bernot est doctorante à l’École des Hautes Études en Sciences Sociales, Centre de Recherches Historiques, Laboratoire GGH-Terres, Paris, France. Sujet de la thèse en cours : « De la diversité des pratiques agricoles en milieu urbain. Pour une co-fabrique de la ville ? Conflits, compromis et stratégies d’occupation de l’espace par sa mise en culture. Les cas de Montreuil et de Detroit. »

elsa.m.bernot AT gmail DOT com

 

Photographie de couverture : De la ruine à la ferme : deux symboliques des représentations en matière d’offre et d’accès alimentaire à Detroit (Bernot, printemps 2013).

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  1. Rapport du Low Income Project Team of the Nutrition Task Force publié en 1995, Low Income, Food, Nutrition and Health: Strategies for Improvement (Department of Health, 1996), the Independent Inquiry into Inequalities in Health (Acheson, 1998), the Social Exclusion Unit’s Bringing Britain Together: A National Strategy for Neighbourhood Renewal (Social Exclusion Unit, 1998) et le rapport qui en découle, Policy Action Team 13: Improving Shopping )Access For People Living In Deprived Neighbourhoods (Department of Health, 1999) et encore A New Commitment to Neighbourhood Renewal: National Strategy Action Plan (Social Exclusion Unit, 2001). []
  2. 1 mile : 1,6 kilomètre. []
  3. Traduction de l’auteure. []
  4. Là encore, les chiffres sont donc à manipuler avec précaution : certaines assertions sont répétées sans être appuyées sur des analyses statistiques ou des enquêtes de terrain poussées. Les points de vente de type « dépanneurs » ne représentent finalement que deux tiers des points de vente alimentaire totaux de la ville ; à ce jour, aucune étude statistique comparée de ma connaissance ne vient dire si ces chiffres diffèrent de la situation d’autres métropoles étasuniennes. []
  5. Pothokuchi K., (dir.), 2011, The Detroit Food System Report, 2009-2010, for the Detroit Food Policy Council, with Annette Stephens (research assistant) and Cheryl A. Simon  (DFPC coord.), May 2011, en ligne.  Traduction de l’auteure.   []

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