#10 / Migrer et cultiver la ville : l’agriculture communautaire à Malmö (Suède)
Camille Hochedez
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Une partie de ce que mangent les villes est désormais produite en leur sein. En effet, l’agriculture fait depuis une quinzaine d’année son grand retour dans les villes du Nord, sous des formes très diverses. Une définition large de l’agriculture urbaine, entendue ici comme toute activité de production végétale à renouvellement rapide, professionnelle ou amatrice, destinée à une consommation ou un usage urbains, et pratiquée sur des terrains localisés dans la ville ou à sa périphérie (Moustier et M’Baye, 1999 ; Scheromm et al., 2014), rend compte de son renouveau, de la diversité de ses acteurs et d’un continuum de formes, allant des jardins collectifs aux exploitations marchandes classiques (Nahmias et Le Caro, 2012).
Alors que la littérature francophone sur l’agriculture urbaine met traditionnellement l’accent sur le raccourcissement des chaînes de production à travers le développement des circuits courts, ou encore sur la fonction écologique de ces espaces agricoles (Lamine et Deverre, 2010), nous proposons de nous pencher sur un aspect moins étudié du métabolisme alimentaire urbain : l’alimentation des personnes en situation de migration, dont l’accès à des produits culturellement appropriés peut s’avérer problématique. S’intéresser à ce que mangent les migrants mène à analyser l’agriculture urbaine au prisme de la justice alimentaire. Issue du food movement alternatif des villes nord-américaines (Paddeu, 2012), cette notion s’entend a priori comme la répartition équitable dans les modes de production et de distribution des ressources alimentaires sur un territoire donné (Gottlieb et Joshi, 2010). Cette situation n’est pas atteinte partout ni pour toutes les populations. Dans les métropoles, les injustices alimentaires sont criantes, notamment quand on regarde les populations souffrant de problèmes d’insécurité et d’accessibilité alimentaires – populations défavorisées, minorités, migrants et populations immigrées (Alkon et Agyeman, 2011). L’agriculture urbaine, considérée sous l’angle de la justice alimentaire, répond alors à des enjeux combinés d’environnement, de santé publique, de nutrition, ainsi que d’inégalités raciales, de classe et de genre selon la terminologie nord-américaine (Slocum et al., 2016). Si les commerces alimentaires ethniques et les stratégies d’approvisionnement des communautés immigrées ont déjà été étudiés (Raulin, 1990 ; Ma Mung et al., 1992 ; Augustin-Jean, 1995 ; Dubucs, 2013), mettre la lumière sur la production-même des aliments à destination des communautés immigrées en ville interroge le rôle de l’agriculture urbaine dans leur souveraineté alimentaire, puisqu’elle produit localement des aliments permettant de maintenir une continuité culturelle.
La ville de Malmö (Suède), troisième ville de Suède avec 560 000 habitants en 2014 d’après les chiffres du Bureau national de la statistique (SCB, 2016), est particulièrement intéressante pour étudier les dynamiques de l’agriculture urbaine selon le questionnement de la justice alimentaire. C’est la ville multiculturelle par excellence : environ 43 % de la population totale est immigrée ou étrangère1, soit la plus forte proportion parmi les villes suédoises. 178 nationalités sont présentes, avec une majorité d’immigrés européens en provenance des pays de l’ex-Yougoslavie (qui constitue la deuxième communauté la plus importante) et de Pologne, mais aussi du Danemark voisin. Les communautés en provenance du continent européen sont installées depuis plusieurs décennies dans la ville. 34% des immigrés ou des étrangers viennent d’Asie, aire englobant dans les statistiques le Proche et Moyen-Orient, la Chine et l’Asie du Sud-Est (SCB, 2016). Cette immigration est beaucoup plus récente. Si les Libanais, Iraniens, Afghans et Syriens sont particulièrement représentés, ce sont les Irakiens qui constituent la première communauté immigrée ou étrangère à Malmö. Parallèlement à l’arrivée plus ou moins récente de populations étrangères, Malmö se transforme au rythme de grands projets d’aménagement urbain censés répondre à l’objectif d’être un modèle de ville durable. Ces projets sont potentiellement porteurs de recompositions pour l’agriculture urbaine. L’étude de l’agriculture pratiquée par les migrants dans les jardins communautaires municipaux doit ici permettre de répondre à deux questions principales. Premièrement, quel rôle jouent les migrants dans la recomposition des systèmes alimentaires urbains, en termes de production mais aussi de soutien à une demande alimentaire ethnique ? Contribuent-ils à développer des formes particulières d’agriculture urbaine, par leur localisation, les types de cultures, les pratiques de commercialisation et les débouchés ? Deuxièmement, ces dynamiques doivent être replacées dans le contexte des dynamiques métropolitaines plus globales : dans quelle mesure les espaces de l’agriculture urbaine communautaire sont-ils intégrés au discours et à la politique de la ville durable ? Dans quelle mesure participent-ils à des formes d’ancrage des migrants dans la ville ?
L’étude de terrain menée lors de deux séjours en 2015 et 2016 à Malmö a apporté des pistes de réponses. Les observations directes sur les jardins communautaires ont été complétées par des entretiens auprès de plusieurs types d’acteurs : (1) sept entretiens auprès des services municipaux en charge de la gestion des jardins, de la planification urbaine, de l’environnement et des terres agricoles ; (2) sept entretiens auprès des acteurs de l’agriculture urbaine à Malmö (jardins associatifs, responsables de projets d’agriculture urbaine publics et privés, associations de promotion de l’agriculture urbaine) ; (3) six entretiens avec des jardiniers d’origine étrangère. L’analyse des documents d’aménagement à l’échelle de la ville ou de projets concernant les quartiers où sont implantés les jardins municipaux, ainsi que de documents portant sur les jardins (documents réglementaires, site internet municipal sur les jardins) a permis de contextualiser le travail et a apporté de précieux compléments d’information. Ce travail de terrain s’est confronté à plusieurs problèmes, car l’étude de ce que mangent et, surtout, de ce que produisent les immigrés en ville pose des défis méthodologiques au chercheur. Ainsi, les immigrés, dans le cadre des activités de production alimentaire sur les jardins municipaux de Malmö, ont recours à de nombreuses pratiques informelles qui restent volontairement cachées. L’observation paysagère permet néanmoins d’identifier des filières et des espaces de production communautaires. L’étude met au jour les ressorts de ce qui s’apparente à une agriculture communautaire, dont la production est pratiquée par et à destination des communautés immigrées selon les nationalités. Les espaces d’agriculture communautaire sont plus ou moins intégrés dans les politiques d’aménagement durable, qui entraînent des reconfigurations porteuses de vulnérabilités pour les espaces agricoles urbains tenus par les migrants.
Rendre visible ce que mangent et produisent les migrants : les paysages alimentaires communautaires à Malmö
Une entrée par les jardins municipaux pour identifier les paysages alimentaires des minorités dans la ville suédoise
Pour le chercheur, étudier l’agriculture communautaire revient à se confronter à un problème méthodologique de taille : comment étudier un phénomène relativement caché, qui combine pratiques formelles et informelles, tant dans la production que dans la commercialisation des produits ? Cette question peut paraître surprenante dans le contexte du modèle suédois d’intégration, qui correspond à un modèle communautariste. La devise de ce modèle, « jämlika men inte lika » (égaux, mais pas semblables), exprime le principe du système d’intégration suédois fondé sur le respect des cultures communautaires. Cela explique la forte visibilité culturelle des communautés immigrées à Malmö. Le revers plus négatif est la forte ségrégation socio-spatiale, qui résulte de processus d’exclusion sur des critères socio-économiques. Les quartiers péri-centraux (Rosengård, Fosie, Hyllie et Södra Innerstaden) concentrent les taux de population née à l’étranger les plus importants et correspondent aussi à des espaces où le revenu médian disponible est le plus faible.
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Les paysages alimentaires2 (Allen et al., 2003 ; Nikolli et al., 2016) sont une porte d’entrée pour appréhender la visibilité des minorités dans la ville. Leur lecture est particulièrement intéressante à Malmö, qui connait depuis 2010 une dynamique de développement de l’agriculture urbaine à travers des initiatives associatives ou politiques qui vont de l’agriculture commerciale au jardinage urbain. L’objectif affiché de certaines d’entre elles est de favoriser l’intégration des populations dans les quartiers défavorisés où elles se sont développées. Mais l’objectif n’est pas atteint, puisque le public impliqué est peu représentatif des populations des quartiers où ces jardins se situent ; ils sont donc des outils d’intégration incomplets, manquant leur cible initiale mais contribuant néanmoins à intégrer d’autres populations comme les Suédois ayant récemment déménagé à Malmö, ou les femmes retraitées d’origine étrangère (Alarcon et Hochedez, 2018).
C’est ailleurs que les migrants cultivent la ville pour leur approvisionnement alimentaire, notamment dans d’autres espaces d’agriculture urbaine que sont les odlingslotter, ces lots de jardins municipaux d’agrément qu’il est possible de cultiver. La ville compte environ 1700 parcelles de taille variable (entre 25 et 150 m²) regroupées en « blocs » répartis de manière homogène dans tous les quartiers de la ville (figure 1). N’importe quel citoyen de Malmö peut prétendre à une parcelle, à condition d’habiter la ville, de ne louer qu’une parcelle par personne, de s’acquitter du droit annuel de location (5 sek/m²/an, soit 55 centimes/m²/an). Le locataire est également tenu de respecter les règles d’usage, d’entretien et de construction fixées par les services municipaux. Les parcelles sont non-constructibles, à l’exception de constructions strictement règlementées : sont autorisées les barrières (60 cm de hauteur maximum), les paravents (2 m maximum, et sans toit), ainsi que les coffres à outils. En revanche, les serres sont interdites, sauf dans les jardins d’Almvik (nous allons expliquer pourquoi par la suite).
Dans les faits, certains jardins sont le support de pratiques informelles servant à approvisionner certaines communautés migrantes en produits ethniques. Informalité dans les montages fonciers pour produire, mais aussi informalité de la commercialisation, soit directement sur les parcelles, soit auprès de la communauté en dehors des parcelles, alors que la vente de produits issus du jardinage n’est pas autorisée, ces jardins n’étant pas déclarés comme exploitations agricoles. Les entretiens auprès des services municipaux gérant les odlingslotter ont orienté nos observations vers trois lots de jardins particulièrement concernés par ces pratiques informelles communautaires (figure 1). Les deux premiers lots, Almvik (109 parcelles) et Vårsången (52 parcelles), sont situés dans deux quartiers périphériques au sud de la ville, respectivement Osie et Foxie. Ils ont en commun d’être investis par les communautés d’origine asiatique à l’exclusion des Proche et Moyen-Orient ; en 2014, elles représentaient 5,2 % des populations d’origine étrangère à Malmö (SCB, 2016) et se concentraient dans les quartiers sud de la ville, en particulier les populations d’origine vietnamienne. Le troisième lot, Navet (24 parcelles), est moins périphérique puisqu’il est situé dans le quartier densément urbanisé et industriel de Sofielund, qui marque le début du quartier oriental de Malmö où la densité de commerces alimentaires ethniques est importante. Ce jardin, qui est la plus petite, mais aussi la plus ancienne zone d’odlingslotter de Malmö, est investi par la communauté bosniaque.
Les marqueurs paysagers de la différence : une entrée par le visible pour capter des pratiques informelles
Compte-tenu du caractère informel de nombreuses pratiques culturales dans ces trois espaces de jardin, l’observation paysagère a été utilisée comme point d’entrée pour mettre au jour des réseaux informels d’approvisionnement de produits ethniques. En effet, les pratiques des minorités construisent des paysages culturaux distincts des parcelles « suédoises » à des fins d’agrément.
En premier lieu, ces parcelles sont reconnaissables aux pratiques intensives, qui se traduisent dans les paysages par la présence de serres ou de tunnels en plastique (figure 2). Alors que ces constructions sont normalement interdites, elles ont été légalisées a posteriori par la municipalité à Almvik, lot de jardins où on observe la plus forte concentration de parcelles asiatiques. Ailleurs, ces constructions sont présentes aussi, et malgré leur caractère illégal, la municipalité ferme les yeux, faute de pouvoir tout contrôler. Les différentes formes de serres (structures en bois, arceaux en plastique recouverts de bâches en plastique ou encore simples bâches maintenues par des pierres) composent un paysage hétéroclite construit artisanalement. Les serres relativement élevées répondent au besoin de protéger des cultures spécifiques qui poussent en hauteur, comme les légumes-feuilles ou les aromates. Ces parcelles semblent moins ordonnées car beaucoup de matériaux de construction, de sacs de terreau, de fumier, y sont entassés. Contrairement aux parcelles tenues par des personnes d’origine suédoise ou étrangère mais relativement âgées et qui ont une fonction d’agrément et de loisir, les parcelles exploitées par des Asiatiques ou des Bosniaques ont une fonction essentiellement productive. Tout l’espace est cultivé, les bandes de culture allongées sont serrées les unes à côté des autres, pour maximiser l’espace de culture. L’usage de l’espace est optimisé, c’est-à-dire qu’il n’y a ni chaise ni table qui traduirait un usage récréatif.
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En deuxième lieu, d’autres marqueurs paysagers traduisent des pratiques intensives dans la gestion de l’eau et des cultures. La présence de tonneaux de récupération des eaux de pluie, voire de tuyaux d’arrosage avec mitigeur, indique que l’eau est stockée pour pouvoir commencer à cultiver avant la mise en service des robinets par la mairie (figure 3). Et, effectivement, fin avril, la terre est déjà très travaillée, et les premiers légumes sont sortis de terre, ce qui contraste avec d’autres parcelles peu entretenues à cette période de l’année. Ces signes visibles de cultures intensives et précoces s’expliquent aussi par la possibilité de faire du primeur (certes plus tardif en Suède du fait des conditions climatiques), et donc de vendre sa production plus cher.
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En troisième lieu, les parcelles asiatiques sont particulièrement reconnaissables aux types de cultures pratiquées, qui répondent aux besoins alimentaires spécifiques des communautés asiatiques. Ces paysages s’apparentent au final à des « paysages alimentaires vernaculaires » (Mares et Pena, 2011), puisque dans ces jardins sont cultivés des aliments qu’on ne fait pas pousser ailleurs dans la région, et qui nécessiteraient autrement d’être importés. La forme des cultivars, en bandes serrées et allongées (figure 3), reproduit la forme des jardins vietnamiens. Sont cultivés essentiellement des légumes-feuilles comme de la moutarde brune (gay choy), une espèce vietnamienne de menthe, du brocoli chinois (kailan), du cresson de fontaine (figure 4), du liseron d’eau (variété d’épinard) ou encore de la courge cireuse (pastèque de Chine) cultivée sous des serres spéciales.
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La différence dans les pratiques culturales rend visible une différence culturelle. Les jardins sont une manière de préserver à la fois des variétés traditionnelles et des pratiques alimentaires culturelles en situation de migration. Nos observations rejoignent celles d’Airriess et Clawson (1994) sur les jardins vietnamiens en Louisiane ou de Wekerle (2002) et Baker (2004) sur les jardins de Toronto : les minorités façonnent des « cultural landscapes » (Baker, 2004) reflétant la diversité culturelle des communautés et les rendant visibles dans la ville. Ils construisent aussi des « espaces autotopographiques » (Mares et Pena, 2011) au sens où les espaces de jardin contribuent à créer un sentiment d’être chez soi. Ils permettent ainsi de préserver l’identité alimentaire des immigrés (Gerodetti et Foster, 2016) tout en assurant une continuité alimentaire dans le pays d’accueil.
Sur la base de l’observation paysagère, nous avons recensé 27 des parcelles asiatiques à Almvik sur les 110 parcelles que compte ce lot, soit environ un quart des parcelles. À Vårsången, ce sont 17 parcelles qui ont été identifiées comme telles sur les 58 parcelles du lot (figure 5).
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Les paysages, combinés aux informations délivrées par les services municipaux gérant les odlingslotter lors du premier séjour de terrain en 2015, ont été le point de départ pour identifier des réseaux communautaires d’approvisionnement : la combinaison des méthodes est indispensable pour observer des pratiques dont le volet productif est bien visible, mais dont le volet commercial est plus difficilement observable, du fait de son illégalité et de son caractère largement informel et caché. L’approvisionnement alimentaire communautaire se caractérise alors par un continuum de pratiques et d’ajustements dont la frontière entre formalité et informalité est floue.
Formel/informel : les ressorts d’une agriculture communautaire
À partir de ces marqueurs visibles, l’étude de terrain a mis au jour des pratiques commerciales et des arrangements fonciers informels. De véritables réseaux d’approvisionnement à destination des membres de la communauté se sont mis en place à partir de ce qui est produit sur les jardins municipaux. Les réseaux commerciaux de la communauté asiatique sont particulièrement bien organisés, de manière hiérarchique : à partir d’une vente en gros depuis un ou deux producteurs, des « têtes de ponts » redistribuent ensuite les volumes à des acheteurs individuels, souvent membres de leur famille, dans tout Malmö. La commercialisation ne se fait pas sur la parcelle et nécessite donc une livraison assurée par les producteurs. De manière plus ponctuelle, les cultivateurs approvisionnent aussi des commerces communautaires (notamment quelques restaurants asiatiques). Le reste, c’est-à-dire ce qui n’est pas commercialisé par ces canaux, est vendu directement sur la parcelle selon la demande. Les réseaux communautaires jouent à plein dans ce système commercial et, en premier lieu, les solidarités familiales : ici un père qui produit pour approvisionner le restaurant de son fils, là la fille d’une cultivatrice qui sert de relais pour la commercialisation. Pour les cultures également, certains membres de la communauté sont mis à profit lorsqu’ils se rendent en Chine, pour acheter des semences de légumes-feuilles introuvables en Suède. Parmi la communauté bosniaque, c’est plutôt la vente au détail qui est pratiquée directement sur la parcelle (figure 6). Ce qui est produit (échalotes, oignons, poireaux, épinards, etc.) n’est pas introuvable en Suède. Mais le temps de l’achat est toujours un moment de sociabilité. La clientèle est composée d’habitués, à la fois des Bosniaques et des gens du quartier.
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Les cultivateurs, majoritairement des personnes âgées, sont des paysans urbains qui sont aussi et surtout des commerçants (Peraldi, 2002) ; et c’est en cela que ces migrants sont vecteurs de changements dans les paysages alimentaires urbains.
Enfin, les montages fonciers plus ou moins légaux caractérisent cette agriculture communautaire. Le fait de produire des aliments sur des parcelles de jardin est tout à fait légal. Ce qui l’est moins, c’est qu’une personne cultive plusieurs parcelles. Officiellement, rien d’illégal puisque les parcelles sont louées sous des noms différents, celui d’un cousin ou d’un frère, résidant à Malmö. Dans les faits, ce sont ces jardiniers intensifs qui cultivent les parcelles des prête-noms pour agrandir leur surface cultivée. À Navet, certains agrandissent aussi leur superficie cultivée en occupant l’espace hors des parcelles, dans des interstices gagnés sur des terrains jouxtant les parcelles légales. Ces différents montages fonciers résultent de la volonté de produire plus sur des espaces particulièrement convoités. Ils sont connus des autorités locales mais celles-ci laissent faire, pour des raisons que nous développerons dans la dernière partie de ce texte.
Les différentes pratiques mises au jour dessinent les caractéristiques de ce qui s’apparente à une agriculture communautaire. Pour la définir, nous pouvons partir de la définition du commerce « ethnique », qui est caractérisé par Ma Mung et al. (1992) comme une « activité pratiquée par des personnes qui utilisent et s’appuient sur des réseaux ethniques sur le plan du financement, mais aussi sur le plan de l’achalandage lorsque ce commerce vise en premier lieu comme clientèle la communauté dont est issu le commerçant » (Ma Mung et al., 1992 : 40). Effectivement, les réseaux communautaires et les filières migratoires jouent un rôle important dans l’approvisionnement (en matière de semences par exemple), le fonctionnement et les débouchés de la production agricole. À cette définition de base s’ajoutent des particularités liées à l’activité agricole. L’agriculture communautaire renvoie aussi à des systèmes de culture particuliers dans leur nature, fortement en lien avec le pays d’origine, puisqu’ils doivent répondre aux besoins alimentaires de la communauté. Systèmes qui viennent combler des injustices alimentaires, et notamment l’absence de production locale de produits frais culturellement appropriés ou la faiblesse des points de vente de tels produits dans la ville. Cette agriculture se caractérise enfin par le développement de pratiques informelles à partir de pratiques et d’espaces formels, donc par une dialectique formel / informel dans les stades de production et de commercialisation.
L’agriculture communautaire, du reliquat d’une tradition à une place menacée par les aménagements de la ville durable
Les odlingslotter cultivés par les communautés migrantes peuvent être vus comme la persistance de traditions rurales dans le paysage urbain. Mais la question de leur pérennité se pose au regard des politiques en faveur de la ville durable qui, alors qu’elles sont censées les soutenir, remettent en question leur place au sein de la ville multiculturelle.
Des pratiques légitimées par les pouvoirs municipaux
Les politiques locales, à travers le service municipal gérant les odlingslotter, ferment globalement les yeux sur les pratiques informelles qui se développent à partir des jardins. Cette attitude tolérante ne va pas de soi, compte-tenu des nombreuses tensions qui traversent les micro-sociétés de jardiniers. Dans une enquête menée par la municipalité, c’est une vision idyllique des jardins qui est présentée (Malmö Stad, 2013). Les jardins municipaux sont décrits comme un outil d’intégration des différents groupes sociaux ; en effet, ils sont composés d’une mosaïque de nationalités qui reflète souvent la composition sociale des quartiers où ils se trouvent. On observe ainsi dans les jardins une tendance au regroupement des parcelles par nationalités, si bien qu’il y a des « coins polonais », des « coins irakiens », des coins concentrant différentes nationalités asiatiques, etc. Dans cette enquête municipale, beaucoup de cultivateurs évoquent des liens d’amitié et le sentiment d’appartenance à une communauté. Le jardin donnerait la possibilité de partager une passion avec ses voisins de parcelle. La réalité est tout autre, puisque les différentes pratiques relevant de l’agriculture communautaire cristallisent les conflits de voisinage sur les odlingslotter. Le premier point d’achoppement concerne les différents usages des parcelles, qui reflètent des conceptions différentes de ce qu’est un jardin. Pour les populations relativement âgées pratiquant une agriculture de loisir, la parcelle est un lieu d’agrément, où poussent arbres, fleurs, pelouse, éventuellement quelques légumes d’appoint. Ces parcelles sont dédiées à la détente, comme en témoigne la présence de salons de jardin et de barbecue. Pour les immigrés pratiquant une forme d’agriculture intensive, la parcelle est un lieu productif vital pour alimenter la communauté et pour se procurer un revenu ; c’est pourquoi le moindre millimètre est cultivé. Les enjeux esthétiques et paysagers sont les points nodaux des conflits : les voisins se plaignent d’une dégradation du paysage liée aux plastiques et aux serres. Derrière ces arguments esthétiques se cache un mécontentement envers les pratiques intensives, relayé par des plaintes auprès des services municipaux contre la « mer de plastique » qui défigurerait les jardins (entretien avec les services municipaux). Les propos d’une jardinière âgée d’origine polonaise sur le jardin d’Almvik reflètent la vision exoticisée et négative des parcelles communautaires : « je ne sais pas si on a le droit [d’avoir plusieurs parcelles], mais ça, ce sont les Chinois3. Il y a beaucoup, trop de serres. Avant, ce n’était pas comme ça. […] Les Chinois viennent surtout tôt le matin et tard le soir, avec des sachets plastiques, pour récolter leur production. […] L’un d’eux a 10 parcelles. Ils font pousser des légumes bizarres, des salades avec des très grandes feuilles, et aussi des concombres géants. Je ne sais pas ce qu’ils en font, ça fait au moins 2 m de long. Et ils viennent avec des plastiques, ils coupent et ils emballent, et un jour je leur ai demandé ce qu’ils en faisaient, ils m’ont dit ‟ ça, c’est 45 sek [4,6 €] le kilo ” ». C’est d’abord la visibilité de ces parcelles communautaires et l’activité intensive qui s’y pratique qui dérange la tranquillité des voisins. Les mécontentements peuvent aussi être accentués, à certains endroits, par l’augmentation du prix de location des jardins (par exemple à Navet). Cette hausse répercute l’augmentation des coûts de fonctionnement, et notamment de la consommation en eau, « certainement en lien », selon l’employée municipale responsable des jardins, avec les cultures intensives et les espèces cultivées gourmandes en eau. Ces divergences sont analysées par cette dernière comme le reflet de tensions racistes, comme l’illustre cet extrait d’entretien : « Mais du coup ça clashe avec les personnes qui sont là depuis plus longtemps et qui veulent faire pousser des fleurs. Ils m’appellent pour se plaindre qu’un plastique s’est envolé et a atterri dans leur jardin…et ils disent des choses racistes sur les Asiatiques. Ils disent qu’ils sont ‟ envahis ” par les Chinois ». Le deuxième point d’achoppement entre jardiniers traditionnels et jardiniers communautaires concerne les vols de légumes. Les premiers argumentent que les pratiques intensives des seconds seraient à l’origine de la recrudescence des vols de légumes, en fournissant plus de butin potentiel aux voleurs. La mauvaise fréquentation des jardins entraînant vols et dégradations (jet de détritus et saccage de sanitaires, par exemple) justifie la requête de certains cultivateurs auprès des services municipaux pour leur demander de construire des barrières plus hautes ou de fermer à clé l’enceinte des jardins. Requête qui n’a pas abouti puisque que les odlingslotter sont des espaces ouverts et publics aménagés dans des espaces verts urbains.
Malgré ces tensions latentes, et bien que conscients de l’existence de trafics fonciers et commerciaux, les services municipaux ferment les yeux, ce pour plusieurs raisons. La première série de raisons est liée aux modalités d’inspection des parcelles : si chaque parcelle est inspectée une fois par an (contrôle de l’entretien et du respect des règles nécessaires au renouvellement du contrat annuel de location), l’inspection consiste en un contrôle oculaire peu regardant sur les détails. De cette modalité d’inspection découle le fait que les pouvoirs publics ne peuvent pas intervenir sur les montages fonciers car ils ne peuvent rien prouver : officiellement, les parcelles sont au nom de personnes différentes. En outre, ces arrangements rendent service à la municipalité, qui préfère que quelqu’un ait deux parcelles de cette manière, plutôt qu’une parcelle reste vacante le temps de sa réattribution ou ne soit pas entretenue. Les montages fonciers informels sont donc tolérés parce qu’ils réduisent les coûts d’entretien des parcelles non-louées. Les pratiques commerciales à la limite du légal sont aussi difficiles à prouver. Il faudrait prendre les gens sur le vif, en train de vendre à la sauvette sur leur parcelle, et appeler la police. Mais la municipalité ne conçoit pas son rôle comme celui d’une autorité ; elle gère seulement l’attribution du foncier et son entretien. Et les jardins doivent rester un endroit agréable, de loisir. Nous faisons l’hypothèse qu’une deuxième série de raisons tient aux fonctions de justice sociale et environnementale des espaces d’agriculture communautaire. Ils ont une légitimité sociale indiscutable, car ils pallient le faible accès aux produits frais ethniques à Malmö. En effet, la ville est située au cœur d’une région de grandes cultures intensives, la Scanie ; l’agriculture de proximité fournissant la ville est peu développée, encore moins pour les produits ethniques. Par exemple, dans le centre de Malmö, il n’existe que deux magasins asiatiques qui proposent des fruits et légumes frais, importés de Thaïlande par l’intermédiaire de grossistes. L’agriculture urbaine communautaire est envisagée par la municipalité comme un moyen pour les communautés de s’approvisionner en produits culturellement appropriés. Qui plus est, ces espaces agricoles urbains sont considérés par les services municipaux comme un moyen d’accéder à des espaces de nature, dans la ville suédoise qui dispose le moins de superficies d’espaces verts par habitant.
L’attitude tolérante des services municipaux contraste avec un contexte métropolitain de transformations engendrées par la politique de la ville durable, sur laquelle Malmö a fondé son modèle de développement et sa réputation. Les espaces de l’agriculture urbaine prennent des formes renouvelées, qui ne sont pas toujours favorables aux communautés migrantes.
La place de l’agriculture communautaire interrogée par les aménagements de la ville durable
La question de la pérennité des espaces agricoles communautaires se pose au regard des dynamiques de verdissement de la ville et de la politique alimentaire de la ville, a priori favorables au maintien voire à la création d’espaces agricoles intra-urbains. Mais les grands projets urbains, pensés selon un modèle de durabilité, tendent à reconfigurer les espaces de l’agriculture urbaine et, paradoxalement, à évincer les migrants des jardins.
Malmö a fondé son développement urbain sur le modèle de la ville compacte. Aussi, la ville se construit-elle à l’intérieur des limites du périphérique, en particulier au sud, dans les quartiers de Hyllie et Lindängen, précisément là où est concentrée la population immigrée, en particulier d’origine asiatique. La ville se renouvelle aussi, en particulier dans l’écoquartier Bo01de Västra Hamnen, modèle du genre construit en lieu et place des anciens chantiers navals. Par jeu de compensation, les nouveaux projets d’aménagement comportent des odlingslotter pour remplacer les lots supprimés du fait de la construction ou des réaménagements. Or, dans ces différents projets, les nouveaux odlingslotter sont conçus selon des formes différentes des odlingslotter traditionnels, ce qui fait évoluer de facto la population des cultivateurs. À Kröksbacken, les odlingslotter traditionnellement occupés par des immigrés d’origine grecque, ont été supprimés et remplacés par les nouveaux odlinsglotter de Hyllierankan (figure 7). Dans l’écoquartier de Västra Hamnen, les odlingslotter consistent en des boîtes hors-sol pour le jardinage (figure 7) ; les prix de location sont plus chers par rapport aux odlingslotter classiques car ils sont calculés par rapport à la boîte, et non à la superficie. L’agencement des parcelles répond à une nouvelle demande sociale envers l’agriculture urbaine : ce sont de plus petites parcelles, pour cultiver sur une surface raisonnable sur son temps de loisir. D’où une fréquentation des parcelles de jardin par de nouvelles populations décrites par les services municipaux comme des « hipsters » pour qui cultiver soi-même est une « mode », des jeunes, des familles motivées par le désir d’apprendre à leurs enfants à jardiner et par la possibilité de pratiquer une activité en plein-air. L’absence d’enquête auprès de ces nouveaux usagers ne permet pas de démontrer le rajeunissement des jardiniers ni l’évolution des motivations pointées par la municipalité. Mais ces nouvelles tendances illustrent la multiplicité d’usages et de visions des jardins, sans que la municipalité n’établisse de préférence ou de hiérarchie entre les usages. Quoiqu’il en soit, ces nouvelles formes des odlingslotter ne correspondent plus aux usages ni aux pratiques des communautés immigrées (parcelles trop petites et mal localisées par rapport aux quartiers d’habitation).
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La diversification des usages et des initiateurs des jardins dans les grands projets d’aménagement durable remet aussi en question la présence communautaire dans les odlingslotter. Le grand projet actuel de Malmö est celui de Lindängelund (figure 8), sur un espace de 100 ha qui alterne pour l’instant des espaces résidentiels, un vaste parc, une pelouse en attente d’être aménagée et des terrains vagues. Les jardins occupent une place de choix dans le projet, puisque le jardin botanique de Katrinetorp ainsi que les odlingslotter de Vårsången sont inclus dans le périmètre du projet. Le principe du projet est un aménagement « par le bas », au gré des initiatives publiques ou privées. L’agriculture urbaine s’y développe ainsi du fait des compagnies immobilières privées, qui ont installé des espaces de jardin (environ 100 parcelles de 20 m² chacune) réservés à titre gratuit aux occupants des nouveaux immeubles résidentiels. L’agriculture urbaine se développe aussi sous forme de jardin d’insertion et de jardins destinés aux scolaires (figure 8). Ces nouveaux usages provoquent une ouverture forcée des odlingslotter de Vårsången, car y ont été développées des parcelles pédagogiques gérées par l’association ConcreteFarming (figure 8), trois parcelles mises à disposition de n’importe qui par la ville de Malmö, ainsi qu’une parcelle gérée par Malmö Naturskola. Or, les cultivateurs traditionnels ne voient pas cela d’un très bon œil. Non seulement, ils ne trouvent pas juste de payer un droit de location alors que les nouvelles parcelles collectives sont gratuites pour leurs usagers. Ils sont aussi inquiets de voir leurs parcelles disparaître à cause du projet d’aménagement. Qui plus est, la fréquentation accrue du lot expose l’informel au regard public et constitue une menace potentielle pour les pratiques communautaires.
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On peut émettre l’hypothèse que les populations immigrées de cultivateurs vont être peu à peu évincées des espaces de l’agriculture urbaine au gré des projets d’aménagement. Au nom de la durabilité, ces populations se trouvent exclues de ces espaces, pas volontairement, mais parce que les odlingslotter dans leur nouvelle version ne répondent plus aux critères de cultures (grandes parcelles, accessibilité, etc.) recherchés par les communautés immigrées traditionnellement présentes dans ces espaces.
S’intéresser à ce que mangent les villes au prisme de ce que produisent les communautés immigrées a mis au jour des aspects peu étudiés des dynamiques de l’agriculture urbaine sous l’effet de deux phénomènes paradoxalement antinomiques : le rôle des populations immigrées ou étrangères dans les espaces de l’agriculture urbaine et l’évolution de la place de ces espaces dans les projets d’aménagement de la ville durable. L’exemple de Malmö montre que les migrants internationaux participent aux dynamiques de l’agriculture urbaine ; ils tendent à recomposer les systèmes de production agricole intra-urbains en lien avec une demande ethnique. Les paysages alimentaires produits par les minorités sont aussi une affirmation de la différence, dans et par l’espace. La biodiversité culturale devient le marqueur de leur identité culturelle. Finalement, on assiste à l’affirmation, ou du moins à la persistance, d’espaces productifs dans et pour la ville. L’agriculture communautaire transforme des espaces d’aménité que sont les jardins municipaux en des espaces agricoles productifs intensifs. Il faut toutefois relativiser les résultats : le manque d’entretiens auprès des jardiniers immigrés empêche de savoir s’ils ont des motivations militantes relevant de la justice alimentaire, si derrière la pratique d’une agriculture communautaire se cache un objectif de résistance… ou si ces pratiques sont purement lucratives. L’éventuelle dimension politique de ces jardins à Malmö reste à démontrer. L’intégration d’espaces agricoles dans les projets d’aménagement et de verdissement de la ville joue en la défaveur des communautés immigrées, qui voient leurs espaces de production se réduire ou être refaçonnés selon des critères qui ne correspondent plus à leurs usages ni à leurs besoins. L’évolution de la forme des jardins pourrait alors être interprétée comme le signe d’une certaine gentrification des espaces de l’agriculture urbaine menant à l’exclusion des populations immigrées de ces espaces, même si cette hypothèse demanderait à être étayée par une enquête plus approfondie. Cette étude vient donc aussi questionner le modèle de la ville durable qui est porteuse de nouvelles inégalités pour certaines populations : ainsi, le modèle suédois de la ville durable n’est pas nécessairement juste du point de vue alimentaire.
CAMILLE HOCHEDEZ
Maître de conférences en géographie, EA RURALITES- Université de Poitiers
Je m’intéresse aux relations ville-campagne à travers le prisme de l’agriculture. Mes recherches portent sur les dynamiques agricoles dans les espaces urbains et périurbains, en lien avec les évolutions environnementales en Europe (développement de l’agriculture biologique, circuits courts, changement climatique, ville durable). Dans une démarche de géographie sociale, mes recherches récentes abordent ces questions sous l’angle de la justice alimentaire et des vulnérabilités socio-économiques, en particulier en étudiant les recompositions agricoles sous l’effet des migrations internationales.
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Photographie de couverture : Parcelles du lot de jardins municipaux (odlingslotter) de Vårsången, quartier sud de la ville de Malmö (Hochedez, 2016)
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- La statistique suédoise distingue deux catégories : les personnes nées à l’étranger, et les personnes nées en Suède de deux parents nés à l’étranger. Ainsi, en 2014, 31 % des habitants de la commune de Malmö étaient nés à l’étranger, tandis que 11 % étaient nés en Suède de deux parents nés à l’étranger. L’ensemble des personnes relevant de ces deux catégories est regroupé dans la catégorie « personnes avec un background étranger ». Cela ne correspondant pas aux catégories françaises, nous employons dans notre texte l’expression « population immigrée ou étrangère » pour désigner toutes les personnes relevant de cette catégorie statistique générique. [↩]
- La notion de paysage alimentaire (food landscape) est ici entendue comme l’ensemble des espaces agricoles, du tissu commercial et des filières agroalimentaires permettant l’accès d’un groupe donné à des produits alimentaires. [↩]
- La personne enquêtée utilise le nom « Chinois » comme un terme générique pour désigner toutes les populations asiatiques, sans distinguer les nationalités, signe d’un certain racisme, ou du moins d’un mépris envers ces populations. [↩]