Chroniques / La nuit en ville et les nuisances sonores, cet ennemi intime – La régulation par les dispositifs sociotechniques

Raphaël Pieroni

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La nuit en ville est l’objet d’une attention récente portée aussi bien par le monde de la recherche que celui de la politique. Qualifiée de nouvelle « frontie» par le sociologue Murray Melbin (Melbin 1987), la nuit urbaine est aujourd’hui intimement associée aux nuisances sonores. Devenues un ennemi intime1  de la nuit, les nuisances sonores sont invoquées par la plupart des villes européennes comme une source de conflits associée à l’inévitable intensification des usages et des pratiques de la nuit. Face à l’ennemi, les villes inventent des plans et des dispositifs d’action : en 2013, Barcelone déploie son plan du silence2 en adoptant le slogan « Pleashhh remember that the neighbours want to rest », la même année Paris innove en mettant en place une forme de médiation artistique et sociale, les pierrots de la nuit3 tandis que Genève parie sur les chuchoteurs4.

 

Le silence : nouveau luxe (Les pierrots de la nuit, 2014)

Le silence : nouveau luxe (Les pierrots de la nuit, 2014)

 

Cet article propose de revenir sur l’un de ces dispositifs de régulation des nuisances sonores nocturnes, Sonitus5 . Il s’agira tout d’abord de distinguer le bruit des nuisances sonores pour ensuite détailler les différents éléments du dispositif et ses échelles d’action. Nous verrons comment les éléments du dispositif peuvent faire l’objet d’appropriation et de résistance dans un contexte où la nuit devient une ressource pour la ville et ses usagers. Nous conclurons sur la capacité du dispositif à révéler quelques-uns des enjeux sociaux, politiques et spatiaux autour de la nuit en ville.
Il s’agit ici de répondre au manque de travaux empiriques sur les processus de régulation des nuisances sonores en particulier et de la nuit en général. Pour cela, les méthodes suivantes ont été mobilisées : entretiens ouverts avec des membres d’une association de riverains (6 entretiens au total), entretiens ouverts avec des membres des autorités locales (4 entretiens au total), entretiens ouverts avec des noctambules (6 entretiens au total), entretiens collectifs ou focus group (2 groupes de 8 personnes au total), observation prolongée sur le terrain, observation semi-participante au sein d’une association de lobby pour la vie nocturne6 .

 

Bruit et nuisances sonores

« La France ne lutte pas assez contre les nuisances sonores »7 , « Prague authorities threaten to curb nightlife noise with drastic measures »8 , « Genève traîne des pieds contre le bruit »9 , sont tout autant d’accroches qui nous indiquent que le bruit et les nuisances sonores sont désormais confortablement installés dans le paysage médiatique européen. Cependant, le bruit est-il l’équivalent des nuisances sonores ?
Si la notion de bruit renvoie irrémédiablement à une manifestation sonore, celle-ci n’est pas forcément exprimable en décibel dB(A) capable de nuire physiquement aux ouïes du public. C’est le cas lorsque le bruit court au sujet d’une rumeur ou alors lorsque la parution d’un ouvrage fait du bruit. Cependant, il est assimilé aux facteurs négatifs exerçant une contrainte sur l’environnement depuis l’apparition, à la fin du 20ème siècle, du domaine de la santé-environnementale.

Dans ce registre, l’OMS publie les chiffres de charge de morbidité imputable au bruit en Europe10 . On apprend que pendant la nuit un européen sur cinq est exposé à une pollution sonore si forte qu’il peut en devenir malade. Ce qui fait du bruit le deuxième facteur environnemental de cause de maladies en Europe de l’Ouest, juste après la pollution atmosphérique.
L’Union européenne s’empare également du sujet et fait de la lutte contre le bruit un enjeu politique majeur donnant lieu au financement de programmes spécifiques qui visent à sa réduction. C’est le cas du projet harmonica qui d’ici à la fin 2014 est en charge de « développer et de diffuser des outils innovants (indice de bruit simple à appréhender) et pédagogiques d’information et d’aide à la décision »11  pour une meilleure gestion de l’environnement sonore. L’apparente nécessité de recourir à des indices et à des outils innovants pour la mesure du bruit indique que, quand bien même son niveau est aujourd’hui quantifiable et donc objectivable (dB(A)), cela ne suffit pas à en faire un élément d’arbitrage en soi. C’est précisément ici que se situe la fine ligne de démarcation entre ce qui relève du bruit et ce qui relève des nuisances sonores. Si le bruit est mesurable et donc objectivable, cela semble être plus complexe dans le cas des nuisances sonores. La notion même de nuisance implique une part d’appréciation subjective pouvant varier en fonction d’un nombre important de facteurs tels que le contexte socio-culturel, l’âge, la profession, le type de quartier, rendant ainsi son appréciation difficile. Les nuisances sonores sont un phénomène complexe à mesurer aussi bien lorsqu’il s’agit d’individus que dans le cas de l’exploitation d’un établissement public.
Pour Genève, le canton est le niveau administratif compétent en la matière et applique la directive « Détermination et évaluation des nuisances sonores liées à l’exploitation des établissements publics » édictée par l’association Cercle bruit12 . Si la directive détermine des valeurs limites applicables aux transmissions du bruit dans un contexte musical, elle précise également qu’il existe des sources sonores pour lesquelles il n’y a pas de valeurs limites. C’est le cas des bruits liés à des comportements pour lesquels la loi prévoit de manière générale que : « la gêne sera évaluée sur la base d’un constat effectué lors d’une inspection locale, en fonction de critères d’audibilité et d’émergence plutôt qu’en procédant à des mesurages de niveaux sonores qui ne sont le plus souvent pas reproductibles » (directive du 10 mars 1999). Pour les comportements de la clientèle et le service sur une terrasse, la loi prévoit spécifiquement qu’en « application du principe de prévention, on évaluera la perception réelle du bruit, en estimant son émergence et son audibilité13  » (ibid). Les experts en charge de l’évaluation des nuisances tiendront compte également des heures d’exploitation de la terrasse, du degré de sensibilité attribué aux parcelles voisines, du type d’établissement ainsi que des mesures de protection prévues (paroi, avant-toit, grandeur de la terrasse) (ibid). La tâche se complexifie encore pour l’expert lorsque les quartiers présentent des particularités (quartier résidentiel, densité d’établissements publics élevés, etc.) ou lorsque l’établissement bénéficie d’une situation spéciale (tradition, histoire, tourisme, etc.) (ibid).
Cette brève incursion dans le texte de loi genevois nous indique que le bruit devient une nuisance dès le moment où il y a une gêne exprimée et que son évaluation doit être mise en relation avec les caractéristiques spatiales et sociales du lieu. Dans les faits, le bruit devient une nuisance sonore dès le moment où une plainte ou une pétition est adressée aux autorités compétentes.

Sonitus nox

En 2013, dans un contexte d’augmentation de plaintes pour nuisances sonores (Dabrinville et Pieroni 2013), les autorités de la Ville de Genève et plus particulièrement le département de l’environnement urbain et de la sécurité14  (DEUS) décident de la création d’un dispositif de gestion des nuisances sonores appelé Sonitus. Le dispositif vise à la réduction des nuisances sonores par la mise en place progressive d’un ensemble d’éléments tels qu’un système de monitoring cartographique, une augmentation de la présence policière, le remplacement des verres en verre par des récipients en plastique, l’installation de tentes « anti-bruit », le recours à des chuchoteurs, et parfois par la mise en place de limiteur sonore. Mais au fait, qu’est-ce qu’un chuchoteur ?

Un chuchoteur en place (GHI, 2013)

Un chuchoteur en place (GHI, 2013)

 

Contenir les décibels en trop des noctambules par le recours au chuchotement, c’est bien le projet de l’association genevoise des chuchoteurs15  créée en février 2013. L’association propose ses services de chuchotement à tout établissement public ou pour tout événement culturel sur le canton de Genève. Munis d’un gilet de sécurité, les chuchoteurs parcourent la rue et les manifestations culturelles en jouant de leur index à qui veut bien hausser le ton. L’association attend des personnes recrutées qu’elles soient « disponibles, tolérantes, patientes et surtout capable de se contenir quand on se fait insulter » (Chuchoteur, entretien n°4, 2014). L’association est à ce jour composée uniquement d’hommes, ce que regrette son président qui déplore l’absence de femmes dans son équipe. Ce dernier point pourrait clairement faire l’objet d’un développement par les études sur le genre… l’appel est lancé !
Concrètement, le dispositif Sonitus est déployé afin de juger des possibilités de restrictions ou de prolongation des horaires d’ouvertures possibles pour l’exploitation des terrasses des bistrots genevois. Son échelle d’application s’étend sur l’ensemble de la ville de Genève mais notons qu’il est amené à se diffuser car il fait régulièrement l’objet de présentations dans d’autres villes suisses. Il regroupe une série d’éléments humains (présence policière municipale, chuchoteurs) et non humains (récipients en plastique consignés, tentes « anti-bruit », limiteur sonore, application cartographique) dont l’ensemble forme un dispositif sociotechnique qui s’articule sur plusieurs échelles géographiques et dont les interactions participent de la gestion des nuisances sonores nocturnes. Par dispositifs sociotechniques, nous nous référons simultanément à l’approche sociotechnique de Latour qui a montré la manière dont l’agir est distribué au sein de dispositifs fait d’humain et de non-humain (Latour et Guilhot 2006) et à l’approche foucaldienne où le dispositif s’inscrit dans une relation de pouvoir (Foucault 1993). Afin de rendre compte du dispositif, je suggère ici de recourir aux outils de la sociologie des techniques en portant une attention particulière sur les objets et les interactions qui composent le dispositif.

 

Réguler à tâtons

L’École de Médecine, rebaptisée de manière informelle en « la rue de la soif » (Chuchoteur, entretien n°2, 2013) se situe au centre-ville de Genève, en Suisse et est l’une des rues concernées par Sonitus. Elle est un type de rue que l’on retrouve dans la plupart des centres-villes européens où les phénomènes de gentrification sont à l’œuvre et conduisent à un changement progressif des arcades d’artisans en cafés/bars branchés. Chaque fin de semaine, un nombre important de personnes participent au rituel de la vie nocturne urbaine en se rassemblant dans les cafés/bars, sur les terrasses et plus largement dans la rue. Écoutons l’avis d’un riverain au sujet de sa rue : « c’est vrai que ça peut être sympa mais la rue est devenue un bar, c’est la rue qui est devenue un bar, (le bar est devenu) l’espace public et ça fout un boucan insupportable » (Riverain, entretien n°5, 2013).
Comme le laisse envisager cette citation, le changement de statut de la rue lié aux pratiques de vie nocturne n’est pas sans conséquence sur les rapports entre les différents acteurs en présence (usagers et tenanciers des cafés/bars, riverains). Face à ce qui se constitue progressivement comme un problème public (Gusfield 2008), les différents services des autorités locales mettent en place une série de mesures de régulation (affiches de sensibilisation, sanctions des autorités et restrictions des horaires d’ouverture, etc.) qui sont relayées par la presse locale comme les éléments de la « lutte » contre les nuisances sonores16 . Les sanctions concernent 28 bars parmi les plus populaires de Genève, qui n’ont pas obtenu pour l’année 2013 la dérogation annuelle du Service du commerce (SCOM)17 , qui leur permettait d’ouvrir jusqu’à 2h du matin. Celles-ci ne laissent pas indifférents les tenanciers et la clientèle des bistrots en question qui se regroupent sous la forme de collectifs18  de résistance et de protestation où l’humour et la satire côtoient des manifestations publiques qui ont pour but la dénonciation de mesures jugées « anti-jeunes et anti-fêtes19  ».

Bref, les bars ferment à minuit (Notre bruit leur nuit20 , 2013)

Parmi l’ensemble des collectifs, « notre bruit leur nuit » est crée pour l’occasion par un ensemble de créatifs (photographe, peintre, graphiste). Ceux-ci développent une forme de concours sur la plateforme « notrebruit.ch » qui a pour but la publication en ligne d’images détournées pour protester contre la fermeture des bars à minuit.

[vimeo]http://vimeo.com/72810745[/vimeo]

 

Il s’ensuit une vague de protestations digitales pour « manifester de manière silencieuse, grâce à la création, pour la liberté d’expression nocturne et démontrer que Genève est solidaire et créative21  ».

Le digital pour la survie de la nuit (Journal 20 minutes, 19 février 2013)

Le digital pour la survie de la nuit (Journal 20 minutes, 19 février 2013)

 

L’accroche de l’article ci-dessus révèle qu’il ne s’agit plus simplement de lutter contre la fermeture de 28 bars du centre-ville mais que désormais c’est la nuit dans sa totalité qui est concernée. La nuit apparaît dès lors comme un objet de conflits, un espace-temps qu’il s’agit de préserver à la manière d’un bien commun.

Manifestation (Tribune de Genève, 2 mars 2013)

Manifestation (Tribune de Genève, 2 mars 2013)

 

Un bien commun pour lequel les manifestants revendiquent l’importance sociale et culturelle et dont les expressions seraient mises en danger par des sanctions administratives.
C’est dans ce contexte de vives protestations face à des formes de régulations à tâtons que la Ville de Genève et le département de l’environnement urbain et de la sécurité (DEUS) imaginent un dispositif capable de reprendre la maîtrise de l’espace public : « le gros problème c’est la rue de l’école de médecine (…), c’est ce qu’il y a de plus compliqué à résoudre et qu’on a perdu la maîtrise de l’espace public. » (DEUS, entretien n°2, 2013). Visiblement, la question des nuisances sonores et l’augmentation des plaintes des riverains engendrent un sentiment de perte de maîtrise de la rue et des pratiques qui s’y déroulent. Pour résoudre cette question, un responsable politique du projet signale que la lutte contre les nuisances sonores « passe par une addition de mesures qui visent à faire prendre conscience (du problème du bruit) à l’ensemble des acteurs » (DEUS, entretien n°2, 2013). Nous comprenons dès lors que le bruit en tant que nuisance est devenu l’objet d’un ensemble d’acteurs qui collectivement sont appelés à prendre part à la résolution du problème.
Nous allons voir maintenant comment le dispositif vise à reprendre la main sur l’espace public en mobilisant des acteurs dont les interactions se déploient sur plusieurs échelles géographiques.

La régulation, entre cartographie, corps et objets

La carte ne montre pas, elle accomplit !

A l’échelle de la ville, une base de données est créée pour d’une part, identifier les établissements ouverts jusqu’à deux heures du matin et d’autre part, pour enregistrer les mesures prises et interventions effectuées par les agents de la police municipale pour chaque établissement. La base de données est couplée à un système cartographique qui selon une des responsables du système à l’avantage de donner « une vision d’ensemble et rapide des établissements à problèmes » (DEUS, entretien n°3, 2013). L’application est conçue pour identifier les empiétements22  des différentes terrasses et ainsi s’assurer qu’elles soient conformes aux autorisations délivrées.

Extrait cartographique de Sonitus (Documentation de présentation de Sonitus, 2014)

Extrait cartographique de Sonitus (Documentation de présentation de Sonitus, 2014)

Cette étape du dispositif vise explicitement à identifier les établissements considérés comme potentiellement problématiques et donc générateurs de nuisances sonores. Par le fait qu’elle enregistre et montre les interventions, la base de données, couplée au système cartographique, est en quelque sorte le socle visuel du dispositif imaginé pour une « meilleure gestion et maîtrise de l’espace public »23  la nuit. Le rôle de la carte dans la fabrication des territoires a été démontré par le courant de la cartographie critique (Harley 1989 ; Cosgrove 2008 ; Wood 2012). Selon cette perspective, il s’agit de se demander « what the map shows or how does it show something but what does the map do ! what does it accomplish » (cité dans Pickles 2004, p.56). Dans notre cas, la base de données cartographique du dispositif Sonitus, en construisant une réalité visible et quantifiable, participe à la création d’un espace légitime pour l’intervention des autorités locales. Ce qui semble être confirmé par l’un des responsables politique du projet : « La mise en place d’une base de données et d’un système de cartographie n’est pas une fin en soi mais il faut le voir comme un outil pour améliorer la situation. Elle nous donne une vision d’ensemble et rapide des établissements à problème. La carte permet le travail de proximité et minimise le temps de réaction en coordonnant les services concernés. » (DEUS, entretien n°2, 2013). Au-delà du caractère performatif de la carte (Gaberell et Debarbieux 2014), le responsable nous indique ici que l’enjeu du système réside également dans sa capacité à diminuer le temps d’attente des riverains une fois la plainte déposée, l’administration compétente et les exploitants. Un temps d’attente qui peut atteindre actuellement 1 voire 2 ans.
Le système cartographique est ainsi investi de fonctions de coordination et d’aide à la décision qui tout en créant une réalité « objectivable » (la présence de cafés générateurs de nuisances) semblent être l’une des conditions de reprise de la maîtrise de l’espace public nocturne. Cependant, la base de données, dont il est prévu qu’elle soit accessible publiquement, ne fonctionne pas de manière autonome mais est alimentée régulièrement par le travail de terrain d’agents municipaux. La présence sur le terrain de ces agents, dont les horaires de travail ont été récemment étendus, met en évidence une échelle plus fine du dispositif, celle du corps comme prolongement et condition du système cartographique.

Le corps, prolongement et condition du système cartographique

Si la première partie de cet article a montré le rôle de la base de données et de la carte dans la création d’un espace légitime d’action, la partie qui suit concerne, quant à elle, l’échelle de la rue et plus particulièrement des interactions de proximité entre les agents municipaux, les chuchoteurs et les usagers de la rue en question.
Les premiers sont les seuls compétents pour alimenter la base de données. Le rapport institutionnel entre les agents et les autorités semble être garanti par la base de données qui fonctionne à la manière d’un objet-frontière (Star et Griesemer 1989 ; Trompette et Vinck 2009). En effet, celle-ci est prévue pour créer un espace de savoir partagé par un ensemble d’acteurs aux statuts et prérogatives hétérogènes (agents municipaux, chefs de service, tenanciers, etc.).
Au-delà de la base de données les entretiens menés avec les policiers municipaux révèlent des enjeux qui sont propres au travail de terrain dans la rue. C’est le cas du port de l’uniforme qui se révèle être une difficulté pour l’acte de médiation : « c’est clair, quand on arrive avec l’uniforme, les gens partent, (ils) peuvent devenir agressifs des fois ou alors juste nous dire qu’ils sont dans l’espace public et qu’on n’a rien à leur dire. » (APM, entretien collectif n°1, 2013). Le port de l’uniforme est d’autant plus problématique dans le cas où le nombre de noctambules est important : « c’est clair, si on a face à nous une cinquantaine de personnes et qu’on voit que ça va être délicat d’intervenir, on préfère rester en retrait. » (Ibidem).
Cette proximité avec le terrain laisse apparaître des difficultés liées à la fonction et l’apparence des acteurs de la régulation. Le constat est partagé par les membres de l’association des chuchoteurs24  qui exercent dans la rue : « On est sans cesse proche de là où ça se passe et pour gérer tout ça il faut être proche des gens et pas être trop imposant tout en utilisant des gestes clairs, montrer aux gens qu’il faut chuchoter et chuchoter soi-même, bref un équilibre qui est pas toujours facile. » (Chuchoteur, entretien collectif n°1, 2013). Le processus de régulation implique ici une proximité immédiate aux usagers de la rue en exposant le chuchoteur à un jeu d’équilibre de médiation constant. Une proximité qui selon un des responsables de l’association requiert également des compétences de gestion du corps et de ses émotions : « c’est très difficile, (il ne faut avoir) aucune crainte par rapport aux hommes, aucune timidité, (des chuchoteurs) qui osent aller vers les gens, sans avoir des a priori » (Ibidem). Des compétences que les chuchoteurs vont chercher généralement en se formant avec des professionnels du monde artistique, principalement dans le théâtre et le cinéma, « des gens qui ont fait de la comédie, justement pour pas avoir cette crainte, cette timidité. » (Ibidem).
Bien que les agents et les chuchoteurs s’accordent à dire qu’ils constatent des améliorations dans la rue depuis leur présence, les entretiens ainsi que l’observation prolongée dans la rue mettent en évidence également les difficultés liées à la présence sur le terrain et le rapport de proximité quotidien avec les usagers. A ce sujet, un riverain de l’École de médecine s’exprime sur le rôle de leur présence : « oui, c’est bien, la police municipale, les mecs qui chuchotent, mais on a besoin de concret là, vraiment, des choses qui font que le bruit diminue, je sais pas moi des contrôleurs de décibels par exemple. » (Riverains, entretien n°4, 2013).

Les objets, acteurs du collectif hybride

Si la nuit a longtemps été considérée comme un espace de liberté et de loisir (Pène 2006), un temps de la ville où la transgression des normes et des contraintes habituelles marque une distanciation avec le comportement usuel, elle est devenue aujourd’hui un objet de régulation des politiques publiques (Chatterton 2002 ; Pieroni 2011 ; Challéat 2013). On ne s’étonnera donc pas de voir se multiplier des initiatives qui visent à défendre le droit à la ville de nuit avec notamment la création de conseils dédiés25 , à faire l’état des lieux de la nuit26 , à « traverser la nuit »27  pour en dégager la substance, et à la personnifier par l’élection de Maire de Nuit.

Affiche de campagne : "Maire de la Nuit à Paris" de Clément Léon R. (JDD, 2014).

Affiche de campagne : « Maire de la Nuit à Paris » de Clément Léon R. (JDD, 2014).

Aux côtés de l’invention de formes de gouvernance nocturne, les villes sont également le lieu où sont testés des dispositifs de régulation. Des dispositifs dont les objets pourraient être le prolongement matériel d’un cours d’action plus large, celui de la normalisation de la nuit en ville et de ses pratiques ? C’est peut-être le cas de Sonitus, un dispositif sociotechnique où l’agir est distribué et partagé avec les objets qui participent du caractère hybride du collectif (Barbier et Trepos 2007). Parmi ces objets, on retrouve l’introduction par les tenanciers de verres en plastique et l’installation de tentes « anti-bruit ». Il apparaît ici que le processus de régulation n’est pas unidirectionnel, des autorités locales vers les tenanciers, mais que ceux-ci participent également de la régulation par la mise en place d’objets. En effet, ceux-ci ont prévus de remplacer progressivement les verres en verre par des récipients en plastique consignés dont le clinquement serait moins bruyant. Acteurs du dispositif, les verres en plastique doivent également participer de la diminution des déchets dans la rue par le fait qu’ils soient consignés. Il est également prévu que ces « verres silencieux » arborent les couleurs des cafés-bars propriétaires fonctionnant ainsi comme marqueur géographique des consommations et par extension des consommateurs. Cependant, l’évocation des verres suscitent un certain nombre de réticence auprès de la clientèle, « j’ai l’impression de boire une bière dans une fête d’étudiant, si je vais dans un bar c’est pour boire une vraie bière, dans un verre un verre quoi ! » (Clientèle, entretien n°3, 2014) ou alors « super, ils vont continuer à traquer les gens encore longtemps ? » (Clientèle, entretien n°4, 2014).

Verre silencieux (Raphaël Pieroni, 2014)

Verre silencieux (Raphaël Pieroni, 2014)

 

Parallèlement à cette initiative, il est prévu d’installer des tentes dont le recouvrement permettrait de contenir le bruit des usagers des terrasses disséminées le long de la rue. Finalement, dans les cas jugés extrêmes, des limiteurs sonores pourraient venir s’ajouter au paysage matériel du dispositif pour réguler les décibels en trop. Ceux-ci servent à mesurer le niveau de décibel ambiant et ainsi à enregistrer des dépassements éventuels. Certains modèles permettent de stopper la musique automatiquement en cas de dépassement des décibels autorisés.

Limiteur sonore pour une salle commerciale (Acouconsult, 2014)

Limiteur sonore pour une salle commerciale (Acouconsult28 , 2014)

Véritables acteurs du dispositif, ces objets dont les scripts29  (Akrich 1987) ont pour objectif commun la réduction des nuisances sonores, semblent participer activement à l’orientation, à la stabilisation voire à la contrainte des actions et peuvent être « considérés comme le prolongement matériel d’un cours d’action amorcé dans un autre lieu et à un autre moment » (Barbier et Trepos 2007). C’est par exemple le cas, pour les « verres silencieux » qui ont été décris précédemment. Sur la base de leurs fonctions de traçage géographique, de réduction du bruit et d’élimination des déchets, ils peuvent être considérés comme l’un des acteurs matériels de reprise en main de l’espace public.
Au sujet des objets, Boltanski adopte une perspective plus radicale en signalant à leur sujet qu’ils sont inscrits dans un régime d’action qui orchestrent les conduites individuelles ou collectives, « ces êtres mesurés (les objets), en nous imposant la nécessité qui est inscrite en eux, ordonnent et orchestrent nos conduites » (Boltanski 1991, p.141). Ce dernier argument correspond à une vision du pouvoir unidirectionnel, où les objets viendraient imposer leur script sur des acteurs aux compétences limitées. Cependant, les objets peuvent « tout autant, être contestés, déconstruits, détournés, remodelés par des acteurs compétents. » (Barbier et Trepos 2007). Les propos d’un tenancier d’établissement au sujet des limiteurs sonores est à ce titre intéressant « les limiteurs (hum hum), quand c’est trop fort et que la musique s’arrête, du coup les gens commencent à chanter, gueuler ou alors sortir pour fumer, ce qui fait au final encore plus de bruit ».
L’exemple de la « colonne de la tolérance » (Saüle der Toleranz) mise en place par les autorités de la ville de Freiburg en Allemagne en 2010, dont la possibilité de test a été évoquée lors d’une réunion du collectif des tenanciers de la rue, est utile pour comprendre la manière dont les acteurs font preuve de compétences et de résistances face aux objets. Celle-ci est une colonne lumineuse dont les couleurs varient en fonction du bruit enregistré. Sur la Augustinerplatz, haut-lieu de noctambulisme de la ville de Freiburg, la couleur verte de la colonne indique un seuil de nuisance sonore acceptable alors que quand celle-ci vire au rouge, le seuil d’acceptabilité du bruit est dépassé. En qualité d’actrice autonome dans la régulation du bruit, elle est imaginée par les autorités comme complémentaire à la présence policière sur la place.

La colonne de la tolérance (Freiburg, 2009)

La colonne de la tolérance (Freiburg30 , 2009)

 

La réception publique du dispositif lumineux est controversée et donne lieu à des réactions de résistance qui n’étaient pas inscrites dans le scénario original. En effet, des groupes de personnes se sont enchaînés au pied de la colonne pour dénoncer une forme de restriction de liberté dans l’espace public. L’image ci-dessus montre un groupe enchaîné à la colonne dont le contrôle est visiblement assuré par la police locale. On a retrouvé également une gerbe de fleur au pied de la colonne où il est écrit : « Ici repose la tolérance de Freiburg ».

« Hier ruht Freiburg Toleranz » (traduction française : « Ici repose la tolérance de Freiburg » (Freiburg, 2009)

« Hier ruht Freiburg Toleranz »
(traduction française : « Ici repose la tolérance de Freiburg » (Freiburg31 , 2009)

 

Originellement prévue comme un monument actif dans la résolution des conflits entre voisins et usagers nocturnes de la place, celle-ci a été détournée en mausolée représentant la mort de la tolérance associée à la politique des autorités de la ville. Si d’une part, des tâches cognitives nécessaires à l’action (son contrôle, sa représentation) peuvent être déléguées à une multitude d’artefacts cognitifs (Barbier et Trepos 2007), l’exemple de « la colonne de la tolérance » démontre la capacité de résistance et de détournement des acteurs qui se révèlent dans l’action. N’ayant finalement eu que très peu d’effet sur le niveau sonore, la colonne de la tolérance, devenue aujourd’hui un objet d’attraction touristique informel de Freiburg n’a finalement pas été testée à Genève.

La nuit, une ressource et des droits

 

Au travers du cas de Sonitus nous avons vu comment une ville peut s’engager dans la lutte contre les nuisances sonores nocturnes. Sur une base cartographique, celle-ci se joue à Genève à l’échelle de la ville avec la mise en place d’un espace légitime d’action. Un processus qui est complété sur le terrain par un collectif hybride en charge de la micro-régulation de la nuit et des nuisances sonores. Dans cette perspective nous avons également identifié les rôles possibles des objets dans le processus de régulation ainsi que les formes d’appropriation et de détournement dont ils peuvent être le sujet.
Sonitus est aussi un révélateur d’enjeux qui dépassent le simple cadre des nuisances sonores pour concerner la constitution de la nuit comme une ressource pour la ville. Une ressource dont certains revendiquent l’importance culturelle, sociale et économique qu’il s’agit de préserver et de valoriser par le développement d’un droit à la nuit urbaine. Quelles seraient les bases de ce droit ? Comment pourrait-il s’inscrire dans la résolution des conflits autour des nuisances sonores ? Jusqu’à quel point représenterait-il un élément de normalisation de la nuit en ville ? Voici un ensemble de questions ouvertes qui laissent à penser que les nuisances sonores comme objet politique sont indissociables d’une politisation des pratiques sociales et culturelles nocturnes. Ce constat renvoie à la relation complexe que les sociétés occidentales entretiennent avec la nuit. Un espace-temps en dehors des rythmes diurnes qui d’un côté est associé à un imaginaire de transgression et de création, et de l’autre côté, à celui des nuisances, de la peur et des restrictions. Dans ce contexte, nous comprenons que la nuit est l’objet de perceptions et de représentations diverses et parfois conflictuelles dont les pratiques renvoient à des objets et processus étudiés aussi bien par la géographie sociale, urbaine et culturelle que par l’anthropologie32 .

RAPHAËL PIERONI

 

Raphaël Pieroni est assistant – doctorant à l’Université de Genève, dans le Département de géographie et environnement, Faculté des sciences de la société. Sa thèse, sous la direction de J.-F. Staszak, s’intitule « La fabrique de la nuit en ville. Conflits urbains et imaginaires touristiques ». Ses thèmes privilégiés de recherche sont la géographie sociale, culturelle et post-représentationnelle, les mouvements sociaux sociaux et collectifs, l’espace public et les frontières, les images et les imaginaires, la nuit urbaine. Ses enseignements portent sur la géographie culturelle et la méthode empirique en sciences sociales. Il est membre fondateur du Grand Conseil de la Nuit33  (Genève), groupe indépendant, sans pression financière ou politique, composé de professionnel-le-s, d’amateur-e-s et de spécialistes dont le but est de défendre une vie nocturne riche, variée et vivante à Genève par l’établissement de conditions cadres. Le Grand Conseil de la Nuit est structuré en groupes de travail thématiques ouverts à toute personne et organisation concernées par la question de la vie nocturne.

raphael.pieroni@unige.ch

 

Bibliographie

Akrich M., 1987, « Comment décrire les objets techniques », Techniques et culture, n°9, 49‑64.
Barbier R., Trepos J.-Y., 2007, « Humains et non-humains : un bilan d’étape de la sociologie des collectifs », Revue d’anthropologie des connaissances, n°1, 35‑58.
Boltanski L., 1991, L’Amour et la justice comme compétences : Trois essais de sociologie de l’action, Paris : Métailié, 560 p.
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  1. Concept développé par Samuel Challéat en référence à la lumière artificielle. (Challéat 2013) []
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  7. http://www.lemonde.fr/planete/article/2014/02/27/la-france-en-retard-dans-la-lutte-contre-les-nuisances-sonores_4373976_3244.html, consulté le 20 avril 2014 []
  8. http://www.radio.cz/en/section/marketplace/prague-authorities-threaten-to-curb-nightlife-noise-with-drastic-measures []
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  11.  http://www.harmonica-project.eu/, consulté le 6 mai 2014 []
  12. http://www.cerclebruit.ch/, consulté le 7 mai 2014 []
  13.   Par émergence, il faut comprendre que le bruit ne doit pas dépasser le fond sonore ambiant. Audibilité signifie l’intelligibilité de la parole.  []
  14.  http://www.ville-geneve.ch/administration-municipale/departement-environnement-urbain-securite/, consulté le 7 mars 2014 []
  15. https://www.facebook.com/pages/Association-Genevoise-des Chuchoteurs/439990809419120?id=439990809419120&sk=info, consulté le 7 mai 2014 []
  16. http://www.tdg.ch/geneve/actu-genevoise/contenu-2/lutte-contre-le-bruit-geneve/s.html, consulté le 14 avril 2014 []
  17. http://ge.ch/dares/service-du-commerce/accueil.html []
  18.  https://www.facebook.com/notrebruit, consulté le 24 mars 2014 []
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  20. http://www.grand2013.ch/projets/notrebruit-ch, consulté le 4 mars 2014 []
  21.  http://www.grand2013.ch/projets/notrebruit-ch, consulté le 8 mai 2014 []
  22.  Par « empiétement », il faut comprendre l’interdiction de disposer des éléments de terrasse au-delà des zones prévues. []
  23.  Document de présentation de Sonitus, DEUS, Ville de Genève, 2014 []
  24.  https://www.facebook.com/pages/Association-Genevoise-des-Chuchoteurs/439990809419120 consulté le 9 avril 2014 []
  25. http://www.grandconseildelanuit.ch/, consulté le 8 mai 2014 []
  26. Sites : états généraux de la nuit de Genève et de Paris : http://www.etatsgenerauxdelanuit.ch/, http://www.paris.fr/politiques/citoyennete/dossiers-d-actualite/paris-la-nuit/bilan-des-etats-generaux-de-la nuit/rub_7827_dossier_62773_port_18040_sheet_17596, consultés le 8 mai 2014 []
  27.  Traversée de la nuit à Genève : http://www.ville-geneve.ch/actualites/detail/article/1366712117-geneve-explore-nuit-concept-original/, consulté le 8 mai 2014 []
  28. Image extraite du site : http://www.acouconsult.ch/acoustique/index.php?showimage=548 []
  29.   Madeleine Akrich, sociologue des techniques, développe le concept de script pour caractériser la relation possible entre l’objet technique et son utilisateur. Le script ou scénario est définit par le contenu technique de l’objet et fonctionne comme un cadre possible de relations entre les objets et les utilisateurs.  []
  30. Source : http://www.badische-zeitung.de/freiburg/freiburger-augustinerplatz-feuer-und-bierflaschen-gegen-die-saeule-der-toleranz-16130511.html, consulté le 23 mars 2014 []
  31. http://fudder.de/artikel/2009/07/27/die-beerdigung-der-freiburger-toleranz/, consulté le 21 mars 2014 []
  32. Voir le collectif Ressources Environnementales Nocturnes, tOurisme, territoIRes (RENOIR) : http://renoir.hypotheses.org/ consulté le 14 avril 2014 []
  33.  http://www.grandconseildelanuit.ch/ consulté le 14 avril 2014 []

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